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20/06/1996 | FRANCE | N°94-85796

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 20 juin 1996, 94-85796


REJET du pourvoi formé par :
- X... Frédéric,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble, chambre correctionnelle, en date du 17 novembre 1994, qui, pour fraude fiscale, l'a condamné à 6 mois d'emprisonnement avec sursis, 200 000 francs d'amende, a ordonné l'affichage de la décision et a prononcé sur les demandes de l'administration des Impôts, partie civile.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande, additionnel et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article L. 228 du Livre des procédures fiscales, des articles 485, 593

du Code de procédure pénale :
" en ce que la décision attaquée condamne le ...

REJET du pourvoi formé par :
- X... Frédéric,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble, chambre correctionnelle, en date du 17 novembre 1994, qui, pour fraude fiscale, l'a condamné à 6 mois d'emprisonnement avec sursis, 200 000 francs d'amende, a ordonné l'affichage de la décision et a prononcé sur les demandes de l'administration des Impôts, partie civile.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande, additionnel et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article L. 228 du Livre des procédures fiscales, des articles 485, 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que la décision attaquée condamne le demandeur sur le fondement de l'article 1741 du Code général des impôts, sans qu'il résulte de l'arrêt que la poursuite a été engagée après avis conforme de la commission des infractions fiscales ;
" alors que les décisions doivent faire preuve en elles-mêmes de leur régularité ; qu'il résulte de l'article L. 228 du Livre des procédures fiscales que les plaintes tendant à l'application de sanctions pénales, notamment en matière d'impôts directs, ne peuvent être déposées par l'Administration que sur avis conforme de la commission des infractions fiscales ; que les juges du fond ne peuvent donc entrer en condamnation sans avoir constaté l'existence de cet avis, et ce à peine de nullité de leur décision " ;
Attendu qu'il ne résulte ni de l'arrêt attaqué ni d'aucunes pièces de procédure que le prévenu ait excipé devant les juges du fond de l'absence, au dossier, d'un avis préalable de la commission des infractions fiscales ;
Que, dès lors, le moyen présenté pour la première fois devant la Cour de Cassation est, en application de l'article 385 du Code de procédure pénale, irrecevable ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, de l'article 4 du protocole n° 7 additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, de l'article 1741 du Code général des impôts, des articles 1728 à 1730 du même Code, des articles 80 D et 80 E du Livre des procédures fiscales, de la règle " non bis in idem ", des articles 485 et 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que la décision attaquée a condamné le demandeur pour fraude fiscale ;
" aux motifs (dont résultent comme X... Frédéric l'avait soutenu) que l'appréciation de l'Administration dans le choix du niveau de la sanction purement fiscale du comportement de X... Frédéric sur l'échelle des pénalités applicables à l'impôt éludé est juridiquement indépendante de l'appréciation du juge pénal sur l'existence de l'élément intentionnel de l'infraction de fraude fiscale ;
" alors que la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et le protocole additionnel n° 7 interdisent une double condamnation pour les mêmes faits sur une accusation en matière pénale ; que constitue une accusation en matière pénale au sens de la Convention et une sanction pénale, une sanction intervenant en raison du comportement lorsque la sanction encourue consiste en une amende d'un montant élevé ; que tel est bien le cas des amendes que l'administration fiscale peut infliger pour retard dans les déclarations ou défaut de déclaration ; que la cour d'appel, constatant que le demandeur avait déjà été l'objet de sanctions de la part de l'administration fiscale, ne pouvait plus entrer en condamnation sous peine de violer la règle " non bis in idem " ;
Attendu que X... Frédéric a soutenu, pour sa défense, que des pénalités fiscales ayant déjà été infligées pour les mêmes faits, il ne pouvait à nouveau faire l'objet de sanctions ;
Attendu que, pour écarter les conclusions du prévenu et le condamner à des peines d'emprisonnement et d'amende entrant dans les prévisions de l'article 1741 du Code général des impôts, la cour d'appel énonce que les poursuites pénales du chef de fraude fiscale, qui visent à réprimer des comportements délictueux tendant à la soustraction à l'impôt, ont une nature et un objet différents de ceux poursuivis, par l'Administration, dans le cadre du contrôle fiscal et qui tend au recouvrement des impositions éludées ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, la cour d'appel a donné une base légale à sa décision ;
Qu'en effet, la règle " non bis in idem " consacrée par l'article 4 du protocole n° 7, additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ne trouve à s'appliquer, selon les réserves faites par la France en marge de ce protocole, que pour les infractions relevant en droit français de la compétence des tribunaux statuant en matière pénale et n'interdit pas le prononcé de sanctions fiscales parallèlement aux sanctions infligées par le juge répressif ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 94-85796
Date de la décision : 20/06/1996
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Protocole additionnel n° 7 - Article 4 - Principe de l'interdiction des doubles poursuites - Violation - Cumul des sanctions fiscales et des sanctions pénales (non).

1° La règle " non bis in idem " consacrée par l'article 4 du protocole n° 7, additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ne trouve à s'appliquer, selon les réserves faites par la France en marge de ce protocole, que pour les infractions relevant en droit français de la compétence des tribunaux statuant en matière pénale et n'interdit pas le prononcé de sanctions fiscales parallèlement aux sanctions infligées par le juge répressif (1).

2° IMPOTS ET TAXES - Impôts directs et taxes assimilées - Pénalités et peines - Cumul idéal d'infractions - Faits constituant à la fois une infraction fiscale et une infraction de droit commun - Poursuites distinctes - Peines applicables.

2° Les poursuites pénales du chef de fraude fiscale, qui visent à réprimer des comportements délictueux tendant à la soustraction à l'impôt, ont une nature et un objet différents de ceux poursuivis, par l'Administration, dans le cadre du contrôle fiscal, qui tendent au recouvrement des impositions éludées (2). Il en résulte qu'un contribuable, prévenu de fraude fiscale, peut encourir à la fois les sanctions fiscales prévues à l'article 1729 du Code général des impôts et les sanctions pénales de l'article 1741 de ce même Code.


Références :

1° :
2° :
CGI 1729, 1741
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950, protocole additionnel n° 7, art. 4

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble (chambre correctionnelle), 17 novembre 1994

CONFER : (1°). (1) A rapprocher : Conseil constitutionnel, 1989-07-28, décision 89-260, Rec. page 71 ;

Cour européenne des droits de l'homme, 1994-02-24, affaire 3/1993/398/476, X... c/ France. CONFER : (2°). (2) Cf. Chambre criminelle, 1967-05-24, Bulletin criminel 1967, n° 163, p. 384 (rejet), et les arrêts cités ;

Chambre criminelle, 1970-04-09, Bulletin criminel 1970, n° 114, p. 262 (rejet), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 20 jui. 1996, pourvoi n°94-85796, Bull. crim. criminel 1996 N° 268 p. 806
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1996 N° 268 p. 806

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Culié, conseiller le plus ancien faisant fonction.
Avocat général : Avocat général : M. Le Foyer de Costil.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. de Mordant de Massiac.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Ryziger et Bouzidi, M. Foussard.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1996:94.85796
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