La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/02/1995 | FRANCE | N°94-80810

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 22 février 1995, 94-80810


REJET des pourvois formés par :
- X... Michel,
- Y... Jean-Pierre,
- la ville de Rennes, partie intervenante,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Rennes, 3e chambre, du 2 décembre 1993, qui, pour blessures involontaires, a notamment condamné Michel X... à 5 000 francs d'amende, Jean-Pierre Y... à 1 mois d'emprisonnement avec sursis et 10 000 francs d'amende et a statué sur les intérêts civils.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires ampliatifs, les mémoires en défense et le mémoire complémentaire produits ;
Sur les

faits et la procédure :
Attendu qu'il ressort de l'arrêt attaqué que la ville de Ren...

REJET des pourvois formés par :
- X... Michel,
- Y... Jean-Pierre,
- la ville de Rennes, partie intervenante,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Rennes, 3e chambre, du 2 décembre 1993, qui, pour blessures involontaires, a notamment condamné Michel X... à 5 000 francs d'amende, Jean-Pierre Y... à 1 mois d'emprisonnement avec sursis et 10 000 francs d'amende et a statué sur les intérêts civils.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires ampliatifs, les mémoires en défense et le mémoire complémentaire produits ;
Sur les faits et la procédure :
Attendu qu'il ressort de l'arrêt attaqué que la ville de Rennes a confié à la société Marc la maîtrise d'oeuvre de l'installation de clapets de délestage en divers points du réseau d'assainissement de la commune, pour dériver les eaux de pluie des égouts en cas de précipitations violentes ;
Que, lors d'une réunion de chantier destinée à la vérification de l'un des ouvrages, Yves Z..., technicien de la ville de Rennes, est descendu à l'aide d'une échelle dans le collecteur, par une trappe d'accès réservée au matériel ; que le mécanisme de fermeture automatique de la vanne s'est déclenché et qu'Yves Z..., coincé par l'échelle qui avait glissé et écrasé par le clapet relevé, a été grièvement blessé ;
Attendu que Michel X..., directeur général des services techniques de la ville de Rennes, et Jean-Pierre Y..., directeur de la société Marc, sont poursuivis pour blessures involontaires ;
En cet état :
I. Sur le pourvoi de la ville de Rennes, partie intervenante :
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation de l'article 320 du Code pénal, du décret n° 85-603 du 10 juin 1985 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la médecine professionnelle et préventive dans la fonction publique territoriale, notamment en son article 4, des articles 388 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de réponse à conclusions et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le directeur des services techniques de la ville de Rennes, demanderesse, coupable de blessures involontaires ;
" aux motifs que si la victime a commis une faute grave d'imprudence, sa faute n'est exonératoire de responsabilité que si elle a un caractère imprévisible et irrésistible ; que tel n'est pas le cas en l'espèce ; que la descente de M. Z... dans le déversoir était connue de toutes les personnes présentes sur le chantier ; que X... est directeur général des services techniques de la ville de Rennes ; que s'il est le supérieur hiérarchique de M. Z..., il n'est pas son employeur ; qu'il y a lieu de rechercher s'il avait compétence pour mettre en oeuvre l'hygiène et la sécurité dans ses services ; qu'une note de service du 5 août 1985 émanant de la direction du personnel reprend les termes du décret du 10 juin 1985 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail, la médecine professionnelle et préventive dans la fonction publique territoriale et en donne les modalités d'application pratiques pour la ville de Rennes ; qu'il en résulte que les agents chargés d'assurer, sous la responsabilité du maire, la mise en oeuvre des règles d'hygiène et de sécurité sont les chefs de service et le comité d'hygiène et de sécurité (CHS) ; que l'adjoint technique chargé des problèmes d'hygiène et de sécurité assure, pour sa part, une fonction d'inspection ; qu'eu égard à sa formation et à sa position hiérarchique, X... avait la qualification nécessaire pour recevoir une telle mission ; qu'il lui appartenait, au-delà même des questions spécifiques de formation, de s'assurer personnellement ou de mettre en oeuvre des dispositifs permettant de s'assurer du respect sur les chantiers des règles d'hygiène et de sécurité ; que l'expérience professionnelle de M. Z... ne dispensait pas X... de procéder ou faire procéder à des contrôles périodiques des conditions dans lesquelles il assumait ses fonctions ; qu'il apparaît clairement des circonstances de l'espèce que M. Z..., probablement par le fait de l'habitude qui rend moins vigilant quant aux dangers possibles, n'a pas respecté les règles simples de sécurité ; qu'il appartenait à X..., responsable, de rappeler par des notes, des contrôles ou des réunions spécifiques, la nécessité de s'astreindre au respect de l'ensemble des règles d'hygiène et de sécurité même dans le cas d'opérations courantes ; que s'il ne disposait pas des moyens suffisants pour mener à bien cette mission, il devait alerter la mairie des difficultés ou problèmes soulevés au sein de son service ; que X..., par son inaction et son abstention, a donc contribué à la réalisation du dommage et doit être retenu dans les liens de la prévention ;
" alors qu'en l'état des circonstances de l'accident résultant exclusivement de la méconnaissance des règles élémentaires de sécurité de la part en particulier du maître d'oeuvre présent sur le chantier au moment des faits, la Cour ne pouvait retenir le principe de la responsabilité pénale de X... en sa seule qualité de directeur général des services techniques de la ville de Rennes, en l'absence en tout état de cause d'un lien de causalité constaté entre l'accident et la nature de l'information délivrée en matière d'hygiène et de sécurité au sein des services de la ville " ;
Attendu que la ville de Rennes est intervenue à l'instance, tant devant les premiers juges qu'en cause d'appel, en qualité de tiers payeur pour obtenir le remboursement des prestations versées à la victime, partie civile ; qu'elle a expressément limité son pourvoi, formé en cette même qualité, aux dispositions civiles de l'arrêt ;
Que, dès lors, le moyen, en ce qu'il conteste la déclaration de culpabilité de l'un des prévenus, agent de cette collectivité territoriale, n'est pas recevable ;
II. Sur les pourvois de Michel X... et de Jean-Pierre Y..., prévenus :
Sur le moyen unique de cassation proposé par Michel X... et pris de la violation de l'article 320 du Code pénal, du décret n° 85-603 du 10 juin 1985 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la médecine professionnelle et préventive dans la fonction publique territoriale, notamment en son article 4, des articles 388 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, défaut de réponse à conclusions et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Michel X..., le demandeur, directeur général des services techniques de la ville de Rennes, coupable de blessures involontaires et l'a condamné, de ce chef, à une amende ;
" aux motifs que Z..., qui était à l'époque des faits responsable de la cellule assainissement du service Infra de la ville de Rennes et avait déjà assuré le suivi de trois chantiers, assurait le suivi du chantier sur le lieu duquel il a été grièvement blessé le 23 mars 1989 ; que lors d'une réunion de vérification d'ouvrage et de son fonctionnement à l'initiative de la société Marc, maître d'oeuvre, il représentait la ville de Rennes, maître d'ouvrage, et est descendu dans un collecteur pour procéder à des vérifications en utilisant une échelle non fixée dont la base reposait sur le clapet du collecteur et le sommet sur le bord de la trappe d'accès à hauteur de la chaussée ; qu'arrivé sur le clapet, il a senti celui-ci se soulever, a cherché à ressortir précipitamment tout en prévenant son collègue du danger ; que le clapet, dans sa manoeuvre de relèvement, a fait glisser l'échelle puis a coincé M. Z... entre l'échelle appuyée verticalement sur la voûte de la galerie et le clapet totalement relevé ; que ce n'est qu'une quinzaine de minutes plus tard qu'il a pu être dégagé ; qu'il résulte des deux expertises techniques successivement ordonnées par le juge d'instruction que M. Z... a pris un risque important en descendant au niveau de la vanne mobile et que M. A... (conducteur de travaux de la société Marc) aurait dû s'opposer à la visite de l'égout dans de telles conditions ; que Z... a incontestablement commis une faute grave en ne respectant pas les consignes élémentaires de sécurité que, compte tenu de sa longue expérience professionnelle et de sa participation à l'élaboration de documents sur les procédures à suivre pour la visite des égouts, il ne pouvait ignorer que la faute de la victime n'est exonératoire de toute autre responsabilité que si elle a un caractère imprévisible et irrésistible ; que tel n'est pas le cas en l'espèce, la descente de Z... dans le déversoir ayant été connue de toutes les personnes présentes sur le chantier ; que Michel X... est directeur général des services techniques de la ville de Rennes ; que s'il est le supérieur hiérarchique de Z..., il n'est pas son employeur ; qu'il y a lieu de rechercher s'il avait compétence pour mettre en oeuvre l'hygiène et la sécurité dans ses services ; qu'une note de service du 5 août 1985 émanant de la direction du personnel reprend les termes du décret du 10 juin 1985 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail, la médecine professionnelle et préventive dans la fonction publique territoriale et en donne les modalités pratiques d'application pour la ville de Rennes ; qu'il en résulte que les agents chargés d'assurer, sous la responsabilité du maire, la mise en oeuvre des règles d'hygiène et de sécurité sont les chefs de service et le CHS ; que l'adjoint technique chargé des problèmes d'hygiène et de sécurité assure, pour sa part, une fonction d'inspection ; qu'eu égard à sa formation (ingénieur diplômé de l'ENSM de Nantes) et à sa position hiérarchique (juste au-dessous du secrétaire général), X... avait la qualification nécessaire pour recevoir une telle mission ; qu'il lui appartenait, au-delà même des questions spécifiques de formation, de s'assurer personnellement ou de mettre en oeuvre des dispositifs permettant de s'assurer du respect sur les chantiers des règles d'hygiène et de sécurité ; que l'expérience professionnelle de M. Z... ne dispensait pas X... de procéder ou faire procéder à des contrôles périodiques des conditions dans lesquelles il assumait ses fonctions ; qu'il apparaît clairement des circonstances de l'espèce que M. Z..., probablement par le fait de l'habitude qui rend moins vigilant quant aux dangers possibles, n'a pas respecté les règles simples de sécurité ; qu'il appartenait à X..., responsable, de rappeler par des notes, des contrôles ou des réunions spécifiques, la nécessité de s'astreindre au respect de l'ensemble des règles d'hygiène et de sécurité, même dans le cas d'opérations courantes ; que s'il ne disposait pas des moyens suffisants pour mener à bien cette mission, il devait alerter le maire des difficultés ou problèmes soulevés au sein de son service ; que X..., par son inaction et son abstention, a donc contribué à la réalisation du dommage et doit être retenu dans les liens de la prévention ;
" alors que, d'une part, il ne suffisait pas que X... eût la qualification nécessaire pour recevoir une mission de sécurité, en l'absence de délégation expresse de ce chef ; que faute d'avoir établi l'existence d'une telle délégation, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
" alors que, d'autre part, la Cour ne pouvait, sans se contredire, retenir la responsabilité de X..., en sa qualité de directeur général des services techniques de la ville, tout en constatant que les agents chargés d'assurer sous la responsabilité du maire la mise en oeuvre des règles d'hygiène et de sécurité sont les chefs de service et le CHS ;
" alors, surtout, que dans ses conclusions, le demandeur contestait formellement avoir reçu quelque délégation de pouvoirs que ce soit en matière de sécurité autrement que pour les personnes placées directement sous ses ordres, dans son propre service ; qu'il faisait valoir que c'était le secrétaire général adjoint, sous l'autorité du secrétaire général, qui avait compétence dans le domaine de la politique de sécurité et de la formation à la sécurité mis en oeuvre par la direction du personnel ; que, de par ses fonctions, il assumait une direction générale des services techniques, c'est-à-dire qu'il était le supérieur hiérarchique des chefs de chacun des services eux-mêmes responsables du fonctionnement de leur service et de leur personnel ; qu'Yves Z... était sous la responsabilité du chef du service Infra et qu'il existait quatre niveaux hiérarchiques entre ce dernier et lui-même ; qu'il s'en déduit qu'il n'avait aucune fonction de responsabilité directe sur ce qui concerne la formation des personnels aux problèmes d'hygiène et de sécurité, aucune responsabilité quant à la mise en oeuvre des règles y relatives dans les services qu'il coiffait dans sa mission de direction générale et n'avait pas de lien hiérarchique direct avec la victime de l'accident du travail en cause ; que faute d'avoir répondu à ces chefs déterminants des conclusions du demandeur, la cour d'appel a privé sa décision de motifs ;
" alors encore qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que l'entreprise Marc, aux termes du contrat la liant à la ville de Rennes, assurait la responsabilité du chantier et devait veiller à l'hygiène et à la sécurité ; que Z..., qui assurait le suivi du chantier, avait une longue expérience professionnelle et avait participé à l'élaboration de documents sur les procédures à suivre pour les visites des égouts ; que l'accident en cause était résulté de la méconnaissance tant par celui-ci que par le conducteur de travaux de l'entreprise Marc de règles élémentaires de sécurité qu'ils ne pouvaient ignorer ; qu'en cet état, la cour d'appel a constaté le caractère imprévisible et irrésistible pour X..., non présent sur le chantier, de la faute de la victime et ne pouvait donc retenir, à sa charge, aucune faute personnelle ; que, de ce chef, la cour d'appel n'a pas tiré de ses propres constatations les conséquences qui en résultaient nécessairement ;
" alors, enfin et en toute hypothèse, qu'il était reproché au demandeur de n'avoir pas donné à Z... une formation à la sécurité suffisante ; qu'en retenant, à son encontre, le fait de n'avoir pas rappelé à Z... par des notes, des contrôles ou des réunions spécifiques, la nécessité de s'astreindre au respect de l'ensemble des règles d'hygiène et de sécurité, même dans le cas d'opérations courantes, " au-delà même des questions spécifiques de formation ", la cour d'appel a fondé sa condamnation sur un fait distinct et étranger à la prévention et, ce faisant, a excédé ses pouvoirs " ;
Attendu que, pour déclarer Michel X..., directeur général des services techniques de la ville de Rennes, coupable du délit de blessures involontaires, l'arrêt attaqué relève qu'il était chargé, en sa qualité de chef de service, d'assurer sous la responsabilité du maire la mise en oeuvre des règles d'hygiène et de sécurité, conformément au décret du 10 juin 1985 relatif à l'hygiène et la sécurité du travail dans la fonction publique territoriale et à une note de service prise pour son application le 5 août 1985 ;
Attendu que les juges énoncent qu'il lui incombait dès lors de rappeler la nécessité de respecter ces règles même dans le cas d'opérations courantes et de mettre en oeuvre des dispositifs permettant d'en vérifier l'observation sur les chantiers, notamment par des contrôles périodiques ; que les juges ajoutent que s'étant abstenu d'y procéder, il a contribué à la réalisation de l'accident survenu à la suite d'une faute grave de la victime, laquelle n'a pas respecté les règles élémentaires de sécurité pour la visite des égouts ;
Attendu qu'en statuant ainsi, par des motifs procédant d'une appréciation souveraine du domaine de compétence du prévenu, la cour d'appel, qui a répondu comme elle le devait aux conclusions de celui-ci et n'a pas excédé les limites de sa saisine, a justifié sa décision sans encourir aucun des griefs allégués ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le moyen unique de cassation proposé par Jean-Pierre Y..., pris de la violation des articles 319, 320 du Code pénal, 2, 3, 485, 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Jean-Pierre Y... coupable de blessures involontaires sur la personne de Z..., l'a condamné à 1 mois d'emprisonnement avec sursis et 10 000 francs d'amende et au paiement de diverses indemnités aux parties civiles (ville de Rennes et consorts Z...- B...) ;
" aux motifs que Z..., technicien de la ville de Rennes a commis une faute grave en accédant à un égout par une trappe destinée au seul matériel à l'aide d'une échelle non fixée et en interrompant de sa propre initiative les opérations de mise en fonctionnement de systèmes hydraulique et électrique, ce qui ne présentait aucun caractère d'urgence, mais que Y..., directeur de la société Marc, entreprise de gros oeuvre et maître d'oeuvre avait pouvoir de sécurité au sein de l'entreprise qui assurait la responsabilité du chantier et devait veiller à l'hygiène et à la sécurité ; que si Z... est intervenu en qualité de représentant du maître d'ouvrage, cela ne déchargeait pas la société Marc de sa responsabilité d'autant plus que la réunion avait été organisée à son initiative et les objectifs fixés par elle ; qu'il apparaît que le représentant de la société Marc sur le chantier, M. A..., après avoir demandé à Z... de ne pas descendre dans l'égout a finalement accédé à sa demande ; qu'il résulte notamment de son audition devant les services de police qu'il a assisté Z... dans l'ouverture du regard, la mise en place de l'échelle et l'arrêt des opérations de mise en service d'ouvrage qui avaient débuté avant l'arrivée de M. Z..., qu'il a fait prévenir les personnels travaillant sur l'armoire de commandes par l'adjoint de Z... mais n'a donné personnellement aucune consigne, ne s'est pas assuré de l'arrêt effectif des manoeuvres en cours ; que si en l'espèce l'entreprise n'avait pas à établir un plan d'hygiène et de sécurité, cela ne la dispensait pas de prévoir des procédures spécifiques pour les essais et mise en fonctionnement des ouvrages ; qu'ainsi si la qualité de représentant du maître d'ouvrage et la compétence technique de celui-ci rendait difficile l'opposition de la société Marc à une visite du système de sondes, il lui appartenait de veiller aux respects des règles de sécurité ; qu'il était particulièrement insuffisant de faire donner par un tiers des ordres vagues d'arrêt des essais, de fournir une échelle non fixée, de permettre l'accès par un regard destiné au matériel, que Y..., responsable de la sécurité dans l'entreprise, devait s'assurer de la mise en oeuvre de ces règles élémentaires de sécurité par des vérifications personnelles ou par la mise en place de consignes précises concernant les chantiers faisant intervenir différentes entreprises ou services et présentant par leur nature même une certaine complexité et des risques importants pour la sécurité des différentes personnes présentes sur le chantier ;
" alors, d'une part, que l'arrêt ne pouvait s'abstenir de répondre aux conclusions de Y... faisant valoir que l'entreprise Marc, entreprise de travaux de génie civil, avait sous-traité les travaux électriques et hydrauliques, ces sous-traitances ayant été expressément approuvées par la ville de Rennes, si bien qu'elle n'avait aucune règle particulière de sécurité à faire observer le jour de l'accident survenu lors de la connexion en armoire des deux réseaux, ce qu'a spécifié le rapport de l'inspection du travail ; que le seul reproche formulé à travers le réquisitoire et fondement de l'accusation, tenait au fait d'avoir omis de solliciter auprès de la ville un arrêté réglementant la circulation, reproche totalement infondé, et expressément écarté par le tribunal ; si bien, qu'aucune faute pénale personnelle n'était établie à l'encontre de la société Marc dont le représentant sur place n'a pas été poursuivi ;
" alors, d'autre part, qu'il est contradictoire de dire que la réunion du 23 mars avait pour but une vérification de l'ouvrage notamment de la simple " connexion des parties électriques et hydrauliques avant la réception des travaux qui devait intervenir plus tard " ; que Z..., en retard et pressé, a voulu vérifier le fonctionnement des sondes automatiques du clapet " qu'il n'est pas contesté que cette opération n'avait pas été prévue par M. A... (technicien de la société Marc) que Z... en a pris l'initiative ", et de fonder la culpabilité du directeur général de l'entreprise Marc sur le seul fait qu'il n'a pas prévu de procédures spécifiques de sécurité destinées à prévenir un danger lié à une intervention qui n'était pas prévue ;
" alors, enfin, que ne retenant en définitive aucun manque de Y... à un texte réglementaire quel qu'il fût, l'arrêt infirmatif ne caractérise aucunement à son encontre le délit de blessures involontaires qu'il sanctionne ; qu'il ne peut retenir à l'encontre du directeur de la société Marc ce qui est en dernier lieu le seul fondement de la condamnation pour faute personnelle retenue à son encontre de ne pas avoir prévu des procédures spécifiques et des règles de sécurité en fonction d'une réunion organisée par la société " à son initiative et des objectifs fixés par elle " tout en admettant que la descente dans l'égout cause unique de l'accident n'avait pas été prévue par M. A... ; que Z... en a pris l'initiative ; que l'arrêt ne caractérise pas les manquements du préposé de la société Marc non poursuivi et non condamné puisque l'arrêt relève qu'il a demandé à Z... de ne pas descendre dans l'égout, et qu'il a donné au mieux tous ordres pour parer à un danger éventuel au regard de la décision imprévue, inutile et autoritaire de l'agent de la ville représentant du maître d'ouvrage " ;
Attendu que, pour déclarer Jean-Pierre Y... coupable du délit de blessures involontaires, l'arrêt attaqué retient qu'en qualité de directeur de la société Marc, le prévenu avait en charge la sécurité dans l'entreprise ; que les juges relèvent que celle-ci assurait comme maître d'oeuvre la responsabilité du chantier et devait ainsi veiller au respect des règles de sécurité pour les essais et la mise en fonctionnement des ouvrages ; qu'ils énoncent que Jean-Pierre Y... a manqué à cette obligation en ne s'assurant pas de leur mise en oeuvre par des vérifications ou consignes ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, d'où il résulte que la négligence du prévenu a concouru à la réalisation de l'accident, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;
Que le moyen, qui remet en discussion l'appréciation souveraine par les juges du fond des faits et circonstances de la cause, doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 94-80810
Date de la décision : 22/02/1995
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

TRAVAIL - Hygiène et sécurité des travailleurs - Bâtiments et travaux publics - Fonction publique territoriale - Décret du 10 juin 1985 - Responsabilité pénale - Chef de service.

COMMUNE - Fonction publique territoriale - Application des règles d'hygiène et de sécurité - Décret du 10 juin 1985 - Responsabilité pénale - Chef de service

TRAVAIL - Hygiène et sécurité des travailleurs - Responsabilité pénale - Chef de service - Commune - Fonction publique territoriale

Justifie sa décision la cour d'appel qui, après avoir relevé que le directeur général des services techniques d'une commune était chargé, en sa qualité de chef de service, d'assurer sous la responsabilité du maire la mise en oeuvre des règles d'hygiène et de sécurité, conformément au décret du 10 juin 1985 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail dans la fonction publique territoriale et à une note de service prise pour son application, énonce, pour le déclarer coupable du délit de blessures involontaires, qu'il a omis de veiller à l'observation des règles de sécurité sur les chantiers et a ainsi contribué à la réalisation de l'accident survenu à la suite d'une faute grave de la victime, technicien de la commune.


Références :

Code pénal 320
Décret 85-603 du 10 juin 1985 art. 4

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 02 décembre 1993


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 22 fév. 1995, pourvoi n°94-80810, Bull. crim. criminel 1995 N° 82 p. 195
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1995 N° 82 p. 195

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Le Gunehec
Avocat général : Avocat général : M. Dintilhac.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Ferrari.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, la SCP Rouvière et Boutet, MM. Bouthors, Le Prado.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1995:94.80810
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award