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13/11/2012 | FRANCE | N°11-21148

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 13 novembre 2012, 11-21148


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses première et deuxième branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nouméa, 28 mars 2011), que la société Start a été mise en liquidation judiciaire le 2 juillet 2002, la SELARL B... étant désignée liquidateur (le liquidateur) ; que celui-ci a assigné M. X..., M. Y... et Mme Z... pour obtenir la restitution de sommes qu'il estimait indûment payées par la société Start ; que le tribunal a rejeté les demandes formées contre M. Y... et Mme Z... et a accueilli la demande fo

rmée contre M. X..., lequel a interjeté appel ; que l'appel incident form...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses première et deuxième branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nouméa, 28 mars 2011), que la société Start a été mise en liquidation judiciaire le 2 juillet 2002, la SELARL B... étant désignée liquidateur (le liquidateur) ; que celui-ci a assigné M. X..., M. Y... et Mme Z... pour obtenir la restitution de sommes qu'il estimait indûment payées par la société Start ; que le tribunal a rejeté les demandes formées contre M. Y... et Mme Z... et a accueilli la demande formée contre M. X..., lequel a interjeté appel ; que l'appel incident formé par le liquidateur a été déclaré irrecevable par la cour d'appel, faute pour celui-ci d'avoir constitué avocat dans le mois de la signification de la requête d'appel ; que M. A..., désigné mandataire ad hoc de la société Start a assigné le liquidateur en réparation du préjudice causé par cette faute ;
Attendu que la société Start fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté l'ensemble de ses demandes indemnitaires formées contre le liquidateur, alors, selon le moyen :
1°/ que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer ; que chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence ; qu'en décidant que le liquidateur n'avait pas commis de négligence fautive en concluant devant la cour d'appel sans constituer avocat, en méconnaissance des dispositions du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie imposant une telle constitution, motif pris qu'il existait une pratique par laquelle la cour d'appel de Nouméa tolérait que le liquidateur intervienne seul à la procédure, la cour d'appel, qui s'est prononcée par un motif impropre à ôter à cette négligence son caractère fautif, a violé les articles 1382 et 1383 du code civil ;
2°/ qu'en présence d'un dommage consistant en la perte d'une chance d'exercer une action en justice, le caractère réel et sérieux de la chance perdue doit s'apprécier au regard de la probabilité de succès de cette action ; qu'il convient, pour apprécier la chance perdue, de reconstituer fictivement, au vu des conclusions des parties et des pièces produites aux débats, la discussion qui aurait pu s'instaurer devant le juge du fond entre les parties ; qu'en se bornant à énoncer, pour décider que le liquidateur n'avait pas engagé sa responsabilité en s'abstenant de constituer avocat, ce qui avait entraîné l'irrecevabilité de son pourvoi incident, que la société Start ne démontrait pas en quoi elle avait perdu une chance de voir prospérer en justice son argumentation, sans rechercher quelles étaient les chances de succès de l'action qu'elle avait été chargée d'engager, en reconstituant fictivement, au vu des conclusions et des pièces versées aux débats, la discussion qui aurait pu s'instaurer avec M. Y... et Mme Z... devant le juge du fond, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et 1383 du code civil ;
Mais attendu, qu'après avoir exactement énoncé qu'il incombait à la société Start de prouver qu'elle avait des chances d'obtenir satisfaction en cause d'appel, l'arrêt, appréciant souverainement les éléments du débat, relève que cette preuve n'est pas rapportée par la société Start ; qu'ainsi, la cour d'appel, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la première branche, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que les autres branches du moyen ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Start aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize novembre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Richard, avocat aux Conseils, pour la société Start
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la Société START, représentée par son mandataire ad hoc, de l'ensemble de ses demandes indemnitaires formées à l'encontre de la SELARL Mary-Laure
B...
;
AUX MOTIFS PROPRES QU'il résulte des éléments de preuve produits aux débats que par jugement du 2 juillet 2002, le Tribunal mixte de commerce de NOUMEA a prononcé la liquidation judiciaire de la Société START et a désigné la SELARL Mary-Laure
B...
en qualité de liquidateur judiciaire ; que par requête du 26 février 2004, la Société START, représentée par son mandataire liquidateur, a fait citer devant le Tribunal de première instance de NOUMÉA Monsieur X..., en sa qualité de gérant de la S. A. R. L. TRANSIM, ainsi que Monsieur Y... et Madame Z..., pris en leur qualité de trésorier et de président de l'association des commerçants de la Galerie Palm Beach, afin d'obtenir la restitution des sommes prélevées par eux en vertu d'une clause, considérée comme abusive, qui obligeait le preneur à adhérer à un G. I. E. qui a finalement donné naissance à une association non déclarée ; que par jugement du 4 avril 2005, le Tribunal de première instance de NOUMÉA, considérant que Monsieur X... (Société TRANSIM) avait commis des fautes en recevant des sommes d'argent qu'il savait destinées à un G. I. E. et qu'il reversait à une association dont il n'avait pas vérifié la capacité juridique, a été condamné à réparer le préjudice causé à la S. A. R. L. START et à lui verser la somme de 1. 166. 700 FCFP ; que le 15 avril 2005, Monsieur X... ayant interjeté appel de cette décision, et la SELARL Mary-Laure
B...
, ès qualités, ayant formé appel incident, a présenté des demandes à ce titre, la Cour d'appel de NOUMÉA a confirmé, par arrêt du 10 août 2006, le jugement du 4 avril 2005, mais déclaré irrecevables les conclusions déposées afin d'appel incident par la SELARL Mary-Laure
B...
, faute d'avoir constitué avocat dans le mois de la signification de la requête d'appel, ainsi que l'y obligeait l'article 903 du Code de procédure civile de la NOUVELLE-CALÉDONIE, s'agissant d'une procédure avec représentation obligatoire ; que telle est l'origine de la présente action en responsabilité ; que le 26 septembre 2007, la Société START, représentée par son mandataire ad hoc Monsieur A..., a fait citer la SELARL Mary-Laure
B...
devant le Tribunal de première instance de NOUMÉA, sur le fondement des articles 1382 et 1383 du Code civil, en réparation du préjudice causé par la faute du mandataire liquidateur, l'omission de constituer avocat devant la Cour constituant une faute qui avait privé la Société START d'une chance d'exploiter une voie de recours et obtenir l'indemnisation du préjudice invoqué ; qu'au titre de son préjudice, la Société START, sollicitait la condamnation de la SELARL Mary-Laure
B...
à lui verser :
-419. 200 FCFP représentant les sommes qui devaient être recouvrées en appel ;
-100. 000 FCFP représentant la perte de l'indemnisation réclamée au titre des frais irrépétibles d'appel ;
-120. 000 FCFP représentant le montant des frais irrépétibles qu'elle a été condamnée à payer aux consorts Y... et Z...,
-800. 000 FCFP au titre du préjudice subi pour la perte de chance d'obtenir gain de cause en appel ;
que les écritures d'appel des parties ne font que réitérer les écritures devant le premier juge ; que, toutefois, la Société START après avoir réitéré dans son mémoire ampliatif d'appel les mêmes demandes indemnitaires que devant le premier juge, a réduit sur le premier chef de demande l'indemnité sollicitée de 419. 200 FCFP à 219. 200 FCFP, et porté sa demande au titre du second poste de préjudice de 100. 000 à 200. 000 FCFP, et sollicité en outre une indemnité de 120. 000 FCFP au titre des frais irrépétibles ; qu'elle expose, en substance, dans ses conclusions du 10 mai, du 19 août, et du 15 novembre 2010, que s'il était arrivé à la cour de tolérer l'irrégularité procédurale en cause, une mise en oeuvre rigoureuse des règles procédurales, dont atteste l'arrêt du 10 août 2006 ne constituait pas une jurisprudence " imprévisible ", et que la non constitution d'un avocat en cause d'appel constitue pour le professionnel du droit une négligence et une imprudence de nature à entraîner la mise en cause de sa responsabilité ; que pour s'opposer à cette argumentation, dans ses conclusions du 13 juillet et du 17 septembre 2010, la SELARL Mary-Laure
B...
fait valoir qu'elle avait été à de nombreuses reprises accueillie en tant que mandataire liquidateur devant la Cour d'appel de NOUMÉA sans que lui ait été opposée une irrecevabilité fondée sur l'article 903 du Code de procédure civile de la NOUVELLE-CALÉDONIE ; que c'est en vertu de cette jurisprudence qu'elle avait formé appel incident sans constitution d'avocat, de sorte qu'il ne pouvait lui être reproché les conséquences d'un revirement de jurisprudence non prévisible ; qu'en outre, Monsieur A...avait toujours été associé à la procédure devant la cour d'appel ; qu'enfin, il ne prouve pas le dommage né d'une perte de chance de voir aboutir son appel incident ; que sur la faute invoquée et le préjudice, la responsabilité recherchée ne peut être établie que sur le fondement d'une faute ; qu'il incombe à la Société START de prouver tout à la fois l'existence d'un manquement fautif, mais encore la perte d'une chance constitutive d'un préjudice, et d'un lien direct et certain entre la fauté et le dommage ; qu'en l'espèce, à supposer la faute établie, le préjudice invoqué demeure hypothétique ; que la Société START ne tente même pas de démontrer en quoi elle aurait perdu une chance sérieuse de voir prospérer son argumentation devant la cour d'appel ; que cette absence de preuve du préjudice suffit à elle seule à justifier le rejet de ses demandes et a confirmer la décision déféré ; que surabondamment, en l'espèce, et ainsi que l'a très justement relevé le premier juge, il existait une pratique par laquelle la Cour d'appel de NOUMÉA tolérait que le mandataire liquidateur intervienne seul à la procédure, comme le confirmait le fait que la signification de la requête d'appel que lui adressait le greffe ne contenait pas l'avis de constitution d'avocat obligatoire, prévu par l'article 903 du Code de procédure civile de la NOUVELLE-CALÉDONIE ; qu'eu égard à cette pratique, la négligence fautive reprochée à la SELARL Mary-Laure
B...
n'est pas établie ; qu'il convient donc de confirmer purement et simplement le jugement déféré en ce qu'il a débouté la Société START de ses demandes ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il n'est pas contesté que la S. A. R. L. START ne disposait pas d'une trésorerie pour faire face aux honoraires d'un avocat ; qu'enfin il ressort du courrier du 2 mars 2006 établi par Monsieur A... que ce dernier remettait au mandataire liquidateur des conclusions à produire dans l'instance litigieuse, rédigées par son, avocat, qu'il rémunérait de ses deniers personnels, alors qu'il n'apparaît pas que son propre conseil ait jamais suggéré à Monsieur A... d'inviter la SELARL Mary-Laure
B...
à constituer avocat devant la Cour, et alors que Monsieur A..., débiteur en état de liquidation judiciaire, pouvait accomplir seul des actes conservatoires utiles, tel celui de constituer, dans les délais impartis, un avocat au liquidateur en cause d'appel ;
1°) ALORS QUE tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer ; que chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence ; qu'en décidant que la SELARL Mary-Laure
B...
n'avait pas commis de négligence fautive en concluant devant la Cour d'appel sans constituer avocat, en méconnaissance des dispositions du Code de procédure civile de la NOUVELLE-CALEDONIE imposant une telle constitution, motif pris qu'il existait une pratique par laquelle la Cour d'appel de Nouméa tolérait que le liquidateur intervienne seul à la procédure, la Cour d'appel, qui s'est prononcée par un motif impropre à ôter à cette négligence son caractère fautif, a violé les articles 1382 et 1383 du Code civil ;
2°) ALORS QU'en présence d'un dommage consistant en la perte d'une chance d'exercer une action en justice, le caractère réel et sérieux de la chance perdue doit s'apprécier au regard de la probabilité de succès de cette action ; qu'il convient, pour apprécier la chance perdue, de reconstituer fictivement, au vu des conclusions des parties et des pièces produites aux débats, la discussion qui aurait pu s'instaurer devant le juge du fond entre les parties ; qu'en se bornant à énoncer, pour décider que la SELARL Mary-Laure
B...
n'avait pas engagé sa responsabilité en s'abstenant de constituer avocat, ce qui avait entraîné l'irrecevabilité de son pourvoi incident, que la Société START ne démontrait pas en quoi elle avait perdu une chance de voir prospérer en justice son argumentation, sans rechercher quelles étaient les chances de succès de l'action qu'elle avait été chargée d'engager, en reconstituant fictivement, au vu des conclusions et des pièces versées aux débats, la discussion qui auraient pu s'instaurer avec les consorts Y... et Z... devant le juge du fond, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et 1383 du Code civil ;
3°) ALORS QU'en énonçant, pour débouter la Société START de son action en responsabilité personnelle à l'encontre de la SELARL Mary-Laure
B...
, qu'elle n'avait pas pris l'initiative de constituer un avocat en cause d'appel à titre conservatoire et que son propre avocat n'avait pas suggéré à son mandataire ad hoc, Monsieur A..., d'avertir le mandataire liquidateur de la nécessité de procéder à une telle constitution, bien que la circonstance qu'un tiers ait pu le cas échéant régulariser la situation procédurale de l'action qui était pendante devant les juges du fond ou suggérer de procéder à cette régularisation ait été impuissante à écarter la faute de la SELARL Mary-Laure
B...
, la Cour d'appel a statué par un motif inopérant, en violation des articles 1382 et 1383 du Code civil ;
4°) ALORS QUE la Société START faisait valoir dans ses conclusions d'appel que sa trésorerie lui avait permis de mandater un avocat afin qu'il soutienne la requête présentée par son mandataire liquidateur en première instance et que sa situation financière était demeurée inchangée dans le cadre de la procédure d'appel ayant donné lieu à l'arrêt du 10 août 2006 ayant jugé irrecevable son appel incident, de sorte qu'elle disposait également d'une surface financière suffisante pour prendre en charge le coût d'un avocat en cause d'appel ; qu'en affirmant néanmoins, pour décider que la SELARL Mary-Laure
B...
n'avait pas engagé sa responsabilité en s'abstenant de constituer avocat, qu'il n'était pas contesté que la Société START ne disposait pas d'une trésorerie suffisante pour faire face aux honoraires d'un avocat, la Cour d'appel a dénaturé ses conclusions d'appel en violation de l'article 4 du Code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 11-21148
Date de la décision : 13/11/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nouméa, 28 mars 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 13 nov. 2012, pourvoi n°11-21148


Composition du Tribunal
Président : M. Espel (président)
Avocat(s) : Me Jacoupy, SCP Richard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.21148
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