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29/03/2023 | FRANCE | N°22-84267

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 29 mars 2023, 22-84267


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° Z 22-84.267 F-B

N° 00395

RB5
29 MARS 2023

CASSATION PAR VOIE DE RETRANCHEMENT SANS RENVOI
REJET

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 29 MARS 2023

M. [L] [T] et M. [I] [J] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'assises de Paris, spécialement composée,

en date du 13 juin 2022, qui, pour association de malfaiteurs terroriste en récidive, a condamné, le premier, à trente ans de ré...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° Z 22-84.267 F-B

N° 00395

RB5
29 MARS 2023

CASSATION PAR VOIE DE RETRANCHEMENT SANS RENVOI
REJET

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 29 MARS 2023

M. [L] [T] et M. [I] [J] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'assises de Paris, spécialement composée, en date du 13 juin 2022, qui, pour association de malfaiteurs terroriste en récidive, a condamné, le premier, à trente ans de réclusion criminelle et l'interdiction définitive du territoire français, le second, à trente ans de réclusion criminelle, et a ordonné une mesure de confiscation, et, le premier, contre l'arrêt du même jour par lequel la cour a prononcé sur les intérêts civils.

Les pourvois sont joints en raison de la connexité.

Des mémoires et des observations complémentaires ont été produits.

Sur le rapport de M. Turbeaux, conseiller, les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, avocat de M. [I] [J], les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de, M. [L] [T], et les conclusions de Mme Mathieu, avocat général, après débats en l'audience publique du 22 février 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Turbeaux, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Par ordonnance du 25 novembre 2019, les juges d'instruction ont ordonné la mise en accusation de sept personnes mises en examen, dont MM. [L] [T] et [I] [J], du chef d'association de malfaiteurs terroriste, et leur renvoi devant la cour d'assises de Paris spécialement composée.

3. Par arrêt du 9 avril 2021, cette cour d'assises a condamné ces deux accusés. Par arrêt du même jour, elle a déclaré recevables et fondées en leur principe les constitutions de partie civile de deux associations de victimes et a renvoyé l'examen de leurs demandes de dommages-intérêts devant la juridiction spécialisée du tribunal judiciaire de Paris.

4. MM. [T], [J] et le ministère public ont formé appel contre l'arrêt pénal, le premier a de plus relevé appel de l'arrêt civil.

Examen des moyens

Sur le moyen proposé pour M. [J], le premier et le troisième moyens proposés pour M. [T]

5. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission des pourvois au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Sur le deuxième moyen proposé pour M. [T]

Enoncé du moyen

6. Le moyen critique l'arrêt civil attaqué en ce qu'il a déclaré recevables les constitutions de partie civile de l'[1] et de la [2], a déclaré fondées en leur principe lesdites constitutions de partie civile, et a renvoyé l'examen des demandes indemnitaires présentées par l'[1] et de la [2] contre lui devant la juridiction civile compétente par application de l'article L. 217-6 du code de l'organisation judiciaire, à savoir la juridiction spécialisée pour l'indemnisation des victimes d'actes de terrorisme (JIVAT) du tribunal judiciaire de Paris, alors :

« 1°/ que l'action civile portant sur une infraction qui constitue un acte de terrorisme tendant à la réparation du dommage causé par cette infraction ne peut être exercée que devant une juridiction civile, séparément de l'action publique ; qu'en déclarant recevable et fondée en son principe la constitution de partie civile de l'association française des victimes de terrorisme contre M. [T], qui tendait à la réparation du dommage causé par une infraction constituant un acte de terrorisme, la cour d'assises a méconnu les articles L. 217-6 du code de l'organisation judiciaire et 706-16-1 du code de procédure pénale ;

2°/ que l'action civile portant sur une infraction qui constitue un acte de terrorisme tendant à la réparation du dommage causé par cette infraction ne peut être exercée que devant une juridiction civile, séparément de l'action publique ; qu'en déclarant recevable et fondée en son principe la constitution de partie civile de la [2] contre M. [T], qui tendait à la réparation du dommage causé par une infraction constituant un acte de terrorisme, la cour d'assises a méconnu les articles L. 217-6 du code de l'organisation judiciaire et 706-16-1 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 706-16-1 du code de procédure pénale :

7. Selon cet article, lorsqu'elle est exercée devant les juridictions répressives, l'action civile portant sur une infraction qui constitue un acte terroriste ne peut avoir pour objet que de mettre en mouvement ou de soutenir l'action publique, sans pouvoir tendre à la réparation du dommage causé par l'infraction.

8. L'action civile ne peut être exercée que devant la juridiction civile, séparément de l'action publique, l'article 5 du code de procédure pénale n'étant pas applicable.

9. Si elle est saisie d'une demande d'indemnisation, la juridiction répressive doit renvoyer l'affaire, par une décision non susceptible de recours, devant la juridiction civile compétente en application de l'article L. 217-6 du code de l'organisation judiciaire, lequel donne compétence exclusive au tribunal judiciaire de Paris pour connaître des demandes indemnitaires, après saisine du [3].

10. L'arrêt civil attaqué, après avoir déclaré recevables les constitutions de partie civile de l'[1] et de la [2], les a jugées fondées en leur principe.

11. En se déterminant ainsi, la cour d'assises spécialement composée, à laquelle il appartenait seulement, au constat que des demandes de réparation étaient présentées par les parties civiles, de les déclarer recevables et de renvoyer l'affaire devant le tribunal judiciaire de Paris, compétent en application de l'article précité du code de l'organisation judiciaire, a méconnu le texte susvisé.

12. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.

Portée et conséquences de la cassation

13. La cassation ne concerne que l'arrêt civil. Les dispositions ce cet arrêt qui ont déclaré recevables les demandes des parties civiles et ordonné le renvoi de l'examen des demandes de dommages-intérêts devant la juridiction spécialisée pour l'indemnisation des victimes d'actes de terrorisme du tribunal judiciaire de Paris seront maintenues.

14. La cassation aura lieu par voie de retranchement et sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

Sur le pourvoi formé par M. [I] [J] :

Le REJETTE ;

Sur le pourvoi formé par M. [L] [T] :

CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement, l'arrêt civil susvisé de la cour d'assises de Paris, spécialement composée, en date du 13 juin 2022, mais en ses seules dispositions ayant déclaré les demandes de réparation formées par l'[1] et la [2] fondées en leur principe, toutes autres dispositions ainsi que celles de l'arrêt pénal du même jour étant expressément maintenues ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'assises de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt civil partiellement annulé.

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf mars deux mille vingt-trois.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 22-84267
Date de la décision : 29/03/2023
Sens de l'arrêt : Cassation par voie de retranchement sans renvoi
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

ACTION CIVILE - Partie civile - Constitution - Actes de terrorisme - Office du juge - Recevabilité - Renvoi devant le tribunal judiciaire de Paris

Il résulte de l'article 706-16-1 du code de procédure pénale que la cour d'assises spécialement composée doit, après qu'elle a déclaré recevables les demandes de réparation présentées par les parties civiles, renvoyer l'affaire devant le tribunal judiciaire de Paris, en application de l'article L. 217-6 du code de l'organisation judiciaire. Méconnaît ces dispositions la cour d'assises qui déclare en outre une constitution de partie civile fondée en son principe


Références :

Article 706-16-1 du code de procédure pénale

article L. 217-6 du code de l'organisation judiciaire.

Décision attaquée : Cour d'assises de Paris, 13 juin 2022

Sur le rôle du juge pour statuer sur la recevabilité d'une constitution de partie civile dont la réparation échappe à sa compétence, à rapprocher :Crim., 30 octobre 2006, pourvoi n° 05-86997, Bull. crim. 2006, n° 257 (cassation partielle)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 29 mar. 2023, pourvoi n°22-84267, Bull. crim.
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle

Composition du Tribunal
Président : M. Bonnal
Avocat(s) : SCP Nicolaý, de Lanouvelle, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:22.84267
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