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03/04/1997 | FRANCE | N°94-85185

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 03 avril 1997, 94-85185


CASSATION sans renvoi des pourvois formés par :
- X... Maurice,
- Y... Raymond,
- la société Sofrie,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 13e chambre, en date du 28 septembre 1994, qui, pour infraction douanière, les a condamnés chacun à 3 mois d'emprisonnement solidairement avec la société Sofrie au paiement d'une amende de 267 863 francs, d'une somme de même montant pour tenir lieu de confiscation et d'une somme de 6 547 francs au titre des droits compromis et a autorisé l'exercice de la contrainte par corps.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison d

e leur connexité ;
Vu le mémoire ampliatif produit commun aux demandeurs et...

CASSATION sans renvoi des pourvois formés par :
- X... Maurice,
- Y... Raymond,
- la société Sofrie,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 13e chambre, en date du 28 septembre 1994, qui, pour infraction douanière, les a condamnés chacun à 3 mois d'emprisonnement solidairement avec la société Sofrie au paiement d'une amende de 267 863 francs, d'une somme de même montant pour tenir lieu de confiscation et d'une somme de 6 547 francs au titre des droits compromis et a autorisé l'exercice de la contrainte par corps.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de leur connexité ;
Vu le mémoire ampliatif produit commun aux demandeurs et le mémoire en défense ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 342, 343, 414 et 426-2 du Code des douanes, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré établi le délit de fausse déclaration d'espèces à l'importation reproché à Maurice X... et Raymond Y... ;
" aux motifs que c'est par une exacte application des règles générales pour l'interprétation de la nomenclature tarifaire, des notes de section et chapitres 90 et 97 du tarif douanier 1987, des notes explicatives du Conseil de coopération douanière relatives aux produits en cause que l'administration des Douanes a estimé que la marchandise concernée relevait de la position tarifaire 97-03 B ; qu'en effet certains jouets, qui sont la reproduction d'articles à l'usage des adultes, se distinguent des seconds par la nature des matières constitutives, leur facture, habituellement plus rudimentaire, leur dimension réduite, leur rendement assez faible, ne permettant pas leur utilisation pour un travail normal d'adulte, caractéristiques auxquelles répond le produit litigieux ; que celui-ci est de facture grossière et rudimentaire (matière plastique artificielle, absence de diaphragme et de viseur extérieur, nécessaires et indispensables pour le moins à la reproduction identique du sujet photographié), de dimension très réduite, d'apparente fragilité et de valeur unitaire très faible ; que, s'il permet effectivement de prendre des photographies de qualité, cependant très discutable, eu égard aux caractéristiques très modestes de l'appareil, cet article ne peut être considéré que comme " une reproduction d'article à usage des adultes ", selon les termes des notes explicatives du Conseil de coopération douanière, destiné à ne servir que comme un jouet faisant des photos et qui ne peut en aucun cas être assimilé à un véritable appareil photographique, même de qualité inférieure et de faible valeur (cf. arrêt p. 7 in fine et p. 8, § 1 à 5) ;
" alors, d'une part, qu'en matière douanière le procès-verbal fixe l'objet de l'inculpation et l'étendue des poursuites ; qu'en déclarant établi le délit de fausse déclaration d'espèces à l'importation sur le fondement d'un procès-verbal faisant référence à une décision de classement non versée aux débats et dont elle a retenu elle-même qu'elle était dépourvue de toute valeur juridique, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen ;
" alors, d'autre part, qu'au moment des faits une décision administrative du 13 avril 1970 classait les appareils photographiques de qualité inférieure et de faible valeur à la position 90-07 en précisant expressément que cette position s'appliquait " à tous les appareils dont les dimensions sont adaptées aussi bien à la taille des adultes qu'à celle des enfants dans la mesure où ils utilisent des pellicules de format normalement commercialisé par les professionnels de la photographie " ; qu'en outre la note de section de la position tarifaire 90-07 précisait que, relevaient de cette catégorie les appareils photographiques, qu'ils soient présentés avec ou sans leur partie optique (objectif, viseur) ; que la Cour, qui a retenu au contraire, en se fondant sur les textes douaniers qu'elle s'est abstenue d'analyser, que ces appareils constituaient en réalité des jouets devant être classés dans la position 97-03 B à raison des dimensions réduites des appareils litigieux, de leur facture grossière et rudimentaire, résultant notamment de l'absence de diaphragme et de viseur extérieur, a privé sa décision de toute base légale au regard des textes visés au moyen " ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 369-2 du Code des douanes, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué, qui a retenu que Maurice X... et Raymond Y... ne pouvaient se prévaloir de leur bonne foi, dont ils n'avaient pas rapporté la preuve, les a déclarés coupables d'avoir commis de fausses déclarations d'espèces à l'importation ;
" aux motifs que Raymond Y..., professionnel averti, aurait pu, en cas de doute, solliciter de l'Administration une demande de renseignements tarifaires relative au produit, à son dédouanement, mais qu'il s'en est abstenu ; que Maurice X... a été avisé, lors de la notification du procès-verbal de constat du 14 décembre 1987, de la possibilité qui lui était offerte de saisir la Commission de conciliation et d'expertise douanière dans un délai de 2 mois ; que, par 3 courriers de 1989, il a informé l'administration douanière qu'un recours devant la CCED était engagé et sollicitait de sa part de n'entamer aucune poursuite jusqu'à la décision de la Commission ; qu'il est toutefois apparu que la CCED n'est saisie d'aucun litige relatif à une importation de mini-appareils photographiques présentés sous la forme de porte-clefs, mais seulement d'une contestation tarifaire portant sur des appareils photographiques " micro 110 ", sans porte-clefs ; qu'ultérieurement Raymond Y... a envoyé au service des Douanes 5 documents qualifiés de classement européen, confirmant, selon ses dires, la position tarifaire qu'il avait déclarée sur les 3 déclarations de 1987 ; que l'analyse de ces documents laisse apparaître qu'ils ne concernaient pas le présent litige, mais celui déjà précité (cf. arrêt p. 9, § 6 à 11) ;
" alors que Maurice X... et Raymond Y... s'étant strictement conformés aux termes d'une décision administrative ainsi qu'aux dispositions d'un tarif douanier dont les termes ne laissaient planer aucune ambiguïté sur les classements des articles, dont l'importation était de surcroît accompagnée de factures des fournisseurs se référant à des appareils photos de type " micros 110 ", ce qui permettait toute vérification de la part des agents de l'administration des Douanes, la cour d'appel, qui, malgré ces éléments, a considéré que la preuve de la bonne foi n'était pas rapportée, en se fondant sur des circonstances postérieures aux importations litigieuses et, par suite, inopérantes, a privé sa décision de toute base légale, la bonne foi du contrevenant devant s'apprécier au moment de la réalisation de l'opération contestée " ;
Les moyens étant réunis ;
Vu lesdits articles, ensemble le règlement CEE n° 2658/ 87 ;
Attendu qu'il résulte des dispositions du règlement CEE n° 2658/ 8 du 23 juillet 1987, instituant la nomenclature combinée, que le classement des marchandises s'effectue d'après les termes des positions du tarif douanier commun, des notes de section ou de chapitre qui y sont mentionnées et subsidiairement d'après les règles générales d'interprétation fixées pour son application ;
Qu'en cas d'incertitude sur les critères de classement de la nomenclature le juge peut saisir la commission d'expertise douanière, visée aux articles 441 à 450 du Code des douanes ou la Cour de justice des communautés européennes, sur le fondement de l'article 177 du Traité, en vue de l'interprétation des dispositions concernées ;
Attendu que la société Sofrie, dont l'activité est la vente en gros de cadeaux d'entreprise, a importé de Taïwan, courant 1987, des appareils photographiques de petit format, montés en porte-clefs, qu'elle a déclarés, par l'intermédiaire de Raymond Y..., déclarant en douane, à la position tarifaire 90-07, comme " appareils photographiques " ;
Que l'Administration, estimant que ce genre d'appareil était plus un jouet qu'un appareil photographique et soumis, comme tel, à une licence d'importation, a cité le déclarant en douane, la société importatrice et Maurice X..., dirigeant de celle-ci, devant la juridiction correctionnelle, pour importation sans déclaration de marchandise prohibée ;
Que, sur l'appel formé par l'administration des Douanes contre la décision de relaxe prononcée en première instance, les juges du second degré ont infirmé le jugement entrepris et condamné les prévenus au paiement des droits compromis, soit la somme de 6 547 francs, et au paiement d'une amende et d'une somme tenant lieu de confiscation calculées sur la valeur de la marchandise, soit 2 fois la somme de 267 863 francs ;
Attendu que, pour déclarer l'infraction établie, les juges énoncent qu'eu égard à leur facture rudimentaire, à leurs dimensions réduites et à leur montage en porte-clefs, les appareils importés devaient, malgré leur aptitude à prendre des photos, être regardés comme des jouets et non comme de véritables appareils photographiques ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que, par application de la règle générale d'interprétation 3. b, fixée pour l'application de la nomenclature, un objet monté en porte-clefs doit être classé, en l'absence de position spécifique correspondant à un tel article, à la position correspondant à l'objet lui-même, et alors que les appareils photographiques en tous genres y compris ceux de fabrication rudimentaire, de qualité inférieure et de faible valeur utilisant une pellicule de format normalement commercialisé, doivent être déclarés sous la position tarifaire 90-07, comme appareils photographiques, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Que, dès lors, la cassation est encourue ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu à examiner le premier moyen de cassation proposé,
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 28 septembre 1994 ;
Et attendu qu'il ne reste rien à juger ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 94-85185
Date de la décision : 03/04/1997
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° COMMUNAUTES EUROPEENNES - Douanes - Importation sans déclaration - Marchandises - Fausses déclarations - Fausse déclaration d'espèce - Classement tarifaire des marchandises - Application de la nomenclature combinée de classement - Obligation pour le juge national.

1° DOUANES - Importation sans déclaration - Marchandises - Fausses déclarations - Fausse déclaration d'espèce - Communautés européennes - Classement tarifaire des marchandises - Application de la nomenclature combinée de classement - Obligation pour le juge national.

1° Le juge répressif, saisi d'une poursuite pour fausse déclaration d'espèce, doit, pour en apprécier le bien fondé, se référer au classement tarifaire des marchandises indiqué par la nomenclature combinée, commune à l'ensemble des Etats membres de la Communauté européenne, et aux règles générales d'interprétation qui en sont données(1). Ainsi, en l'absence, dans le tarif des douanes, de position spécifique correspondant à un ouvrage constitué par l'assemblage d'articles différents, un tel objet doit être classé, par application de la règle générale d'interprétation 3.b, en fonction de l'article qui lui donne son caractère essentiel. Ne justifie pas sa décision la cour d'appel qui, pour contester la position tarifaire déclarée par un importateur et déclarer cette personne coupable de fausse déclaration d'espèce, omet de se référer aux règles de classement fixées par la nomenclature combinée et se borne à déclarer que la marchandise importée un appareil photographique de petit format, apte à l'emploi, monté en porte-clefs ne peut être regardé, eu égard à sa présentation, comme un appareil photographique mais comme un jouet.

2° DOUANES - Procédure - Commission de conciliation et d'expertise douanière - Recours devant celle-ci - Importation sans déclaration - Marchandises - Fausse déclaration sur l'espèce - l'origine ou la valeur - Classement tarifaire des marchandises.

2° En cas d'incertitude sur le classement tarifaire d'une marchandise, la Commission de conciliation et d'expertise douanière visée au titre XIII du Code des douanes peut être saisie par les juridictions répressives dans les conditions prévues aux articles 447 et 450.2 du Code des douanes.


Références :

1° :
2° :
Code des douanes 447, 450-2
Règlement 2658/87/CEE du 23 juillet 1987

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 28 septembre 1994

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1996-10-24, Bulletin criminel 1996, n° 372, p. 1088 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 03 avr. 1997, pourvoi n°94-85185, Bull. crim. criminel 1997 N° 133 p. 448
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1997 N° 133 p. 448

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Culié, conseiller le plus ancien faisant fonction.
Avocat général : Avocat général : M. Lucas.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. de Mordant de Massiac.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Boré et Xavier, M. Bertrand.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1997:94.85185
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