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25/11/2014 | FRANCE | N°13-24416

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 25 novembre 2014, 13-24416


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Geoxia Ouest, que sur le pourvoi incident relevé par la société SMC et M. X... en sa qualité d'administrateur ad hoc de celle-ci ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Geoxia Ouest (la société Geoxia) ayant résilié pour faute grave le contrat d'agent commercial qui la liait à la société SMC, celle-ci l'a fait assigner afin d'obtenir la résiliation du contrat à ses torts et le paiement d'une indemnité de cessation de contrat ain

si que des dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant d'une rup...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Geoxia Ouest, que sur le pourvoi incident relevé par la société SMC et M. X... en sa qualité d'administrateur ad hoc de celle-ci ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Geoxia Ouest (la société Geoxia) ayant résilié pour faute grave le contrat d'agent commercial qui la liait à la société SMC, celle-ci l'a fait assigner afin d'obtenir la résiliation du contrat à ses torts et le paiement d'une indemnité de cessation de contrat ainsi que des dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant d'une rupture brutale et fautive des relations commerciales ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal :
Attendu que la société Geoxia fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes tendant à faire déclarer irrecevables certaines des pièces produites par la société SMC alors, selon le moyen :
1°/ que doivent être écartées les pièces, invoquées au soutien des prétentions, qui ne sont pas communiquées simultanément à la notification des conclusions ; que cette cause d'irrecevabilité des pièces ne peut, par définition même, faire l'objet d'une régularisation ultérieure, sous peine de priver la règle de toute portée pratique ; qu'en l'espèce, la société SMC a conclu le 30 mars 2012 en faisant référence dans ses écritures à 81 pièces listées en annexe, qu'elle n'a cependant pas communiquées en même temps que lesdites conclusions ; qu'en conséquence, ces pièces devaient être écartées ; qu'en retenant cependant que les pièces litigieuses, ultérieurement communiquées à la société Geoxia Ouest sous de nouveaux numéros avec des conclusions du 25 juillet 2012, avaient été valablement produites, la cour d'appel a violé l'article 906 du code de procédure civile ;
2°/ que doivent être écartées les pièces, invoquées au soutien des prétentions, qui ne sont pas communiquées simultanément à la notification des conclusions ; que le juge ne peut refuser de mettre en oeuvre cette sanction procédurale au motif que le principe de la contradiction aurait été respecté nonobstant la communication tardive des pièces ; qu'en retenant en l'espèce que les pièces litigieuses avaient finalement été communiquées sous de nouveaux numéros par la société SMC avec des conclusions du 25 juillet 2012 et que les conclusions de la société Geoxia Ouest étant du 1er avril 2013, cela attestait que le principe de la contradiction avait été respecté, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et violé derechef l'article 906 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant relevé que les pièces de la société SMC, qui avaient été déclarées irrecevables par le juge de la mise en état, avaient été à nouveau communiquées à la société Geoxia, plusieurs mois avant l'ordonnance de clôture, par la société SMC, simultanément à la notification de ses conclusions le 25 juillet 2012, tandis que la société Geoxia avait conclu le 1er avril 2013, la cour d'appel, qui a fait ressortir que les pièces litigieuses avaient été communiquées en temps utile, a souverainement estimé que le principe de la contradiction avait ainsi été respecté et qu'il n'y avait pas lieu de les écarter ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu que ce moyen n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le second moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu que pour condamner la société Geoxia à payer à la société SMC une indemnité de cessation de contrat et rejeter sa demande de dommages-intérêts, l'arrêt retient qu'elle a modifié de façon substantielle les conditions d'exécution du contrat en empêchant la société SMC de garder le contact avec la clientèle après la signature du contrat de vente ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans préciser quelle stipulation contractuelle imposait à la société Geoxia de permettre à la société SMC de conserver un tel contact et d'accéder aux dossiers des clients postérieurement à la signature des contrats, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Geoxia Ouest à payer à la société SMC la somme de 250 000 euros à titre d'indemnité de rupture du contrat d'agent commercial et rejette sa demande de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 25 juin 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;
Condamne la société SMC et M. X..., en sa qualité d'administrateur ad hoc de celle-ci, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société SMC et la condamne à payer à la société Geoxia Ouest la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils, pour la société Geoxia Ouest.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société GEOXIA OUEST de ses demandes tendant à faire déclarer irrecevables certaines des pièces produites par la société SMC ;
AUX MOTIFS QUE « l'ensemble des pièces de l'appelant qui avaient été déclarées irrecevables et écartées des débats par le juge de la mise en état ont été communiquées à la société GEOXIA OUEST sous de nouveaux numéros plusieurs mois avant l'ordonnance de clôture avec des conclusions du 25 juillet 2012. Les conclusions de celle-ci sont du 1er avril 2013 et attestent de ce que le principe de la contradiction a été respecté. Il convient de rejeter la demande de la société GEOXIA OUEST tendant à voir écarter les pièces qui avaient été déclarées irrecevables par le juge de la mise en état » ;
ALORS QUE, D'UNE PART, doivent être écartées les pièces, invoquées au soutien des prétentions, qui ne sont pas communiquées simultanément à la notification des conclusions ; que cette cause d'irrecevabilité des pièces ne peut, par définition même, faire l'objet d'une régularisation ultérieure, sous peine de priver la règle de toute portée pratique ; qu'en l'espèce, la société SMC a conclu le 30 mars 2012 en faisant référence dans ses écritures à 81 pièces listées en annexe, qu'elle n'a cependant pas communiquées en même temps que lesdites conclusions ; qu'en conséquence, ces pièces devaient être écartées ; qu'en retenant cependant que les pièces litigieuses, ultérieurement communiquées à la société GEOXIA OUEST sous de nouveaux numéros avec des conclusions du 25 juillet 2012, avaient été valablement produites, la Cour d'appel a violé l'article 906 du Code de procédure civile ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, doivent être écartées les pièces, invoquées au soutien des prétentions, qui ne sont pas communiquées simultanément à la notification des conclusions ; que le juge ne peut refuser de mettre en oeuvre cette sanction procédurale au motif que le principe de la contradiction aurait été respecté nonobstant la communication tardive des pièces ; qu'en retenant en l'espèce que les pièces litigieuses avaient finalement été communiquées sous de nouveaux numéros par la société SMC avec des conclusions du 25 juillet 2012 et que les conclusions de la société GEOXIA OUEST étant du 1er avril 2013, cela attestait que le principe de la contradiction avait été respecté, la Cour d'appel a statué par des motifs inopérants et violé derechef l'article 906 du Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société GEOXIA OUEST à verser à la société SMC la somme de 250. 000 euros au titre de la rupture du contrat d'agent commercial et de l'avoir en conséquence déboutée de sa demande de dommages-intérêts ;
AUX MOTIFS QUE « seule la faute grave, c'est-à-dire celle qui porte atteinte à la finalité commune du mandat d'intérêt commun et rend impossible le maintien du lien contractuel, est privatrice de l'indemnité compensatrice du préjudice subi en cas de cessation du contrat d'agence commerciale et il appartient au mandant de rapporter la preuve d'une telle faute par application des articles L. 134-12 et L. 134-13 du Code de commerce. (Article L. 134-12 du Code de commerce : En cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi. (...) Article L. 134-13 : La réparation prévue à l'article L. 134-12 n'est pas due dans les cas suivants : 1° La cessation du contrat est provoquée par la faute grave de l'agent commercial (...). L'article L. 134-4 : Les contrats intervenus entre les agents commerciaux et leur mandant sont conclus dans l'intérêt commun des parties. Les rapports entre l'agent commercial et le mandant sont régis par une obligation de loyauté et en devoirs réciproques d'information. L'agent commercial doit exécuter son mandat en bon professionnel ; le mandant doit mettre l'agent commercial en mesure d'exécuter son mandat. L'article 2a) du contrat d'agent commercial dispose que le mandataire, soit la SMC, ne peut « prendre de représentation concurrente ou susceptible de faire concurrence sur le même secteur ». L'article 2 b) prévoit également que « l'agent s'engage à tenir informé régulièrement le mandant de l'état du marché de son secteur, les souhaits de la clientèle et les actions de la concurrence ». La société SMC fait valoir que s'agissant de vente de maison à construire, le maintien d'une information du client, tout au long du chantier, de l'avancement de ce dernier est un argument commercial déterminant, susceptible d'accroître et de maintenir la réputation du prestataire sur un secteur géographique donné. Selon elle, c'est sa réputation de sérieux en la matière qui assurait sa notoriété et ses bons résultats de commercialisation. Les attestations de Mme Y..., des consorts Z... et A... et de M. B... vont dans ce sens. Il est constant que pour diverses raisons, la société GEOXIA OUEST a réduit, voire supprimé l'accès de la société SMC aux dossiers des clients une fois le contrat de vente signé. Il résulte ainsi notamment de la lettre de M. C... en date du 15 février 2010 qu'il était demandé à la société SMC de diriger les clients la contactant pour des questions liées au suivi d'un chantier vers le siège de GEOXIA OUEST. Il ne peut être reproché à la société GEOXIA OUEST d'avoir cherché à réduire les coûts de construction pour s'adapter à un marché en crise soumis à une concurrence toute particulière. Il ne résulte pas des pièces produites par la société SMC que cette politique s'est traduite par une perte de qualité des produits livrés, y compris malfaçons et non respect de DTU. Il est fait état de certaines difficultés rencontrées par les clients au cours des travaux sans que ces difficultés dépassent les aléas normaux de toute construction. Ce qui peut être reproché à la société GEOXIA OUEST est d'avoir ainsi en modifiant de façon substantielle les conditions d'exécution du contrat de mandat, empêché la société SMC de garder contact avec la clientèle, de lui permettre de continuer de favoriser un suivi de clientèle et donc l'activité et le développement de l'activité de son agent. Aux termes du procès-verbal de constat du 27 janvier 2011, M. Stéphane D... a indiqué avoir été embauché le 15 septembre 2010, son frère Julien le 1er septembre 2010, par la société MAISONS FRANCE CONFORT, tous deux comme VRP et seuls salariés de l'agence située à Sable-sur-Sarthe. Par lettre du 29 janvier 2011, la société GEOXIA OUEST a notifié à la société SMC la résiliation du contrat d'agent commercial pour faute grave. Elle reproche à deux associés de la société SMC d'être salariés d'une société concurrente. Le fait que des associés de la société SMC soient salariés d'une entreprise concurrente ne constitue pas la prise par la société SMC, personne morale distincte des personnes physiques que sont ses associés, d'une représentation. Il n'est pas reproché à la société SMC d'avoir pris une quelconque représentation. Il n'est pas non plus reproché à la société SMC de ne pas avoir tenu informé le mandant de l'état du marché et des souhaits de la clientèle. Reste que la société SMC ne pouvait ignorer que deux de ses associés, disposant à eux deux de 74 pour 100 des parts sociales de la SMC, étaient également salariés d'une entreprise entrant directement en concurrence avec la société GEOXIA OUEST. Son devoir de loyauté vis-à-vis du mandant et le respect de l'article 2 b) du contrat d'agent commercial lui imposaient d'avertir la société GEOXIA OUEST de cette situation. Ce manquement constitue une faute entrainant la perte de confiance du mandant. M. Stéphane D... a donné sa démission à la SMC le 10 septembre 2010. La SMC, par la voie de son gérant, en a pris acte, et a mentionné lever la clause de non concurrence les liant contractuellement. La SMC produit aux débats deux attestations de commerciaux MAISONS AURA qui mentionnent avoir été informés par M. E... en 2010 pour l'un de ce que Julien et Stéphane D... ont quitté la société SMC pour aller travailler chez FRANCE CONFORT, pour l'autre en juillet 2010 du départ de Julien D... en juin 2010 ainsi que du prochain départ de Stéphane D... en septembre 2010. M. E... atteste avoir été informé par M. Bernard D... alors qu'il était directeur d'exploitation des MAISONS AURA « du départ de Julien D... en juillet 2010 puis de Stéphane D... courant septembre 2010 à la concurrence chez FRANCE CONFORT à Sablé » ; il convient de relever que la date d'entrée de Julien D... ne correspond pas aux propres déclarations de Stéphane D... au procès-verbal du 27 janvier 2011. La société GEOXIA OUEST a appris cette situation, à l'été ou à l'automne 2010. Il ne peut en être déduit qu'elle ait toléré cette situation dès lors qu'il résulte de la chronologie des faits telle qu'exposée qu'elle s'est simplement attachée à s'assurer de l'existence de ces informations. La société SMC ne peut se prévaloir d'une tolérance par la société GEOXIA OUEST de la situation résultant de ce que deux de ses associés travaillant pour la concurrence. La société GEOXIA OUEST a agi immédiatement lorsqu'à la suite du procès-verbal d'huissier en date du 27 janvier 2011, elle a pu avoir la certitude que deux des associés de la société SMC étaient salariés d'une société concurrente. La société SMC ne justifie pas avoir informé la société GEOXIA OUEST de cette situation alors qu'elle y était contractuellement tenue. La lettre de résiliation du 29 janvier 2011 mentionne expressément qu'il est reproché au mandataire d'avoir manqué à son obligation d'information du mandant et de loyauté à son égard. Mais, au vu des circonstances et des fautes commises par la société GEOXIA OUEST dans le cadre de ses obligations contractuelles, le fait que la société SMC n'ait pas informé de façon officielle le mandant que deux de ses associés travaillaient pour la concurrence retire à cette faute la gravité suffisante permettant de justifier la rupture du contrat aux torts du mandataire sans droit à indemnité. Les commissions versées au mandataire ont été de 238. 218 euros HT pour 2007, 155. 318 euros HT pour 2008, 150. 491 euros HT pour 2009 et 87. 719 euros HT pour 2010. La société SMC se prévaut en outre de commissions au titre d'avant-projets pour 12. 276 euros HT. Il convient d'évaluer à la somme de 250. 000 euros le montant de l'indemnité compensatrice à laquelle peut prétendre la SMC » ;
ALORS QUE, D'UNE PART, l'article 1er du contrat d'agent commercial conclu entre les sociétés GEOXIA OUEST et SMC stipule que « le mandataire (...) prospectera, sans exclusivité, la clientèle désirant faire construire pour son propre compte une maison individuelle dont la construction sera implantée dans la région de SABLE SUR SARTHE » et qu'il exercera sa mission « en proposant les modèles de maisons individuelles des catalogues et tarifs en vigueur au jour de la prospection, en concrétisant cette prospection par la signature du contrat type de construction en vigueur dans la société et par établissement ou transmission conjointe des pièces suivantes (...) » ; que l'article 2 prévoit qu'« en sa qualité d'agent commercial, le mandataire prospecte à sa convenance la clientèle, il effectue ses tournées comme il l'entend, il bénéficie de l'indépendance propre à tout chef d'entreprise dans l'organisation de son activité » et qu'il « doit apporter tous les soins requis par la diligence professionnelle pour promouvoir les ventes de maisons faisant l'objet du présent contrat, en respectant les directives relatives au tarif, conditions d'implantation, plan de financement, modalités de paiement » ; que l'article 4 du même contrat stipule encore que « le fait générateur de la commission est l'ouverture du chantier » ; qu'il résulte de l'ensemble de ces clauses claires et précises que la société GEOXIA OUEST ne s'est nullement engagée envers la société SMC à lui confier contractuellement un rôle quelconque dans le suivi des chantiers afférents aux contrats négociés par ses soins ; qu'en retenant cependant que la société GEOXIA OUEST avait modifié de façon substantielle les conditions d'exécution du contrat d'agent commercial en empêchant la société SMC de garder contact avec la clientèle, une fois le contrat de vente signé sans préciser, ni indiquer la source de l'obligation contractuelle de la GEOXIA OUEST lui imposant de permettre à la société SMC de garder contact avec les clients et d'avoir accès à leur dossier après la signature du contrat, cependant que les stipulations claires et précises de celui-ci impliquaient au contraire qu'aucun rôle de suivi de chantier auprès de la clientèle n'avait été contractuellement confié à la société SMC, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, l'article L. 134-1 du Code de commerce définit l'agent commercial comme un mandataire qui, à titre de profession indépendante, sans être lié par un contrat de louage de services, est chargé, de façon permanente, de négocier et, éventuellement, de conclure des contrats de vente, d'achat, de location ou de prestation de services, au nom et pour le compte de producteurs, d'industriels, de commerçants ou d'autres agents commerciaux ; que l'article L. 134-4, alinéa 3, du même code fait obligation au mandant de « mettre l'agent commercial en mesure d'exécuter son mandat » ; qu'il ressort de ces textes que l'activité de l'agent commercial, que le mandant a l'obligation de favoriser, consiste à « négocier », et éventuellement à « conclure », différents types de contrats au nom de ce dernier ; qu'en retenant cependant en l'espèce que l'exercice par la société SMC de son activité d'agent commercial supposait que la société GEOXIA OUEST lui permette de garder contact avec la clientèle après la conclusion du contrat, la Cour d'appel a violé les textes susvisés ;
ALORS QU'ENFIN, subsidiairement, à supposer même que la mission de la société SMC ait subi quelques modifications, seules les modifications unilatérales substantielles apportées par le mandant à la mission du mandataire peuvent lui être imputées à faute ; que la modification d'un aspect très accessoire de l'activité de l'agent commercial, n'entrainant ni réduction de son secteur de prospection, ni diminution de son droit à commission, ni perte de qualité des produits commercialisés, ne peut être qualifiée de modification substantielle de nature à engager la responsabilité contractuelle du mandant ; qu'en qualifiant en l'espèce de modification « substantielle » ce qui n'était, au plus, qu'une réorganisation interne de l'activité propre de la société GEOXIA OUEST, à savoir le suivi des chantiers, et tout au plus une modification très accessoire de la mission de son agent commercial, la Cour d'appel a violé les articles L. 134-1 et L. 134-4, alinéa 3, du Code de commerce. Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Ghestin, avocat aux Conseils, pour la société SMC et M. X..., ès qualités.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société SMC de sa demande en paiement de dommages et intérêts d'un montant de 370. 878 ¿, à l'encontre de la société GEOXIA OUEST ;
AUX MOTIFS QUE le 20 décembre 1999, M. Stéphane D... et la société MAISONS AURA ont conclu un contrat d'agent commercial, par lequel la seconde confiait au premier la prospection, sans exclusivité, de la clientèle désirant faire construire pour son propre compte une maison individuelle dont la construction sera implantée dans la région de SABLE SUR SARTHE ; que ce contrat a fait l'objet de plusieurs avenants ; qu'en 2008, consécutivement au rachat de la société MAISON AURA par la société GEOXIA OUEST ; qu'en 2009, substituant à M. Stéphane D... la SARL SMC représentée par son gérant, M. Bernard D... et ayant pour associés M. Bernard D... et MM. Stéphane et Julien D..., ses deux fils ; que par lettre du 15 février 2010, de M. C..., la société GEOXIA OUEST a demandé à la société SMC de diriger les clients la contactant pour les questions liées au suivi d'un chantier vers le siège de GEOXIA OUEST (cf. arrêt, p. 11) ; que par une lettre recommandée de leur conseil du 17 février 2010, la SMC et quatre autres agents commerciaux de l'enseigne avaient dénoncé à la société GEOXIA OUEST son incapacité à assurer de façon satisfaisante le suivi des dossiers, des retards importants, son engagement dans une politique commerciale incohérente caractérisée par une baisse de la qualité et une suppression de prestations, la délégation du suivi technique à des personnes incompétentes, l'ouverture d'une nouvelle agence sur SAINTBRIEUX au mépris des investissements importants effectués par certains de ses agents, la marginalisation des agents commerciaux qui assuraient jusqu'alors un suivi de la clientèle jusqu'à la réception des travaux, dorénavant coupés de la clientèle dès la signature du contrat, la mise en place de manoeuvres caractéristiques du délit de tromperie sur la chose vendue et par voie de conséquent avaient informé la société GEOXIA OUEST de la saisine, très prochaine, du juge pour faire constater la rupture de leur contrat d'agent commercial, de même que celle de la DGCCRF (cf. arrêt, p. 2) ; que par courrier du 15 mars 2010, la société GEOXIA OUEST a contesté ces griefs et a fourni les relevés de commissions qu'avaient réclamés les différents agents commerciaux (cf. arrêt, p. 2) ; qu'autorisée par ordonnance sur requête du 16 décembre 2010, la société GEOXIA OUEST a fait constater le 27 janvier 2011, que MM. Stéphane et Julien D... travaillaient pour la société MAISON France CONFORT, l'un de ses concurrents (cf. arrêt, p. 2) ; qu'entretemps par courrier officiel du 20 janvier 2011, la société SMC avait réclamé un relevé conforme de la totalité des commissions versées, et par télécopie du 24 janvier 2011, la société GEOXIA OUEST s'engageait à fournir ce relevé rectifié, compte tenu de « petites erreurs » (cf. arrêt, p. 2) ; que par courrier du 29 janvier 2011, la société GEOXIA OUEST a notifié à la société SMC la résiliation, à effet immédiat, du contrat d'agent commercial, pour faute grave et a fait procéder à la récupération de tous les matériels et documents nécessaires à l'exécution du mandat (cf. arrêt, p. 2) ; que le fait que des associés de la société SMC soient salariés d'une entreprise concurrente ne constitue pas la prise par la société SCM, personne morale distincte des personnes physiques que sont ses associés, d'une représentation (cf. arrêt, p. 12) ; que la société SMC ne pouvait ignorer que deux de ses associés, disposant à eux deux de 74 sur 100 parts sociales de la société SMC, étaient également associés d'une entreprise entrant directement en concurrence avec la société GEOXIA OUEST ; que son devoir de loyauté vis à vis du mandant et le respect de l'article 2 b° de son contrat d'agent commercial lui imposaient d'avertir la société GEOXIA OUEST de cette situation ; que ce manquement constitue une faute entrainant la perte de confiance du mandant ; que la société SMC a produit aux débats des attestations de commerciaux MAISON AURA (GEOXIA OUEST) mentionnant avoir été informés par M. E... en 2010 pour l'un de ce que Julien et Stéphane D... ont quitté la société SCM pour aller travailler chez France CONFORT et pour l'autre en juillet 2010 du départ de Julien D... en juin 2010 ainsi que du prochain départ de Stéphane D... en septembre 2010 ; que M. E...atteste avoir été informé par M. Bernard D... alors qu'il était directeur d'exploitation des MAISONS AURA (GEOXIA OUEST) « du départ de Julien D... en juillet 2010 puis de Stéphane D... courant septembre 2010 à la concurrence chez France CONFORT à SABLE « ; qu'il convient de relever que la date d'entrée de Julien D... ne correspond pas aux propres déclarations de Stéphane D... au procès-verbal du 27 janvier 2011 ; que la société GEOXIA OUEST a appris cette situation à l'été ou à l'automne 2010 ; qu'il ne peut être déduit qu'elle ait toléré cette situation dès lors qu'il résulte de la chronologie des faits qu'elle exposés qu'elle s'est simplement attachée à s'assurer de l'existence de ses informations ; que la société SMC ne peut se prévaloir d'une tolérance par la société GEOXIA OUEST de la situation résultant de ce que deux de ses associés travaillaient pour la concurrence ; que la société GEOXIA OUEST a agi immédiatement lorsqu'à la suite du procèsverbal du 27 janvier 2011, elle a pu avoir la certitude que deux des associés de la société SMC étaient salariés d'une société concurrente ; que la société SMC ne justifie pas avoir informé la société GEOXIA OUEST de cette situation alors qu'elle y était contractuellement tenue ; que la lettre du 29 janvier 2011 19 mentionne expressément qu'il est reproché au mandataire d'avoir manqué à son obligation d'information du mandant et de loyauté à son égard (cf. arrêt, p. 12 et 13) ; que pour diverses raisons la société GEOXIA OUEST a réduit, voir supprimé l'accès de la société SMC aux dossiers des clients une fois le contrat de vente signé ; qu'il résulte ainsi notamment de la lettre de M. C... en date du 15 février 2010 qu'il était demandé à la société SMC de diriger la contactant pour des raisons de suivi des questions liées au suivi d'un chantier vers le siège de GEOXIA OUEST (cf. arrêt, p. 11) ; que selon la société SMC, s'agissant de maisons à construire, le maintien d'une information du client, tout au long du chantier, de l'avancement de ce dernier est un argument commercial déterminant, susceptible d'accroître et de maintenir la réputation du prestataire sur un secteur géographique donné ; que selon elle, c'est sa réputation de sérieux en la matière qui assurait sa notoriété et ses bons résultats de commercialisation ; que les attestations de Mme Y..., des Consorts Z... et A... et de M. B... vont en ce sens (cf. arrêt, p. 11) ; qu'au vu des circonstances et des fautes commises par la société GEOXIA OUEST dans le cadre de ses obligations contractuelles, le fait que la société SCM n'ait pas informé de façon officielle le mandant que deux de ses associés travaillaient pour la concurrence retire à cette faute la gravité suffisante permettant de justifier la rupture du contrat aux torts du mandataire sans droit à indemnité (cf. arrêt, p. 13) ; que la société SCM ne justifie pas d'un préjudice distinct de celui résultant de la perte de son contrat d'agent commercial (cf. arrêt, p. 13) ; qu'il y a lieu de la débouter de sa demande de dommages et intérêts supplémentaires (cf. arrêt, p. 13) ;
1/ ALORS QU'après avoir constaté que deux commerciaux de la société GEOXIA OUEST avaient attesté avoir été informés durant l'été 2010 par M. E... du départ de MM. Julien et Stéphane D... de la société SCM pour travailler pour un concurrent de la société GEOXIA OUEST (cf. arrêt, p. 12) et que M. E... luimême avait attesté avoir été informé durant l'été 2010 de ces départs aux mêmes fins (cf. arrêt, p. 13), la Cour d'appel aurait du rechercher, ainsi qu'elle y avait été invitée, si M. E... était alors « le directeur d'exploitation de la société MAISON AURA au sein de GEOXIA OUEST » circonstance « ignorée et passée sous silence par les premiers juges » (cf. conclusions, p. 9 et p. 12 à 17) ; qu'en s'abstenant de procéder à cette recherche, avant de considérer que la société SMC n'avait pas informé « de façon officielle » la société GEOXIA OUEST que deux de ses associés travaillaient pour la concurrence et de justifier dès lors la rupture du contrat d'agent commercial par un manquement de la société SMC au regard de son obligation de loyauté, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1147 du code civil ;
2/ ALORS DE PLUS QUE les dommages et intérêts susceptibles d'être alloués à un agent commercial à la suite de la faute dans l'exécution du contrat d'agence, réparent un préjudice distinct de celui réparé par l'indemnité compensatrice prévue par l'article L. 134-12 du Code de commerce qui, selon ce texte, résulte de la cessation des relations ; qu'après avoir constaté que la société GEOXIA OUEST avait manqué à ses obligations contractuelles en modifiant l'exécution du contrat le liant à son agent commercial, la cour d'appel devait rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si le mécontentement qui en était résulté pour la clientèle avait compromis la pérennité de l'exploitation de l'agence (cf. conclusions p. 18 et s. en particulier p. 33 et 34) ; qu'en considérant sans s'interroger sur ce préjudice, qu'il n'était pas justifié d'un préjudice distinct de celui de la perte du contrat d'agent commercial, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1147 du code civil ;
3/ ET ALORS QUE l'indemnité de préavis susceptible d'être allouée à l'agent commercial, répare la perte, pendant la durée du préavis, du droit de celui-ci de percevoir sa part de marché des produits du mandant qu'il a conquise ou maintenue ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt qu'en l'absence de toute faute grave, par courrier du 29 janvier 2011, la société GEOXIA OUEST a notifié à la société SMC la résiliation, à effet immédiat, de son contrat d'agent commercial, pour faute grave et a fait procéder à la récupération de tous les matériels et documents nécessaires à l'exécution du mandat (cf. arrêt, p. 2) ; qu'en déboutant la société SMC de sa demande en paiement de dommage et intérêts au titre de la rupture brutale du contrat d'agent commercial (cf. conclusions, p. 17), la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 13-24416
Date de la décision : 25/11/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 25 juin 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 25 nov. 2014, pourvoi n°13-24416


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Ghestin, SCP Hémery et Thomas-Raquin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.24416
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