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18/02/1998 | FRANCE | N°97-81336;97-81483

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 18 février 1998, 97-81336 et suivant


REJET des pourvois formés par :
- X... Tahar,
contre l'arrêt de la cour d'assises d'Ille-et-Vilaine, en date du 19 février 1997, qui, dans la procédure suivie contre lui pour vol avec arme et séquestration de personnes comme otages, a rejeté sa demande de mise en liberté, ainsi que contre l'arrêt de donné acte rendu par la Cour le même jour.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits ;
I. Sur le pourvoi formé contre l'arrêt rejetant la demande de mise en liberté :
Attendu que, renvoyé par arrêt du 23 février 1995

devant la cour d'assises pour vol avec arme et séquestration de personnes comme otages...

REJET des pourvois formés par :
- X... Tahar,
contre l'arrêt de la cour d'assises d'Ille-et-Vilaine, en date du 19 février 1997, qui, dans la procédure suivie contre lui pour vol avec arme et séquestration de personnes comme otages, a rejeté sa demande de mise en liberté, ainsi que contre l'arrêt de donné acte rendu par la Cour le même jour.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits ;
I. Sur le pourvoi formé contre l'arrêt rejetant la demande de mise en liberté :
Attendu que, renvoyé par arrêt du 23 février 1995 devant la cour d'assises pour vol avec arme et séquestration de personnes comme otages, Tahar X..., qui avait bénéficié, le 7 décembre 1995, d'une mise en liberté sous contrôle judiciaire, s'est constitué prisonnier le 4 juin 1996 en exécution de l'ordonnance de prise de corps ; que, le 5 juin 1996, la cour d'assises, constatant l'absence de deux de ses coaccusés, a renvoyé l'affaire à une session ultérieure et l'a remis en liberté, toujours sous contrôle judiciaire ;
Attendu que les 18, 19, 21 et 22 décembre 1996, l'affaire a de nouveau été évoquée devant la cour d'assises ; que, cependant, Tahar X..., qui avait comparu libre, s'est enfui alors que la cour d'assises revenait en audience après son délibéré ; que le 31 janvier 1997, il a été arrêté et écroué sur instruction du président de la chambre d'accusation en vertu de l'ordonnance de prise de corps ;
Attendu que, le 11 février 1997, Tahar X... a présenté une demande de mise en liberté, que la cour d'assises a rejetée par l'arrêt attaqué ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation : (sans intérêt) ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 141-1, 141-2, 148-1, 215, 215-1, 253 du Code de procédure pénale, 6-1 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de mise en liberté formée le 11 février 1997 par l'accusé, Tahar X... ;
" aux motifs, premièrement, que sur le moyen tiré de l'irrégularité de la composition actuelle de la cour d'assises d'Ille-et-Vilaine en raison de la présence de son président au sein de la cour d'assises ayant délibéré sur la culpabilité de cet accusé, les dispositions de l'article 253 du Code de procédure pénale sont de droit étroit ; que si elles interdisent à un magistrat ayant antérieurement connu du fond d'être membre de la cour d'assises statuant sur la culpabilité d'un accusé, celui-ci peut cependant siéger dans la formation n'ayant à connaître que du contentieux de la détention provisoire ; qu'en conséquence, cette cour d'assises dont les membres ont été régulièrement désignés par l'ordonnance de M. le premier président du 17 décembre 1996 est compétente, dans sa composition actuelle pour connaître de la demande de mise en liberté déposée par l'accusé, Tahar X... ;
" alors que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal indépendant et impartial ; qu'est contraire à ce principe la participation d'un magistrat qui a délibéré sur la culpabilité d'un accusé, à la composition de la cour d'assises appelée à statuer sur la demande de mise en liberté formée par cet accusé ;
" aux motifs, deuxièmement, que "sur l'existence d'un titre de détention : dans son arrêt de renvoi de l'accusé Tahar X... devant la cour d'assises d'Ille-et-Vilaine, la chambre d'accusation de la cour d'appel de Rennes a décerné, le 23 février 1995, une ordonnance de prise de corps à son encontre ; que le 7 décembre 1995, elle a fait droit à sa demande de mise en liberté, en le plaçant sous contrôle judiciaire (...) ; que cette décision n'a pas rendu caduque l'ordonnance de prise de corps précédemment prise ; que, par ailleurs, le 4 juin 1996, l'accusé Tahar X... (...) s'est constitué prisonnier (...) la veille de l'audience de la cour d'assises ; que par arrêt du 5 juin 1996 (...) l'affaire a été renvoyée à une session ultérieure et l'accusé Tahar X... mis en liberté toujours sous contrôle judiciaire ; qu'il a respecté ces obligations jusqu'à sa comparution devant la cour d'assises (...) le 18 décembre 1996, date fixée pour la nouvelle évocation de cette affaire au fond ; que, cette fois, l'accusé (...) n'a pas été réincarcéré la veille de l'audience (...) ; qu'en l'espèce, si l'ordonnance de prise de corps n'a pas été ramenée à exécution, une nouvelle fois, le 17 décembre 1996 (...) elle n'en existait pas moins, seule son exécution ayant été suspendue" ;
" alors que quand la mise en liberté a été ordonnée par la cour d'assises, l'ordonnance de prise de corps qui a été mise à exécution lorsque l'accusé s'est constitué prisonnier ne peut plus produire d'effet, de sorte qu'en l'espèce l'ordonnance de prise de corps avait été exécutée le 4 juin 1996 lorsque Tahar X... s'était constitué prisonnier, puis avait été définitivement anéantie par l'arrêt de la cour d'assises du 5 juin 1996 ordonnant sa mise en liberté ;
" aux motifs, troisièmement, que "sur la violation des obligations du contrôle judiciaire : (...) en prenant la fuite, le 22 décembre 1996, avant que l'arrêt sur le fond ne soit rendu, Tahar X... a (...) méconnu l'obligation de présence constante qui lui incombait" ; "alors que l'accusé qui comparaît libre, n'a pas l'obligation d'être présent lors du prononcé de l'arrêt de la cour d'assises " ;
Attendu que, la cour d'assises d'Ille-et-Vilaine étant la juridiction de jugement saisie de l'affaire lorsqu'elle a été appelée à statuer sur une demande de mise en liberté de l'accusé, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 148-1 du Code de procédure pénale, les magistrats qui la composaient en cette circonstance pouvaient, sans violation des dispositions légales et conventionnelles visées au moyen, statuer sur cette demande ;
Attendu que, par ailleurs, il résulte des dispositions de l'article 141-2 du Code de procédure pénale que, lorsque l'accusé mis sous contrôle judiciaire par la juridiction de jugement se soustrait volontairement aux obligations du contrôle judiciaire, ce qui a été le cas en l'espèce, l'ordonnance de prise de corps est exécutée sur ordre du président de la cour d'assises ou, dans l'intervalle des sessions, du président de la chambre d'accusation ;
Attendu qu'enfin tout accusé a l'obligation d'être présent lors du prononcé de l'arrêt pénal, dès lors qu'aux termes de l'article 366 du Code de procédure pénale, après la délibération de la Cour et du jury, le président fait comparaître l'accusé, donne lecture des réponses faites aux questions et prononce l'arrêt portant condamnation, absolution ou acquittement ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
II. Sur le pourvoi formé contre l'arrêt de donné acte rendu le même jour par la Cour ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 148-1, 240 et suivants, 307, 802 du Code de procédure pénale, 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
" en ce que l'arrêt attaqué a décerné acte au conseil de Tahar X... "de ce que M. Le Corre désigné comme président de la cour d'assises d'Ille-et-Vilaine pour la présente session, a siégé le 18 février 1997, en qualité d'assesseur à l'audience de la chambre correctionnelle de la cour d'appel de Rennes" ;
" alors que le conseil de Tahar X... avait demandé à ce qu'il lui soit décerné acte de ce que le président de la cour d'assises avait siégé le 18 février 1997 lors de l'audience de la chambre correctionnelle, bien que la clôture de la session d'assises n'eût pas été prononcée ; qu'en omettant de lui décerner acte de ce que la clôture de la session d'assises n'avait pas été prononcée lorsque le président de la cour d'assises avait siégé à l'audience correctionnelle, la Cour, qui avait pourtant reconnu que tel était bien le cas, a méconnu l'étendue de ses pouvoirs au regard des textes susvisés, et violé l'article 6-1 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales " ;
Attendu que, contrairement à ce qui est allégué, la Cour, tout en délivrant acte à la défense de ce que le président de la cour d'assises avait siégé le 18 février 1997 à l'audience de la chambre correctionnelle, a constaté que, le 14 février 1997, au terme de la dernière affaire sur le fond prévue au rôle de la session du premier trimestre 1997 de la cour d'assises d'Ille-et-Vilaine, il avait indiqué que la session n'était pas close ; qu'elle a ajouté que si le principe de la continuité des débats interdit à la cour d'assises de connaître d'une autre cause au fond pendant la suspension des débats évoqués devant elle, rien n'interdisait aux magistrats qui la composent de vaquer à leurs autres obligations professionnelles dans l'intervalle entre l'évocation de deux autres affaires distinctes ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, l'arrêt attaqué n'a méconnu aucune des dispositions légales et conventionnelles invoquées au moyen ;
Qu'il n'a été porté atteinte, ni au principe du procès équitable ni aux droits de la défense ;
Qu'en effet, la cour d'assises a le pouvoir de délivrer l'acte requis, en l'assortissant de constatations et de commentaires de nature à en modifier la portée ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que les arrêts sont réguliers, en la forme, et le premier, en outre, aux regards des articles 144 et suivants du Code de procédure pénale ;
REJETTE les pourvois.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 97-81336;97-81483
Date de la décision : 18/02/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° COUR D'ASSISES - Composition - Président - Incompatibilités - Demande de mise en liberté suite à une ordonnance de prise de corps (non).

1° Les dispositions de l'article 253 du Code de procédure pénale et celles de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme n'interdisent pas à un magistrat qui a fait partie de la cour d'assises ayant prononcé l'arrêt de condamnation, de siéger à nouveau pour statuer sur une demande de mise en liberté dont la cour d'assises a été saisie dans les conditions prévues par l'article 148-1, alinéa 2, du Code de procédure pénale(1).

2° CONTROLE JUDICIAIRE - Obligations - Obligations non respectées - Ordonnance de prise de corps - Président de la cour d'assises ou Président de la chambre d'accusation.

2° Il résulte des dispositions de l'article 141-2 du Code de procédure pénale que, lorsqu'un accusé, placé sous contrôle judiciaire par la cour d'assises, se soustrait volontairement à ses obligations, l'ordonnance de prise de corps est exécutée sur ordre du président de la cour d'assises ou, dans l'intervalle des sessions, du président de la chambre d'accusation.

3° COUR D'ASSISES - Arrêts - Prononcé de l'arrêt - Présence de l'accusé comparant - Obligation.

3° Il résulte des dispositions de l'article 366 du Code de procédure pénale que l'accusé, qui comparaît libre, est tenu d'être présent lors du prononcé de l'arrêt pénal.

4° COUR D'ASSISES - Arrêts - Arrêt incident - Arrêt statuant sur une demande de donné acte - Adjonction de constatations propres - Incident contentieux - Compétence de la cour.

4° Est rendu conformément aux dispositions de l'article 316 du Code de procédure pénale l'arrêt contentieux par lequel la Cour fait droit à une demande de donné acte présentée par la défense en y ajoutant des constatations ou des commentaires de nature à en modifier ou à en limiter la portée(2).


Références :

1° :
3° :
4° :
Code de procédure pénale 141-2
Code de procédure pénale 141-2, 366, 253 2° :
Code de procédure pénale 316
Code de procédure pénale 366

Décision attaquée : Cour d'assises de l'Ille-et-Vilaine, 19 février 1997

CONFER : (1°). (1) A rapprocher : Chambre criminelle, 1987-02-04, Bulletin criminel 1987, n° 59, p. 152 (rejet), et les arrêts cités ;

Chambre criminelle, 1991-11-20, Bulletin criminel 1991, n° 421, p. 1076 (rejet). CONFER : (4°). (2) Cf. Chambre criminelle, 1985-07-02, Bulletin criminel 1985, n° 253, p. 664 (rejet), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 18 fév. 1998, pourvoi n°97-81336;97-81483, Bull. crim. criminel 1998 N° 67 p. 179
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1998 N° 67 p. 179

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Guilloux, conseiller le plus ancien faisant fonction.
Avocat général : Avocat général : M. Cotte.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Poisot.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Pascal Tiffreau.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:97.81336
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