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29/11/1995 | FRANCE | N°95-83951

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 29 novembre 1995, 95-83951


REJET du pourvoi formé par :
- le procureur général près la cour d'appel de Rennes,
- X... François, Y... Pierre-Henri, parties civiles,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Rennes, en date du 29 juin 1995 qui, dans l'information suivie contre personne non dénommée des chefs d'abus de biens et de pouvoir sociaux, escroqueries, complicité, recel et abus de confiance, a dit n'y avoir lieu à annulation d'actes de la procédure.
LA COUR,
Les pourvois étant joints en raison de la connexité ;
Vu lesdits articles 570, 571 et 575 du Code de

procédure pénale ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en...

REJET du pourvoi formé par :
- le procureur général près la cour d'appel de Rennes,
- X... François, Y... Pierre-Henri, parties civiles,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Rennes, en date du 29 juin 1995 qui, dans l'information suivie contre personne non dénommée des chefs d'abus de biens et de pouvoir sociaux, escroqueries, complicité, recel et abus de confiance, a dit n'y avoir lieu à annulation d'actes de la procédure.
LA COUR,
Les pourvois étant joints en raison de la connexité ;
Vu lesdits articles 570, 571 et 575 du Code de procédure pénale ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 3 octobre 1995, prescrivant l'examen immédiat des pourvois ;
Vu les mémoires produits tant en demande qu'en défense ;
Sur le premier moyen de cassation proposé par le procureur général et pris de la violation des articles 56, 81, 94, 485, 512 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré régulière l'apposition, à la demande du juge d'instruction, par des officiers de police judiciaire, des scellés sur des locaux d'une entreprise de presse ;
" aux motifs que l'apposition préalable de scellés provisoires, destinée à permettre au juge d'instruction d'opérer lui-même ultérieurement une perquisition, ne constituait pas un acte de perquisition mais une simple mesure conservatoire destinée à éviter la disparition des preuves ou indices ;
" alors que l'apposition de ces scellés, parce qu'elle limite les libertés d'aller et venir et de communiquer des usagers des lieux, réalise une mise sous main de justice qui, en raison de son caractère coercitif, la fait entrer dans la catégorie des actes constitutifs de la perquisition à laquelle elle s'est intégrée jusqu'à en constituer un élément nécessaire " ;
Sur le second moyen de cassation proposé par le même demandeur et pris de la violation des articles 56-2, 485, 512 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt a déclaré régulière l'apposition à la demande d'un juge d'instruction, par des officiers de police judiciaire, des scellés sur des locaux d'une entreprise de presse ;
" aux motifs que le dossier révélait que le magistrat instructeur avait veillé à ne pas porter atteinte à la libre activité des journalistes et à ne pas perturber la diffusion de l'information en faisant apposé les scellés provisoires en début de matinée et en limitant la durée de ceux-ci au temps strictement nécessaire à son arrivée sur place ;
" alors, d'une part, que le 4 juillet 1995, soit trois jours avant les opérations de perquisitions, le magistrat instructeur, donnait mission déjà aux officiers de police judiciaire, requis pour l'assister, d'apposer, si nécessaire, des scellés ;
" alors d'autre part, que le jour du transport, par convenance personnelle, le juge d'instruction se déplaçait d'abord au domicile privé du dirigeant de l'entreprise de presse, tandis que sur ces instructions, simultanément et hors sa présence, des officiers de police judiciaire apposaient des scellés sur des locaux de l'entreprise de presse " ;
Sur le moyen unique de cassation proposé pour François-Régis X... et Pierre-Henri Y... pris de la violation des articles 56-2 du Code de procédure pénale, 81 et 94 du même Code, 1er et suivants de la loi du 19 juillet 1881, 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué a refusé d'annuler la commission rogatoire d'un juge d'instruction prescrivant l'apposition par des officiers de police judiciaire de scellés provisoires dans des locaux dépendant d'une entreprise de presse et sur des documents trouvés dans ses locaux, ainsi que les procès-verbaux constatant l'exécution de ces mesures et les pièces afférentes aux perquisitions, saisies et scellés effectués ultérieurement par le juge d'instruction dans ses locaux ;
" aux motifs que le juge d'instruction tient de l'article 81 du Code de procédure pénale, le pouvoir de procéder à tous les actes d'information qu'il juge utiles à la manifestation de la vérité, quel qu'en soit le caractère coercitif ; que l'apposition de scellés provisoires, destinée à permettre ultérieurement au juge d'instruction d'effectuer une perquisition dans les lieux, ne constitue pas un acte de perquisition mais une simple mesure conservatoire destinée à éviter la disparition des preuves ou indices ; que ces scellés n'ont duré que le temps strictement nécessaire à l'arrivée du magistrat sur place ;
" alors, d'une part, que selon l'article 81 du Code de procédure pénale lui-même, le juge doit procéder " conformément à la loi ", à tous les actes d'information qu'il juge utiles à la manifestation de la vérité ; que l'article 56-2 du Code de procédure pénale prévoit que les perquisitions dans les locaux d'une entreprise de presse ne peuvent être effectuées par un magistrat ; que l'apposition de scellés provisoires préalables aux opérations de perquisition prévues par le magistrat instructeur et destinés selon sa propre commission rogatoire à lui permettre de faciliter ces opérations et d'attendre son transport, constitue un acte participant de la perquisition elle-même et est donc soumise aux dispositions de l'article 56-2 précité ; que seul le magistrat instructeur ou un autre juge d'instruction pouvait donc y procéder, les officiers de police judiciaire étant radicalement incompétents pour le faire ; qu'en refusant d'annuler les actes litigieux, la chambre d'accusation a violé les textes précités ;
" alors, d'autre part, que la chambre d'accusation ne s'explique pas sur le fait que les scellés provisoires, effectués sans intervention du juge d'instruction, ont eu une ampleur excessive, tant pour les locaux concernés que pour les pièces visées, et ont ainsi constitué une entrave injustifiée au fonctionnement de l'entreprise de presse ; qu'en se bornant à répondre par le motif inopérant que le magistrat instructeur était arrivé au plus vite sur les lieux, sans s'expliquer sur le caractère excessif de la paralysie non seulement dans le temps mais dans ses effets provoquée par les mesures provisoires prises par les officiers de police judiciaire avant son arrivée, la chambre d'accusation n'a pas donné de base légale à sa décision ;
" alors, enfin que, en l'absence de toute nécessité dûment constatée de procéder à la perquisition au domicile personnel du dirigeant avant de le faire dans les locaux de l'entreprise de presse elle-même, en choisissant sans autre raison que celle de sa commodité personnelle de procéder dans un ordre lui imposant (selon lui) des mesures provisoires effectuées par de simples officiers de police judiciaire dans les locaux de l'entreprise de presse, le juge d'instruction a violé les textes susvisés " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, saisi d'une information ouverte sur plainte avec constitution de partie civile par Philippe Z... des chefs notamment, d'abus de biens et de pouvoirs sociaux, escroqueries et recel, le juge d'instruction de Rennes a décidé de procéder à des perquisitions au domicile de François X... puis dans les locaux de plusieurs sociétés et d'une association appartenant au groupe Ouest-France ; qu'il a, par commission rogatoire du 4 juillet 1994, chargé le SRPJ de Rennes d'apposer le matin du jour fixé, soit le 7 juillet 1994, des scellés provisoires sur les portes de divers bureaux de dirigeants ou d'employés, ainsi que de salles des coffres ou d'archives, aux sièges de ces personnes morales ;
Attendu que pour rejeter la requête du ministère public tendant à l'annulation des actes d'apposition desdits scellés ainsi que des perquisitions et des saisies subséquentes, la chambre d'accusation énonce que le juge d'instruction tient des articles 81 et 94 le pouvoir de prendre les mesures qui s'imposent pour éviter la disparition des preuves et des indices dans l'attente de l'exécution d'une perquisition, que ces mesures telles celles critiquées ne peuvent être assimilées à la perquisition elle-même, laquelle implique une recherche en un lieu normalement clos ; qu'en l'espèce, le magistrat instructeur s'est conformé aux dispositions de l'article 56-2 du Code de procédure pénale en procédant en personne, dans l'ordre par lui choisi et selon sa propre disponibilité, aux actes mêmes de perquisition dans les divers locaux sur lesquels les scellés provisoires avaient été apposés en tout début de matinée, pour éviter de perturber l'activité des journalistes, et n'ont été maintenus que le temps strictement nécessaire à l'arrivée sur les lieux du magistrat ; que les juges ajoutent qu'il n'est pas contesté que le quotidien Ouest-France a paru normalement le lendemain matin ;
Attendu qu'en cet état, la chambre d'accusation a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;
Qu'en effet, pour l'application de l'article 56-2 du Code de procédure pénale, ne peuvent être assimilées à la perquisition, relevant du seul office du juge, les mesures préparatoires qui sont nécessaires à son exécution dans le respect des dispositions spéciales de ce texte et qui sont mises en oeuvre par délégation du magistrat et sous son contrôle, conformément à l'article 151 du même Code ;
Que, dès lors, les moyens ne peuvent qu'être écartés ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 95-83951
Date de la décision : 29/11/1995
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

INSTRUCTION - Perquisition - Entreprise de presse - Apposition de scellés provisoires - Mesures préparatoires - Assimilation à la perquisition (non) - Délégation à des officiers de police judiciaire - Possibilité.

PRESSE - Entreprise de presse - Perquisition - Apposition de scellés provisoires - Mesures préparatoires - Assimilation à la perquisition (non) - Délégation à des officiers de police judiciaire - Possibilité

INSTRUCTION - Commission rogatoire - Exécution - Perquisition - Entreprise de presse - Apposition de scellés provisoires - Mesures préparatoires - Assimilation à la perquisition (non) - Délégation à des officiers de police judiciaire - Possibilité

OFFICIER DE POLICE JUDICIAIRE - Commission rogatoire - Exécution - Perquisition - Entreprise de presse - Apposition de scellés provisoires - Mesures préparatoires - Assimilation à la perquisition (non) - Délégation - Possibilité

Au sens de l'article 56-2 du Code de procédure pénale, ne peuvent être assimilées à la perquisition relevant du seul office du juge, les mesures préparatoires, qui sont nécessaires à son exécution dans le respect des dispositions spéciales de ce texte et qui sont mises en oeuvre, par délégation du magistrat et sous son contrôle, dans les conditions prévues par l'article 151 dudit Code.


Références :

Code de procédure pénale 56-2

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes (chambre d'accusation), 29 juin 1995


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 29 nov. 1995, pourvoi n°95-83951, Bull. crim. criminel 1995 N° 363 p. 1063
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1995 N° 363 p. 1063

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Le Gunehec
Avocat général : Avocat général : M. Le Foyer de Costil.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Fabre.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Waquet, Farge et Hazan, la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1995:95.83951
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