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25/02/2009 | FRANCE | N°08-82782

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 25 février 2009, 08-82782


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-

X... Michel,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 5e chambre, en date du 12 mars 2008, qui, pour fraude fiscale, l'a condamné à dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis, 10 000 euros d'amende, a ordonné la publication et l'affichage de la décision et a prononcé sur les demandes de l'administration des impôts, partie civile ;

Vu les mémoires en demande et en défense produits ;

Sur le premier moyen de cassation, pris

de la violation des articles 1741 du code général des impôts, L. 227 du Livre des procédures f...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-

X... Michel,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 5e chambre, en date du 12 mars 2008, qui, pour fraude fiscale, l'a condamné à dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis, 10 000 euros d'amende, a ordonné la publication et l'affichage de la décision et a prononcé sur les demandes de l'administration des impôts, partie civile ;

Vu les mémoires en demande et en défense produits ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 1741 du code général des impôts, L. 227 du Livre des procédures fiscales, L. 121-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, 6 § 2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

"en ce que la cour a successivement décidé de la confirmation sur la culpabilité, de la condamnation de Michel X... à la peine de 18 mois d'emprisonnement avec sursis et 10 000 euros d'amende ; de la publication par extraits de l'arrêt au journal officiel et dans le journal "la Provence" et de l'affichage par extraits durant trois mois à la mairie du domicile du condamné ;

"aux motifs que "l'élément intentionnel de l'infraction est également établi de manière incontestable ; que Michel X..., en sa qualité de Président directeur-général des deux sociétés, était en effet tenu de s'assurer de la sincérité des déclarations de taxe sur la valeur ajoutée déposées ; que le premier juge a justement noté ; que le nombre, l'ancienneté et l'importance des fonctions exercées par Michel X... au sein du groupe SATT Intérim, et notamment celle de Président du GIE Groupement de Services Intégrés ne permet pas d'envisager un instant qu'il n'ait pas eu les pouvoirs et les compétences nécessaires à leur exercice effectif" ; que la limitation de compétence évoquée (15 000 euros) était inopposable aux tiers; qu'il convient par ailleurs de souligner que les deux sociétés avaient fait l'objet de vérifications de comptabilité concernant des périodes antérieures qui s'étaient soldées par des redressements pour insuffisance de déclaration en matière de taxe sur la valeur ajoutée, ce dont Michel X... avait été parfaitement informé comme l'a noté le tribunal dans sa décision; qu'ainsi Michel X... ne pouvait ignorer les obligations fiscales pesant sur lui en sa qualité de dirigeant ; qu'il est irrecevable quand il prétend se décharger de sa responsabilité sur les commissaires aux comptes ou confond volontairement pouvoir financier et responsabilité pénale ; qu'en l'état de ces éléments, il y a lieu de regarder Michel X... convaincu des faits reprochés qui caractérisent exactement le délit imputé et de confirmer sur la culpabilité le jugement déféré ; que la décision entreprise sera par contre réformée sur la répression pour tenir compte de la gravité des faits et de la personnalité du prévenu ; que l'importance de la TVA éludée et l'aspect récurrent des insuffisances déclaratives démontrent l'existence d'un système de fournitures frauduleuses de trésorerie dans les entreprises Aixoise et Vauclusienne de Travail Temporaire par le biais de la TVA versée par les clients desdites sociétés ; que le prévenu sera condamné à 18 mois d'emprisonnement avec sursis et 10 000 euros d'amende" ;

1) "alors que, en vertu de l'article L. 227 du Livre des procédures fiscales, au cas de poursuites pénales tendant à l'application de l'article 1741 du code général des impôts, il incombe aux parties poursuivantes, le ministère public et l'administration fiscale, de rapporter la preuve du caractère intentionnel, soit de la soustraction soit de la tentative de se soustraire à l'établissement et au payement des impôts visés par cet article ; que dès lors, le juge du fond doit, par les énonciations de sa décision, relever et constater une participation personnelle, ou un élément personnel de mauvaise foi, à caractère matériel et intentionnel, pouvant être reproché au prévenu du délit qui a été retenu, sans se borner à se fonder sur la seule qualité de dirigeant de ce dernier, que ces exigences sont la traduction au plan de la répression fiscale en cause du principe général de la responsabilité pénale personnelle énoncée par l'article L. 121-1 du code pénal, et qu'elles permettent le respect de la présomption d'innocence garantie par l'article 6 § 2 de la Convention européenne des droits de l'homme ; que, nonobstant, la cour d'appel d'Aix-en-Provence s'est essentiellement et respectivement fondée sur les fonctions de président directeur-général des deux sociétés considérées assumées par le prévenu, et, par motifs adoptés du juge de première instance, sur le nombre et l'ancienneté et l'importance des fonctions exercées par Michel X... au sein du groupe SATT Intérim ; que la circonstance, relevée par la cour, que la limitation des compétences de Frédéric X... pour engager les sociétés au-delà de 15 000 euros, n'aurait pas été opposable aux tiers, est sans emport sur la détermination de la réalité d'une prétendue participation personnelle et de mauvaise foi du prévenu à la fraude alléguée ; que la cour n'a pas pris en compte le fait que Michel X... ne se rendait jamais à Saint-Raphaël, siège du GIE GSI, ni qu'il n'a fait aucun acte de gestion administrative, fiscale ou financière afférent aux opérations incriminées ; ni enfin que ses fonctions de salarié à plein temps au sein de la société Emplois Services le tenaient éloigné de ses fonctions de direction des sociétés du groupe SATT Intérim ; qu' ainsi, la cour a violé les textes et principes précités ;

2) "alors que, dans ses conclusions d'appel (cf. productions), Michel X... avait, d'une part, démontré successivement qu'il n'avait fait aucun acte de gestion administrative, financière ou fiscale des sociétés en cause ; que ses fonctions de salariés à plein temps au sein de la société Emplois Services le tenaient éloigné de ses fonctions de direction des sociétés du groupe SATT Intérim, que, pour des raisons de santé, il ne se rendait jamais à Saint-Raphaël, siège du GIE GSI, et que l'ensemble de ces circonstances de faits déterminantes, non contestées par l'administration fiscale dans ses conclusions de partie civile (cf. productions) établissait, en droit, la violation par le jugement de première instance de l'article L. 121-1 du code pénal ; que la cour n'a pas répondu à cette argumentation opérante, entachant sa décision d'un défaut de motifs dirimant en violation de l'article 593 du code de procédure pénale" ;

Attendu que, pour déclarer Michel X... coupable de fraude fiscale, en sa qualité de dirigeant des sociétés Aixoise de travail temporaire et Vauclusienne de travail temporaire, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, dépourvues d'insuffisance comme de contradiction, qui établissent, en l'absence de délégation de pouvoirs, la participation personnelle du prévenu aux faits poursuivis, la cour d'appel, qui a répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable, a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation de l'article 1745 du code général des impôts, du principe de proportionnalité, ensemble de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde droit de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1 du premier protocole additionnel à cette Convention, de l'article 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs ;

"en ce que la cour a rejeté l'exception d'inconstitutionnalité de l'article 1745 du code général des impôts, et déclaré Michel X... solidairement tenu tant avec la SAS Société Aixoise de Travail Temporaire qu'avec la SAS Société Vauclusienne de Travail Temporaire, redevables légales de l'impôt, au paiement des impôts fraudés ainsi qu'à celui des majorations et pénalités fiscales afférentes ;

"aux motifs que "il échet de déclarer l'administration des impôts recevable et bien fondée en sa constitution de partie civile en application de l'article L. 232 du Livre des Procédures Fiscales ; (…) Michel X..., par application des dispositions de l'article 1745 du code général des Impôts, sera solidairement tenu tant avec la SAS Société aixoise de Travail Temporaire qu'avec la SAS Société Vauclusienne de Travail Temporaire, redevables légales de l'impôt, au paiement des impôts fraudés ainsi qu'à celui des majorations et pénalités fiscales y afférentes; (…) en effet, le prononcé de la solidarité, qui est une mesure à caractère pénal mais non une sanction pénale soumise au principe de proportionnalité, est une faculté pour le juge ; (…) en l'espèce, la participation majeure de Michel X... aux faits de la cause justifie le prononcé de ladite solidarité à son encontre" ;

1) "alors que, dans ses conclusions d'appel, Frédéric X... n'avait pas soulevé une exception d'inconstitutionnalité de l'article 1745 du code général des impôts mais soutenu que, pour l'application de cet article, le juge pénal devait prendre en compte le respect du principe de proportionnalité, qui est de valeur constitutionnelle puisque résultant de l'article 8 de la déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 ; qu'en rejetant l'exception d'inconstitutionnalité de ce texte, la cour a ainsi dénaturé ses conclusions en violation de l'article 593 du code de procédure pénale ;

2) "alors que, si, selon l'article 1745 du code général des impôts, tous ceux qui ont fait l'objet d'une condamnation définitive prononcée en application de l'article 1741 du même code peuvent être solidairement tenus avec le redevable légal de l'impôt fraudé, au paiement de cet impôt ainsi qu'à celui des pénalités fiscales y afférentes, la solidarité ainsi prononcée au profit du créancier de l'impôt, sur constitution de partie civile de l'administration fiscale est une mesure à caractère pénal, laquelle doit être prise dans le strict respect du principe de proportionnalité, principe à valeur constitutionnelle dans l'ordre interne et résultant également des stipulations de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la cour a purement et simplement refusé de faire application de ce principe, violant ainsi les textes et principes susvisés ;

3) "alors que, l'infliction d'une mesure pénale à portée financière qui s'avère disproportionnée, eu égard à son montant et à la situation du prévenu, est contraire à l'article 1 du Premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales garantissant le droit de propriété" ;

Attendu que, pour condamner Michel X..., déclaré coupable de fraude fiscale, au paiement des droits fraudés et des pénalités y afférentes, solidairement avec les sociétés Aixoise de travail temporaire et Vauclusienne de travail temporaire, redevables légales de l'impôt, la cour d'appel prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors que les juges, qui prononcent la solidarité, ne peuvent en limiter les effets à une part des impôts fraudés et pénalités fiscales y afférentes, dont la détermination relève de la seule compétence de l'administration, sous le contrôle du juge de l'impôt, la cour d'appel a justifié sa décision, sans méconnaître les dispositions conventionnelles invoquées ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Dulin conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, Mme Labrousse conseiller rapporteur, M. Rognon conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Lambert ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 08-82782
Date de la décision : 25/02/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 12 mars 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 25 fév. 2009, pourvoi n°08-82782


Composition du Tribunal
Président : M. Dulin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Foussard, SCP Lesourd

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.82782
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