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28/01/2014 | FRANCE | N°12-27215

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 28 janvier 2014, 12-27215


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 5 juin 2012), que M. X... s'est rendu caution solidaire auprès de la société HSBC France (la banque) des engagements de la société Energies natures, cette dernière ayant été mise par jugement du 11 septembre 2009 en redressement judiciaire, converti en liquidation judiciaire le 6 avril 2010 ; qu'après avoir déclaré ses créances au passif de la société Energies natures, la banque a assigné M. X... en exécution de ses engagements de

caution ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné, ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 5 juin 2012), que M. X... s'est rendu caution solidaire auprès de la société HSBC France (la banque) des engagements de la société Energies natures, cette dernière ayant été mise par jugement du 11 septembre 2009 en redressement judiciaire, converti en liquidation judiciaire le 6 avril 2010 ; qu'après avoir déclaré ses créances au passif de la société Energies natures, la banque a assigné M. X... en exécution de ses engagements de caution ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné, en sa qualité de caution solidaire de la société Energies natures, à payer à la banque une certaine somme, alors, selon le moyen :
1°/ que lorsqu'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est ouverte, les créanciers ne peuvent être tenus pour responsables des préjudices subis du fait des concours consentis, sauf le cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou si les garanties prises en contrepartie de ces concours sont disproportionnées à ceux-ci ; que la fraude doit s'entendre de manoeuvres exercées par le créancier pour le seul service de ses propres intérêts ; que tel est le cas du prêt personnel octroyé par la banque lorsque ce prêt qui, sous couvert d'une augmentation de capital de l'entreprise, est en réalité destiné à combler une autorisation de découvert largement dépassé ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a énoncé que le seul fait que la banque ait crédité le compte de la société Energies natures le 29 décembre 2008 d'une somme de 20 000 euros - pouvant constituer la majeure partie du prêt personnel de 21 000 euros consenti à l'appelant- sous l'intitulé impropre « dépôt pour société en formation » ne caractérise pas un agissement frauduleux de la banque ; qu'en statuant de la sorte, sans rechercher si, outre cet intitulé impropre, la concomitance de plusieurs événements (ouverture par la banque d'un compte personnel au nom de M. X..., sur lequel a été créditée la somme de 21 000 euros, montant du prêt personnel qu'elle lui a consenti puis versement parallèle sur le compte de la société Energies natures de la somme de 20 000 euros dont la cour a admis qu'il pouvait constituer la majeure partie du prêt personnel de 21 000 euros enfin augmentation du capital de la société Energies natures décidée par l'assemblée générale du 23 décembre 2008 à hauteur de 20 000 euros, réservée en totalité à M. X... et dont la souscription a été libérée -nullement par le montant du prêt personnel consenti- mais, comme l'indique le procès-verbal d'assemblée générale, « par compensation avec des créances liquides et exigibles » que M. X... détenaient sur la société) ne permettait pas d'établir que la banque avait procédé à un montage frauduleux destiné, sous couvert d'une augmentation de capital, à combler à son seul avantage et en fraude des droits de M. X..., le découvert de la société Energies natures à l'aide du prêt personnel qu'elle lui avait consenti, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 650-1 du code de commerce ;
2°/ que lorsqu'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est ouverte, les créanciers ne peuvent être tenus pour responsables des préjudices subis du fait des concours consentis, sauf les cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou si les garanties prises en contrepartie de ces concours sont disproportionnées à ceux-ci ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a énoncé qu'aucun des éléments versés aux débats, ni même le fait que la banque ait crédité le compte de la société Energies natures le 29 décembre 2008 d'une somme de 20 000 euros sous l'intitulé impropre « dépôt pour société en formation », n'établissait que la banque se serait livrée à une immixtion caractérisée dans la gestion de la société Energies natures au sens de l'article L. 650-1 du code de commerce ; qu'en statuant de la sorte, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si le montage ayant consisté -sous couvert d'une augmentation du capital de la société Energies natures, décidée par l'assemblée générale du 23 décembre 2008 et réservée en totalité à M. X... dont la souscription a été libérée, nullement à l'aide d'un apport en numéraire, mais par compensation avec des créances liquides et exigibles que M. X... détenait sur la société- à combler le découvert de la société Energies natures en accordant à M. X... un prêt personnel de 21 000 euros crédité tout d'abord sur un compte ouvert à cet effet dans les livres de la banque, puis sur le compte de la société Energies natures d'une somme de 20 000 euros, dont la cour d'appel a admis qu'il pouvait constituer la majeure partie du prêt personnel de 21 000 euros, ne révélait pas une immixtion caractérisée de la banque dans la gestion de la société Energies natures, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 650-1 du code de commerce ;
Mais attendu, d'une part, qu'après avoir constaté que M. X... ne soutenait pas que les concours ont été accordés à la société Energies natures dans un but autre que celui de maintenir l'activité ou de satisfaire à l'objet social, ou que la banque détenait des informations sur la situation de la société Energies natures que cette dernière ou son gérant ignorait, la cour d'appel a pu en déduire que M. X... ne démontrait pas le caractère frauduleux des concours accordés par la banque à la société Energies natures ;

Attendu, d'autre part, qu'après avoir relevé que M. X... n'a pas précisé la destination des fonds du prêt personnel, que la banque a débloqué le capital prêté en exécution des instructions expresses données à deux reprises par M. X..., et que ce dernier n'invoque pas l'existence d'une correspondance de la banque, antérieure à l'octroi du prêt personnel, dont il résulte qu'elle a été associée au projet d'augmentation du capital de la société Energies natures et à son mode de financement, voire qu'elle en a été l'instigatrice, l'arrêt retient encore qu'aucun élément n'établit que la banque se serait livrée à une immixtion caractérisée dans la gestion de la société Energies natures ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit janvier deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Tony X..., en sa qualité de caution solidaire de la société Energies Natures, à payer à la société HSBC France une somme de 42.000 € avec intérêts au taux légal à compter du 18 février 2010, capitalisables annuellement,
AUX MOTIFS QUE l'article L. 650-1 du code de commerce dispose dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2008-1245 du 18 décembre 2008, applicable en l'occurrence puisque la procédure collective de la société Energies Natures a été ouverte le 11 septembre 2009 : «Lorsqu'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est ouverte, les créanciers ne peuvent être tenus pour responsables des préjudices subis du fait des concours consentis, sauf les cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou si les garanties prises en contrepartie de ces concours sont disproportionnés à ceux-ci. Pour le cas où la responsabilité d'un créancier est reconnue, les garanties prises en contrepartie de ses concours peuvent être annulées ou réduites par le juge»; Que Tony X... ne conteste pas que ce texte est opposable aux co-obligés et cautions du débiteur en procédure collective; Que concernant en premier lieu l'exception au principe de l'immunité des établissements de crédit tirée de la fraude et invoquée par Tony X..., ce dernier ne démontre pas en quoi l'octroi de deux concours de 50.000 € et 25.000 € à la société Energies Natures qui était confrontée à ces difficultés financières, et en contrepartie du cautionnement de son gérant, aurait été entaché d'un caractère frauduleux, dès lors qu'il n'est allégué par l'appelant, ni que ces concours auraient été accordés dans un but autre que celui de maintenir l'activité ou de satisfaire à l'objet social, ni que la banque, en accordant ces concours, aurait détenu des informations sur la situation de la société Energies Natures que cette dernière et / ou son gérant aurai(en) ignorées; Que concernant en second lieu l'exception au principe de l'immunité des établissements de crédit tirée de l'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur et invoquée par Tony X..., il est établi d'une part, que la société HSBC France a consenti à Tony X... personnellement le 5 décembre 2008 un prêt personnel de 21.000 € et, d'autre part, que l'assemblée générale des associés de la société Energies Natures en date du 23 décembre 2008 a décidé en ses 3ème et 4ème résolutions, de l'augmentation de son capital de 20.000 €, réservée à Tony X...; Que ce dernier a également produit : - une correspondance télécopiée adressée entretemps le 16 décembre 2008 à la société HSBC France par lui-même en qualité expresse de dirigeant de la société Energies Natures dans les termes suivants : «objet : augmentation de capital - je vous prie de bien vouloir trouver ci-joint la répartition du capital ainsi que le texte de résolutions proposées à l'assemblée générale mixte du 23 9 décembre 2008. Merci de bien vouloir débloquer le prêt d'un montant de 21.000 € devant constituer l'augmentation de capital» (pièce n° 26), - une seconde correspondance télécopiée adressée le 23 décembre 2008 à la société HSBC France par Tony X... en qualité expresse de dirigeant de la société Energies Natures dans les termes suivants : «objet : procès-verbal des délibérations de l'assemblée générale mixte du 23 décembre 2008 - Suite à l'assemblée générale de ce jour, je (vous) saurais gré de bien vouloir procéder à la libération du capital de 20.000 €» (pièce n° 12); Qu'aucun de ces éléments n'établit que la société HSBC France se serait livrée à une immixtion caractérisée dans la gestion de la société Energies Natures au sens de l'article L. 650-1 du code de commerce, étant observé : en premier lieu, que le prêt personnel souscrit par Tony X... n'explicitait pas la destination des fonds empruntés; en second lieu, que la banque a débloqué le capital prêté en exécution des instructions expresses données à deux reprises par Tony X..., les 16 et 23/12/2008; et qu'en troisième lieu, ce dernier n'invoque pas l'existence d'une quelconque correspondance de la société HSBC France, antérieure à l'octroi du prêt personnel, dont il résulterait qu'elle aurait été associée au projet d'augmentation du capital de la société et à son mode de financement, voire qu'elle en aurait été l'instigatrice ; Qu'enfin, le seul fait que la société HSBC ait crédité le compte de la société Energies Natures le 29 décembre 2008 d'une somme de 20.000 € (pouvant constituer la majeure partie du prêt personnel de 21.000 € consenti à l'appelant) sous l'intitulé - manifestement impropre - «dépôt pour société en formation» ne caractérise ni un agissement frauduleux de la banque, ni une immixtion caractérisée dans la gestion de ladite société; Que dès lors, Tony X... ne justifie de l'applicabilité d'aucune exception à l'immunité de la société HSBC France en sa qualité de banque dispensatrice de crédit consenti à la société Energies Natures, les dispositions de l'article L. 650-1 du code de commerce rendent infondées la demande reconventionnelle de Tony X... en responsabilité de ladite banque (arrêt p. 4 et 5).
ALORS QUE, D'UNE PART, lorsqu'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est ouverte, les créanciers ne peuvent être tenus pour responsables des préjudices subis du fait des concours consentis, sauf le cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou si les garanties prises en contrepartie de ces concours sont disproportionnées à ceux-ci ; que la fraude doit s'entendre de manoeuvres exercées par le créancier pour le seul service de ses propres intérêts ; que tel est le cas du prêt personnel octroyé par la banque lorsque ce prêt qui, sous couvert d'une augmentation de capital de l'entreprise, est en réalité destiné à combler une autorisation de découvert largement dépassé ; qu'en l'espèce, la cour a énoncé que le seul fait que la banque HSBC ait crédité le compte de la société Energies Natures le 29 décembre 2008 d'une somme de 20.000 € - pouvant constituer la majeure partie du prêt personnel de 21.000 € consenti à l'appelant - sous l'intitulé impropre «dépôt pour société en formation» ne caractérise pas un agissement frauduleux de la banque; Qu'en statuant de la sorte, sans rechercher si, outre cet intitulé impropre, la concomitance de plusieurs événements (ouverture par la banque HSBC d'un compte personnel au nom de M. X..., sur lequel a été créditée la somme de 21.000 €, montant du prêt personnel qu'elle lui a consenti puis versement parallèle sur le compte de la société Energies Natures de la somme de 20.000 € dont la cour a admis qu'il pouvait constituer la majeure partie du prêt personnel de 21.000 € enfin augmentation du capital de la société Energies Natures décidée par l'assemblée générale du 23 décembre 2008 à hauteur de 20.000 euros, réservée en totalité à M. X... et dont la souscription a été libérée - nullement par le montant du prêt personnel consenti - mais, comme l'indique le procès-verbal d'assemblée générale, «par compensation avec des créances liquides et exigibles» que M. X... détenaient sur la société) ne permettait pas d'établir que la banque avait procédé à un montage frauduleux destiné, sous couvert d'une augmentation de capital, à combler à son seul avantage et en fraude des droits de M. X..., le découvert de la société Energies Natures à l'aide du prêt personnel qu'elle lui avait consenti, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 650-1 du code de commerce,
ALORS QUE, D'AUTRE PART, lorsqu'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est ouverte, les créanciers ne peuvent être tenus pour responsables des préjudices subis du fait des concours consentis, sauf les cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou si les garanties prises en contrepartie de ces concours sont disproportionnées à ceux-ci; Qu'en l'espèce, la cour a énoncé qu'aucun des éléments versés aux débats, ni même le fait que la banque HSBC ait crédité le compte de la société Energies Natures le 29 décembre 2008 d'une somme de 20.000 € sous l'intitulé impropre «dépôt pour société en formation», n'établissait que la société HSBC se serait livrée à une immixtion caractérisée dans la gestion de la société Energies Natures au sens de l'article L. 650-1 du code de commerce; Qu'en statuant de la sorte, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée (Prod. 5 et prod. 6, p. 2), si le montage ayant consisté - sous couvert d'une augmentation du capital de la société Energies Natures, décidée par l'assemblée générale du 23 décembre 2008 et réservée en totalité à M. X... dont la souscription a été libérée, nullement à l'aide d'un apport en numéraire, mais par compensation avec des créances liquides et exigibles que M. X... détenait sur la société - à combler le découvert de la société Energies Natures en accordant à M. X... un prêt personnel de 21.000 € crédité tout d'abord sur un compte ouvert à cet effet dans les livres de la banque HSBC, puis sur le compte de la société Energies Natures d'une somme de 20.000 €, dont la cour a admis qu'il pouvait constituer la majeure partie du prêt personnel de 21.000 €, ne révélait pas une immixtion caractérisée de la société HSBC dans la gestion de la société Energies Natures, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 650-1 du code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 12-27215
Date de la décision : 28/01/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 05 juin 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 28 jan. 2014, pourvoi n°12-27215


Composition du Tribunal
Président : M. Espel (président)
Avocat(s) : SCP Baraduc et Duhamel, SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.27215
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