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03/06/2008 | FRANCE | N°06-13761

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 03 juin 2008, 06-13761


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Sodico a conclu, le 11 juillet 1997, avec la société Comptoirs modernes économiques de Rennes (la société CMER) un contrat de franchise pour l'exploitation d'un magasin d'alimentation sous l'enseigne "Comod" ; qu'aux termes de ce contrat, d'une durée de sept ans, à compter du 15 juillet de la même année, la société Sodico s'engageait à effectuer l'essentiel des achats nécessaires à l'exploitation de son magasin auprès du franchiseur ; que cette socié

té a notifié, le 14 mars 2002, à la société Comptoirs modernes supermarché...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Sodico a conclu, le 11 juillet 1997, avec la société Comptoirs modernes économiques de Rennes (la société CMER) un contrat de franchise pour l'exploitation d'un magasin d'alimentation sous l'enseigne "Comod" ; qu'aux termes de ce contrat, d'une durée de sept ans, à compter du 15 juillet de la même année, la société Sodico s'engageait à effectuer l'essentiel des achats nécessaires à l'exploitation de son magasin auprès du franchiseur ; que cette société a notifié, le 14 mars 2002, à la société Comptoirs modernes supermarché ouest (la société CMSO), venant aux droits de la société CMER, la rupture de leurs relations contractuelles et a déposé l'enseigne "Comod" pour lui substituer l'enseigne "G 20" ; que, par arrêt infirmatif du 3 juillet 2002, la cour d'appel de Rennes, statuant en référé, a condamné la société Sodico, d'une part, à déposer l'enseigne "G 20" et à remettre l'enseigne "Comod" et, d'autre part, à poursuivre avec la société CMSO leurs relations contractuelles jusqu'au terme prévu au contrat, et ce sous astreinte ; que, par actes des 26 et 27 mars 2002, la société CMSO a fait apport, à la société Prodim, de la branche d'activité de franchiseur et d'animateur du réseau de franchise "Comod", y compris des contrats y afférents et, à la société CSF, de la branche d'activité d'exploitation commerciale et d'approvisionnement de fonds de commerce de type supermarchés ; qu'après la réalisation de ces apports partiels d'actifs, placés sous le régime des scissions, les sociétés Prodim et CSF ont assigné la société Sodico en liquidation d'astreinte, puis, au fond, en nullité de la résiliation du contrat, en poursuite des relations contractuelles et en indemnisation de leur préjudice ; qu'après avoir assigné les sociétés Diapar et Groupe 20 en indemnisation de leur préjudice, en tant que tiers complices de la rupture abusive du contrat par la société Sodico, pour avoir, du 22 mars au 27 juillet 2002, approvisionné cette dernière et permis l'apposition de l'enseigne "G 20" sur le magasin concerné, les sociétés Prodim et CSF ont assigné la société Diapar en indemnisation de leur préjudice pour avoir continué à approvisionner la société Sodico, après avoir reçu, le 29 juillet 2002, la signification de l'arrêt rendu en référé le 3 juillet de la même année, qui obligeait la société Sodico à poursuivre ses relations contractuelles avec la société CMSO ;

Sur le premier moyen :

Attendu que ce moyen n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais, sur le second moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 1134 du code civil, ensemble les articles L. 236-3 et L. 236-22 du code de commerce ;

Attendu que le contrat de franchise, conclu en considération de la personne du franchiseur, ne peut, sauf accord du franchisé, être transmis par l'effet d'un apport partiel d'actif placé sous le régime des scissions ;

Attendu que, pour déclarer les sociétés Prodim et CSF recevables à agir contre la société Diapar, l'arrêt retient que les traités d'apport partiels d'actifs soumis au régime des scissions emportent transmission universelle de tous les droits, biens et obligations afférents à la branche d'activité de l'apport, de la société apporteuse à la société bénéficiaire et que, parmi ces droits, biens et obligations figurent les décisions de justice que la société bénéficiaire est fondée à faire exécuter pour son propre compte ;

Attendu qu'en statuant ainsi, après avoir relevé, par motifs propres et adoptés, que la société Sodico avait, le 14 mars 2002, notifié à la société CMSO, venant aux droits de la société CMER, la fin de leurs relations contractuelles et, que la société Sodico avait continué à s'approvisionner, exclusivement ou principalement, auprès de la société Diapar, après la réalisation, sous le régime des scissions, des apports partiels d'actifs émanant de la société CMSO en faveur des sociétés CSF et Prodim, ce dont il résulte que la société Sodico n'avait pas consenti à la transmission aux sociétés Prodim et CSF du contrat de franchise, qu'elle avait conclu en considération de la personne du franchiseur, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le même moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article 1165 du code civil ;

Attendu que, pour déclarer les sociétés Prodim et CSF recevables à agir contre la société Diapar, l'arrêt retient encore, par motifs propres et adoptés, que la société Diapar, en tant que tiers au contrat de franchise, ne peut, contrairement au franchisé, se prévaloir du caractère intuitu personae de celui-ci et soutenir que ce contrat, par l'effet de l'apport qui a emporté changement de franchiseur, a nécessairement pris fin ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que les tiers à un contrat peuvent invoquer à leur profit, comme constituant un fait juridique, la situation créée par ce contrat, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a écarté des débats les pièces communiquées par la société Diapar le 5 décembre 2005, l'arrêt rendu le 24 janvier 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;

Condamne les sociétés Prodim et CSF aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer à la société Diapar la somme globale de 2 500 euros et rejette leur demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trois juin deux mille huit.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 06-13761
Date de la décision : 03/06/2008
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

CONTRATS DE DISTRIBUTION - Franchise - Nature juridique - Contrat conclu en considération de la personne du franchiseur - Transmission par le franchiseur - Conditions - Détermination - Portée

SOCIETE COMMERCIALE (règles générales) - Scission - Apport partiel d'actif - Soumission au régime des scissions - Effets - Transmission d'un contrat de franchise - Conditions - Détermination

Le contrat de franchise, conclu en considération de la personne du franchiseur, ne peut, sauf accord du franchisé, être transmis par l'effet d'un apport partiel d'actif placé sous le régime des scissions. Dès lors, viole l'article 1134 du code civil, ensemble les articles L. 236-3 et L. 236-22 du code de commerce, une cour d'appel qui, pour déclarer des sociétés bénéficiaires d'un tel apport, réalisé par un franchiseur, recevables à agir en indemnisation de leur préjudice contre une société assurant l'approvisionnement du franchisé, retient que les traités d'apports partiels d'actifs soumis au régime des scissions emportent transmission universelle de tous les droits, biens et obligations afférents à la branche d'activité de l'apport, de la société apporteuse à la société bénéficiaire


Références :

article 1134 du code civil

articles L. 236-3 et L. 236-22 du code de commerce

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 24 janvier 2006

Sur la transmissibilité des contrats conclus en considération de la personne, à rapprocher : Com., 13 décembre 2005, pourvoi n° 03-16878, Bull. 2005, IV, n° 255 (rejet) ; Com., 7 juin 2006, pourvoi n° 05-11384, Bull. 2006, IV, n° 140 (cassation) ; Com., 3 juin 2008, pourvoi n° 06-18007, Bull. 2008, IV, n° 111 (cassation) Sur les effets d'un apport partiel d'actif placé sous le régime des scissions, à rapprocher : Com., 5 mars 1991, pourvoi n° 88-19629, Bull. 1991, IV, n° 100 (cassation partielle)


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 03 jui. 2008, pourvoi n°06-13761, Bull. civ. 2008, IV, N° 110
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2008, IV, N° 110

Composition du Tribunal
Président : Mme Favre
Avocat général : M. Bonnet
Rapporteur ?: Mme Maitrepierre
Avocat(s) : Me Odent, SCP Gatineau

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:06.13761
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