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26/01/2000 | FRANCE | N°99-87180

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 26 janvier 2000, 99-87180


REJET des pourvois formés par :
- X..., Y...,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Lyon, en date du 26 octobre 1999, qui, dans l'information suivie contre eux du chef de recel d'abus de biens sociaux, a rejeté la requête en annulation présentée par le premier et n'a fait droit que partiellement à celle présentée par le second.
LA COUR,
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 6 décembre 1999, joignant les pourvois en raison de la connexité et prescrivant leur examen immédiat ;
Vu les mémoires produits, en demande

et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation présenté par X... et pris ...

REJET des pourvois formés par :
- X..., Y...,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Lyon, en date du 26 octobre 1999, qui, dans l'information suivie contre eux du chef de recel d'abus de biens sociaux, a rejeté la requête en annulation présentée par le premier et n'a fait droit que partiellement à celle présentée par le second.
LA COUR,
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 6 décembre 1999, joignant les pourvois en raison de la connexité et prescrivant leur examen immédiat ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation présenté par X... et pris de la violation des articles 105 et 152 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la requête en annulation d'actes formée par X... ;
" aux motifs que, "le conseil de X... sollicite en second lieu l'annulation des interrogatoires de son client effectués lors de sa garde à vue les 18 et 19 novembre 1997 (lire 1998) en violation des dispositions de l'article 105 du Code de procédure pénale, ainsi que l'annulation de toute la procédure subséquente en ce qu'elle concerne le requérant ; qu'en ce sens il fait valoir que X... a été mis en garde à vue et entendu par les policiers au vu des accusations portées par Z... à son encontre et que ces accusations constituaient par elles-mêmes des indices tellement graves et concordants de participation aux faits que le juge d'instruction n'en a pas d'ailleurs utilisé d'autres pour mettre l'intéressé en examen, ses auditions en garde à vue n'ayant apporté aucun nouvel élément à charge ; qu'en application des dispositions de l'article 105 du Code de procédure pénale, ne peuvent effectivement être entendues en qualité de témoin, notamment dans le cadre de l'exécution d'une commission rogatoire, les personnes contre lesquelles il existe des indices graves et concordants d'avoir participé aux faits dont le juge d'instruction est saisi ; qu'il résulte des pièces du dossier que X... a été essentiellement mis en cause lors de l'audition du témoin Z..., ancien employé du groupe Investor, qui dénonçait la perception par l'intéressé de commissions indues (D 152) ; que ces accusations ne constituaient toutefois pas à elles seules des indices suffisamment graves et concordants de participation de X... aux faits de recel d'abus de biens sociaux dont le juge d'instruction était saisi pour faire obstacle à des auditions en qualité de témoin de la personne ainsi soupçonnée, dont ce magistrat pouvait légitimement souhaiter faire recueillir ainsi les explications sur ces mises en cause avant de décider d'une éventuelle mise en examen de l'intéressé ; qu'il est clair que ce n'est qu'au vu de l'ensemble des réticences, des dénégations et des explications souvent confuses fournies par X... pendant sa garde à vue (D 154, 159, 160 et 161) que le magistrat instructeur a décidé de procéder à sa mise en examen ; qu'ainsi les auditions litigieuses s'avèrent parfaitement régulières au regard des dispositions de l'article 105 précité, si bien que la demande d'annulation de ces pièces doit être rejetée" ;
" 1o alors qu'il résulte des motifs précités de l'arrêt que, lors de ses auditions, X... dont la chambre d'accusation relève les "réticences", les "dénégations" et les "explications souvent confuses", n'avait fourni aucun éclaircissement complémentaire sur les accusations portées à son encontre par Z..., de sorte que ces accusations, sur le seul fondement desquelles il avait été et placé en garde à vue et mis en examen, constituaient par là même des indices graves et concordants de participation aux faits dénoncés par ces mêmes accusations ; qu'en déclarant le contraire, la chambre d'accusation a violé les textes susvisés ;
" 2o alors que pour rejeter la requête en annulation du mandat d'arrêt décerné à l'encontre de Y... le 23 juin 1999, la chambre d'accusation a relevé qu'à cette dernière date, il existait à l'encontre dudit requérant, qui avait été mis en examen à raison des mêmes faits de recels d'abus de biens sociaux que X... et au vu des mêmes accusations émanées de Y..., des indices graves et concordants d'avoir participé auxdits faits ; qu'en déclarant dans le même temps, sans à tout le moins s'en expliquer plus avant, que les accusations de Y... ne constituaient pas à l'encontre de X... des indices graves et concordants de participation auxdits faits de recels d'abus de biens sociaux, la chambre d'accusation n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés " ;
Attendu que, pour écarter l'exception de nullité prise de la violation de l'article 105 du Code de procédure pénale, la chambre d'accusation retient que la mise en cause de X... provenait essentiellement des accusations, relatives à la perception de commissions indues, portées contre lui par un témoin ; qu'elle ajoute que ces déclarations ne constituaient pas, à elles seules, des indices suffisamment graves et concordants de participation de X... à des faits de recel d'abus de biens sociaux qui auraient fait obstacle à des auditions en qualité de témoin de la personne ainsi soupçonnée ; qu'elle précise que ce n'est qu'au vu de l'ensemble des réticences, dénégations et explications souvent confuses fournies par l'intéressé pendant sa garde à vue, que le magistrat instructeur a décidé de procéder à sa mise en examen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors que le juge d'instruction a la faculté de ne mettre en examen une personne déterminée qu'après s'être éclairé, notamment en faisant procéder à son audition en qualité de témoin, sur sa participation aux agissements incriminés dans des conditions pouvant engager sa responsabilité pénale, la chambre d'accusation, par des motifs exempts d'insuffisance comme de contradiction, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le moyen unique de cassation proposé par Y..., pris de la violation de l'article 131 du Code de procédure pénale, des articles 80-1, 485 et 593 du même Code :
" en ce que la décision attaquée a refusé d'annuler le mandat d'arrêt délivré à l'encontre de Y..., à la date du 23 juin 1999 ;
" aux motifs que, si Y... soutient que cette date serait la conséquence de son refus de déférer à la convocation précitée, il résulte des pièces du dossier que ce mandat d'arrêt a été délivré non seulement au vu de la non-comparution de l'intéressé devant le juge d'instruction, mais aussi et surtout au vu de l'ensemble des auditions mettant en cause Y... du fait que les enquêteurs n'avaient pas été en mesure de l'entendre et surtout du fait que l'intéressé est de nationalité helvétique et réside à Genève ;
" alors, d'une part, que le mandat d'arrêt ne peut être délivré que contre une personne mise en examen ou susceptible de l'être ; que Y... ayant été mis en examen et la mise en examen ayant été annulée, il en résulte nécessairement que le mandat d'arrêt postérieur à cette mise en examen, était une conséquence de celle-ci et devait être annulé comme une conséquence de l'annulation de la mise en examen prononcée ;
" alors, d'autre part, que si un mandat d'arrêt peut être délivré contre une personne susceptible d'être mise en examen et que la personne contre laquelle le mandat d'arrêt est délivré n'a pas encore été mise en examen, celle-ci résulte de la délivrance du mandat d'arrêt, mais encore faut-il que la mise en examen ait été requise pour des faits déterminés ; que lorsqu'une personne a été mise en examen pour des faits déterminés, elle ne peut faire l'objet d'une nouvelle mise en examen que pour d'autres faits, et dès lors, à condition qu'un réquisitoire ait été délivré aux fins d'extension à d'autres faits de la mise en examen ; qu'en l'espèce actuelle, il résulte du dossier que le ministère public n'a pas requis la délivrance d'une mise en examen pour d'autres faits que ceux qui avaient fait l'objet de la mise en examen du 19 mai 1999, annulée par l'arrêt de la chambre d'accusation du 26 octobre 1999 ; que le juge d'instruction ne pouvant se saisir d'autres faits que ceux sur lesquels il avait été requis d'ouvrir une information, le mandat d'arrêt délivré sur réquisitions du ministère public prises sur ordonnance de soit-communiqué n'ont pu valoir mise en examen sur d'autres faits que ceux sur lesquels portait la mise en examen précédente ; que, dès lors, l'annulation de la mise en examen devait nécessairement entraîner, par voie de conséquence, l'annulation du mandat d'arrêt décerné le 23 juin 1999 ;
" alors, également, que, dès lors qu'il résulte de l'examen du dossier que c'est à la suite d'une ordonnance de soit-communiqué ordonnant la transmission du dossier au procureur de la République pour "être par lui requis ce qu'il appartiendra sur l'opportunité de décerner un mandat d'arrêt", sans viser aucun fait particulier, que le procureur de la République de Lyon a requis la délivrance d'un mandat d'arrêt à l'encontre de Y..., sans viser le moindre fait nouveau, que c'est par une dénaturation par addition que la cour d'appel a énoncé que le mandat d'arrêt avait été délivré non seulement au vu de la non-comparution de l'intéressé devant le juge d'instruction, mais aussi et surtout au vu de l'ensemble des auditions mettant en cause Y... du fait que les enquêteurs n'avaient pas été en mesure de l'entendre et surtout du fait que l'intéressé est de nationalité helvétique et réside à Genève ;
" alors enfin que la constatation qu'une personne ne réside pas sur le territoire de la République française (ou est en fuite) est une condition nécessaire pour qu'un mandat d'arrêt puisse être délivré ; que le fait qu'une personne réside à l'étranger ne permet pas de maintenir un mandat délivré contre une personne mise en examen, lorsque la mise en examen a disparu, alors qu'aucune mise en examen pour d'autres faits n'a été requise " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'après avoir annulé, en raison de l'inobservation des formes prévues par la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959, l'avis de mise en examen et la convocation adressés, respectivement les 19 mai et 8 juin 1999, par le juge d'instruction à Y..., résidant en Suisse, la chambre d'accusation a refusé d'étendre l'annulation au mandat d'arrêt décerné le 23 juin 1999 ; que les juges, après examen des éléments du dossier, retiennent que ce mandat a été délivré, non seulement au vu de la non-comparution de l'intéressé devant le magistrat instructeur, mais aussi et surtout, au vu de l'ensemble des auditions le mettant en cause, de l'impossibilité pour les enquêteurs de l'entendre et, enfin, en raison de sa nationalité helvétique et de sa résidence à Genève ; qu'ils en déduisent qu'eu égard aux charges graves et concordantes de participation à des faits de recel d'abus de biens sociaux pesant sur Y..., le magistrat instructeur était fondé à décerner le mandat litigieux à l'encontre de cette personne résidant hors du territoire de la République ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, et dès lors que l'avis de mise en examen annulé n'était pas le préalable nécessaire à la délivrance, par le juge d'instruction régulièrement saisi, du mandat d'arrêt qui a respecté les conditions fixées par l'article 131 du Code de procédure pénale, la chambre d'accusation a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 99-87180
Date de la décision : 26/01/2000
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° INSTRUCTION - Commission rogatoire - Exécution - Audition de témoin - Audition en qualité de témoin d'un individu soupçonné - Régularité - Condition.

1° DROITS DE LA DEFENSE - Instruction - Commission rogatoire - Exécution - Témoin - Audition - Audition dans le dessein de faire échec aux droits de la défense.

1° Justifie sa décision la chambre d'accusation qui, pour écarter un grief tiré de la violation de l'article 105 du Code de procédure pénale, retient que le juge d'instruction était fondé à faire vérifier par l'audition d'une personne la vraisemblance des indices la concernant, sa mise en cause provenant essentiellement des accusations portées par un autre témoin. En effet, le magistrat instructeur a la faculté de ne mettre en examen une personne déterminée qu'après s'être éclairé, notamment en faisant procéder à son audition en qualité de témoin, sur sa participation aux agissements incriminés dans des conditions pouvant engager sa responsabilité pénale(1).

2° INSTRUCTION - Mandats - Mandat d'arrêt - Mandat d'arrêt postérieur à un avis de mise en examen annulé - Régularité.

2° Le mandat d'arrêt, postérieur à un avis de mis en examen annulé, qui n'en est pas le préalable nécessaire, est régulier dès lors qu'il a été délivré par un juge d'instruction régulièrement saisi et qu'il respecte les conditions fixées par l'article 131 du Code du procédure pénale(2).


Références :

1° :
2° :
Code de procédure pénale 105
Code de procédure pénale 131

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon (chambre d'accusation), 26 octobre 1999

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1999-03-23, Bulletin criminel 1999, n° 51 (3°), p. 119 (rejet). CONFER : (2°). (2) Cf. Chambre criminelle, 1985-01-14, Bulletin criminel 1985, n° 22, p. 54 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 26 jan. 2000, pourvoi n°99-87180, Bull. crim. criminel 2000 N° 44 p. 121
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2000 N° 44 p. 121

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gomez
Avocat général : Avocat général : M. Lucas.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Caron.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Ryziger et Bouzidi, la SCP Waquet, Farge et Hazan, M. Thouin-Palat.

Origine de la décision
Date de l'import : 31/08/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2000:99.87180
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