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27/10/1998 | FRANCE | N°95-83842;96-84577

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 27 octobre 1998, 95-83842 et suivant


CASSATION sur les pourvois formés par :
- X...,
contre les arrêts de la cour d'appel de Bordeaux, 3e chambre, qui, dans la procédure suivie contre lui pour complicité de diffamation envers un fonctionnaire public, ont : le premier, en date du 21 juin 1995, annulé le jugement disant n'y avoir lieu à l'audition de témoins, déchu le prévenu de son offre de preuve de la vérité des faits diffamatoires, évoqué et renvoyé la cause à une audience ultérieure ; le second, en date du 27 juin 1996, rejeté l'exception de nullité de la citation, déclaré l'action publique éteinte

par l'amnistie, et prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu l'article...

CASSATION sur les pourvois formés par :
- X...,
contre les arrêts de la cour d'appel de Bordeaux, 3e chambre, qui, dans la procédure suivie contre lui pour complicité de diffamation envers un fonctionnaire public, ont : le premier, en date du 21 juin 1995, annulé le jugement disant n'y avoir lieu à l'audition de témoins, déchu le prévenu de son offre de preuve de la vérité des faits diffamatoires, évoqué et renvoyé la cause à une audience ultérieure ; le second, en date du 27 juin 1996, rejeté l'exception de nullité de la citation, déclaré l'action publique éteinte par l'amnistie, et prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu l'article 21 de la loi du 3 août 1995 portant amnistie ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 55 de la loi du 29 juillet 1881, 591 et 592 du Code de procédure pénale, ensemble violation des droits de la défense :
" en ce que l'arrêt attaqué du 21 juin 1995 a déclaré X... déchu de son droit à rapporter la preuve des faits diffamatoires ;
" aux motifs qu'il appartenait aux premiers juges, avant tout, d'observer que l'exploit délivré au visa de l'article 55 de la loi du 29 juillet 1981, à la requête du prévenu, se bornait à reproduire in extenso les passages, retenus comme diffamatoires par les parties civiles, de l'interview diffusée lors d'une émission intitulée "Questions de régions" et de relever, par suite, qu'en procédant ainsi, le prévenu s'était abstenu de spécifier les faits articulés et qualifiés dont il se proposait de faire la preuve, obligation qui lui incombait, alors même qu'il entendait faire la preuve de tous les faits visés dans les citations ; qu'à cet égard, X... s'était limité à indiquer en page 6 de l'acte de signification "qu'il entend prouver la véracité des faits reprochés comme diffamatoires et notamment les allégations contenues dans les passages incriminés" ; que ce n'était qu'aux termes de ses conclusions d'appelant qu'étaient ultérieurement spécifiés, en page 19, les faits dont il était proposé de prouver la vérité ; qu'ainsi, le prévenu avait méconnu sur ce point les dispositions de l'article 55 de la loi du 29 juillet 1981, dont les formalités substantielles qu'il édictait devaient être observées à peine de déchéance du droit de faire la preuve (arrêt p. 5 in fine et p. 6) ;
" alors, d'une part, qu'en s'abstenant de préciser tant quels étaient les faits articulés et spécifiés dans la citation du 7 avril 1994 que ceux articulés et qualifiés dans l'offre de preuve du 15 avril 1994, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle de la décision ;
" alors, d'autre part, que l'article 53 de la loi du 29 juillet 1881 impose à la partie civile de préciser et de qualifier, dans la citation, le fait incriminé ; que l'article 55 de la même loi impose au prévenu de signifier, au ministère public ou au plaignant, "les faits articulés et qualifiés dans la citation desquels il entend prouver la vérité" ; que, dans la citation du 7 avril 1994, Y... reprochait à Me X... de lui avoir imputé "d'être l'auteur d'une erreur très opportune par laquelle il aurait réussi à faire annuler toute sa procédure" procédure qu'il aurait "recommencée", "en oubliant" un "rapport d'expertise" qui serait de nature à innocenter Z... (citation p. 2, paragraphe 3) ; que, dans son offre de preuve, Me X..., qui reprenait très exactement ces faits (offre de preuve p. 4), offrait de prouver la vérité du fait qu'il imputait à juste titre à Y... "d'être l'auteur d'une erreur très opportune par laquelle il aurait ainsi réussi à faire annuler toute sa procédure, procédure qu'il aurait "recommencée" en "oubliant" un "rapport d'expertise" qui serait de nature à innocenter Z... " ; qu'ainsi, les termes de l'offre de preuve qui reprenaient rigoureusement et très exactement les faits articulés et qualifiés dans la citation de la partie civile satisfaisaient pleinement aux prescriptions de l'article 55 de la loi du 29 juillet 1881 et que c'est en violation de ce texte que la cour d'appel a déclaré Me X... déchu de son droit à rapporter la preuve de la vérité des faits diffamatoires " ;
Vu l'article 55 de la loi du 29 juillet 1881 ;
Attendu que, si, selon ce texte, le prévenu qui veut être admis à prouver la vérité des faits diffamatoires doit, à peine de déchéance, spécifier dans sa notification les faits articulés et qualifiés dans la citation desquels il entend faire la preuve, il n'en est pas ainsi lorsque ce dernier acte n'incrimine qu'un seul fait ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que Y..., magistrat, et le Syndicat de la magistrature ont fait citer directement devant la juridiction correctionnelle X..., pour complicité de diffamation publique envers un fonctionnaire public, en visant les articles 59 et 60 anciens, 121-6, 121-7 du Code pénal, 29, alinéa 1, 30 et 31, alinéa 1, de la loi du 29 juillet 1881 ; que les citations ont articulé les propos tenus par X..., dans une émission diffusée par la société France 3, à propos de l'information suivie contre Z... ; en ce qui concerne la procédure, je redirai tout d'abord que Z... n'a jamais rien fait pour la retarder ; qu'il y a 3 ans, il a fait une conférence de presse avec moi, lorsque je suis entré dans le dossier, pour demander à être jugé : un non-lieu ou les assises " ; deuxièmement, cette affaire a été paralysée par une erreur très opportune de Y..., président du Syndicat de la magistrature, qui a réussi à faire annuler toute sa procédure, qu'il a recommencée, en oubliant seulement le rapport d'expertise qui, à partir des archives, l'innocentait " ; et quant aux parties civiles, à chaque fois que l'affaire se termine, elles reprennent " ;
Attendu que X... a fait notifier aux parties civiles et au ministère public les pièces par lesquelles il entendait faire la preuve des faits reprochés comme diffamatoires et notamment des allégations contenues dans les passages incriminés ; que le Syndicat de la magistrature a fait notifier au prévenu et au ministère public une offre de preuve contraire ;
Attendu que, pour déclarer d'office le prévenu déchu de son offre de preuve, et déclarer sans objet sa demande de sursis à statuer fondée sur l'empêchement de déposer sous serment d'un des témoins dénoncés, les juges se prononcent par les motifs reproduits au moyen ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors que, aucun doute ne pouvant exister dans l'esprit des plaignants sur la preuve contraire à administrer, la notification faite par le prévenu satisfaisait aux exigences de l'article 55 susvisé, la cour d'appel n'a pas donné une base légale à sa décision ;
Que la cassation est encourue de ce chef, et qu'elle doit entraîner par voie de conséquence, celle de l'arrêt rendu le 27 juin 1996 ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens de cassation proposés ;
CASSE ET ANNULE, en toutes leurs dispositions, les arrêts de la cour d'appel de Bordeaux, en date du 21 juin 1995 et du 27 juin 1996, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Toulouse.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 95-83842;96-84577
Date de la décision : 27/10/1998
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

PRESSE - Diffamation - Preuve de la vérité des faits diffamatoires - Moyens - Signification - Mentions nécessaires - Limites.

Si, selon l'article 55 de la loi du 29 juillet 1881, le prévenu qui veut être admis à prouver la vérité des faits diffamatoires doit, à peine de déchéance, spécifier dans sa notification les faits articulés et qualifiés dans la citation desquels il entend faire la preuve, il n'en est pas ainsi lorsque cet acte n'incrimine qu'un seul fait.


Références :

Loi du 29 juillet 1881 art. 55

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 1995-06-21, 1996-06-27


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 27 oct. 1998, pourvoi n°95-83842;96-84577, Bull. crim. criminel 1998 N° 279 p. 803
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1998 N° 279 p. 803

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gomez
Avocat général : Avocat général : M. de Gouttes.
Avocat(s) : Avocats : La SCP Guy Lesourd, la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:95.83842
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