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07/10/2003 | FRANCE | N°02-88383

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 07 octobre 2003, 02-88383


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le sept octobre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller BLONDET, les observations de Me Le PRADO et de Me BLANC, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DI GUARDIA ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- LA MUTUELLE ASSURANCE ARTISANALE DE FRANCE (MAAF), partie intervenante,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'ORLEANS, chambre correctionnelle, en date du 9 décembre

2002, qui, dans la procédure suivie contre Emmanuel X... du chef de violences avec a...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le sept octobre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller BLONDET, les observations de Me Le PRADO et de Me BLANC, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DI GUARDIA ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- LA MUTUELLE ASSURANCE ARTISANALE DE FRANCE (MAAF), partie intervenante,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'ORLEANS, chambre correctionnelle, en date du 9 décembre 2002, qui, dans la procédure suivie contre Emmanuel X... du chef de violences avec arme, a déclaré irrecevable son appel du jugement ayant statué sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme, 2 du Protocole additionnel n 7 à ladite Convention, 582 et suivants du nouveau Code de procédure civile, 222-12 du Code pénal, 388-1, 388-3, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevable l'appel interjeté par la MAAF, à l'encontre du jugement déféré l'ayant condamnée, in solidum avec le prévenu, à indemniser la victime ;

"aux motifs que la voie de l'appel est réservée aux parties à l'instance, que la société MAAF Assurances n'a pas été appelée en la cause, qu'elle n'y est pas non plus volontairement intervenue, comme elle le reconnaît elle-même, que le jugement querellé ne lui a d'ailleurs pas été signifié, qu'en conséquence, son appel est irrecevable, que seule la voie de la tierce opposition semble lui être ouverte en l'espèce ;

"alors, d'une part, qu'en vertu de l'article 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal ; et que le droit pour tout justiciable de saisir la juridiction nationale doit être effectif ; et qu'en vertu de l'article 2 du Protocole additionnel n° 7, toute personne a le droit de faire examiner par une juridiction supérieure la condamnation prononcée à son encontre ; qu'ainsi, en déclarant irrecevable l'appel interjeté par la MAAF, contre le jugement l'ayant expressément condamnée à verser, en tant qu'assureur du prévenu des indemnités à la partie civile, au prétexte qu'elle n'avait pas été partie à l'instance devant les premiers juges, bien que cette décision lui faisait nécessairement grief, la cour d'appel a méconnu la portée des principes susvisés ;

"alors, d'autre part, que la tierce opposition ouverte à une personne qui n'est pas partie à l'instance contre une décision qui lui préjudicie n'est pas recevable en matière pénale ; que, dès lors, en déclarant irrecevable l'appel interjeté par la MAAF, motif pris de ce que n'étant pas partie à l'instance pénale, la voie de la tierce opposition constituait le seul recours dont pouvait bénéficier la demanderesse, la cour d'appel a privé la demanderesse du droit à un recours effectif, en violation des textes susvisés ;

"alors, de troisième part, que, et en tout état de cause, l'intervention ou la mise en cause de l'assureur devant la juridiction répressive est exclue en cas de coups ou violences volontaires, les juges devant assurer d'office le respect de cette règle d'ordre public ; que, dès lors, en confirmant la condamnation de la MAAF à garantir les condamnations civiles prononcées contre le prévenu, tout en relevant que cet assureur ne pouvait légalement être mis en cause devant la juridiction répressive, s'agissant d'une poursuite pour violences volontaires, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations" ;

Vu l'article préliminaire du Code de procédure pénale et l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

Attendu que, selon ces textes, toute personne ayant été condamnée par une juridiction répressive de première instance, sans avoir été partie au procès, a le droit de faire examiner sa condamnation par une juridiction supérieure ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, dans la poursuite exercée contre Emmanuel X..., définitivement condamné pour violences avec arme, en l'occurrence son automobile, le tribunal correctionnel de Tours a condamné avec le prévenu la Mutuelle Assurance Artisanale de France ( MAAF ), en l'absence d'intervention volontaire ou d'appel en cause de celle-ci, à payer des dommages-intérêts à la partie civile ;

Attendu que, pour déclarer irrecevable l'appel de la MAAF , la juridiction du second degré prononce par les motifs reproduits au moyen ;

Mais attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et le principe énoncé ci-dessus ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

Et attendu que, selon l'article 388-1 du Code de procédure pénale, les assureurs appelés à garantir le dommage ne sont admis à intervenir et ne peuvent être mis en cause devant la juridiction répressive que lorsque des poursuites pénales sont exercées pour homicide ou blessures involontaires ;

Attendu que la Cour de Cassation est en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 131-5, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire ;

Par ces motifs,

CASSE et ANNULE l'arrêt précité de la cour d'appel d'Orléans, en date du 9 décembre 2002, en ses seules dispositions relatives à la MAAF , toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

DECLARE RECEVABLE l'appel de la MAAF ;

ANNULE le jugement du tribunal correctionnel de Tours, en date du 9 novembre 2001, en ce qu'il a condamné la MAAF ;

DIT IRRECEVABLE la mise en cause de la MAAF ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Orléans et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, M. Blondet conseiller rapporteur, MM. Farge, Palisse, Le Corroller, Mme Nocquet, M. Castagnède conseillers de la chambre, Mmes Agostini, Beaudonnet, Gailly, Salmeron conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Di Guardia ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 02-88383
Date de la décision : 07/10/2003
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° APPEL CORRECTIONNEL OU DE POLICE - Appel de l'assureur - Assureur du prévenu - Assureur condamné sans avoir demandé à intervenir ou avoir été appelé en cause - Recevabilité de l'appel.

1° Il résulte de l'article préliminaire du Code de procédure pénale et de l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme que toute personne ayant été condamnée par une juridiction répressive de première instance sans avoir été partie au procès a le droit d'interjeter appel devant la juridiction supérieure. Est recevable, en application de ce principe, l'appel de l'assureur du prévenu qui, n'ayant ni demandé à intervenir, ni été appelé en cause, a été condamné avec le prévenu à payer des dommages-intérêts à la partie civile.

2° ASSURANCE - Assureur appelé en garantie - Juridictions pénales - Intervention ou mise en cause - Recevabilité - Poursuites pour homicide ou blessures involontaires.

2° Selon l'article 388-1 du Code de procédure pénale, les assureurs appelés à garantir le dommage ne sont admis à intervenir et ne peuvent être mis en cause devant la juridiction répressive que lorsque des poursuites pénales sont exercées pour homicide et blessures involontaires (1).


Références :

1° :
2° :
Code de procédure pénale 388-1
Code de procédure pénale, article préliminaire Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 6.1

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans (chambre correctionnelle), 09 décembre 2002

CONFER : (2°). (1) A comparer: Chambre criminelle, 1992-03-26, Bulletin criminel 1992, n° 128, p. 338 (rejet), et les arrêts cités. CONFER : (2°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1993-02-24, Bulletin criminel 1993, n° 89, p. 214 (cassation), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 07 oct. 2003, pourvoi n°02-88383, Bull. crim. criminel 2003 N° 181 p. 754
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2003 N° 181 p. 754

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Di Guardia.
Rapporteur ?: M. Blondet.
Avocat(s) : Me Le Prado, Blanc.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:02.88383
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