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20/06/1996 | FRANCE | N°94-83382

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 20 juin 1996, 94-83382


REJET du pourvoi formé par :
- l'administration des Douanes et droits indirects, partie poursuivante,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 9e chambre, du 24 mai 1994, qui l'a déboutée de ses demandes après avoir relaxé Kenneth X... du chef du délit réputé importation sans déclaration de marchandises prohibées.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 336, 426, § 4, 414 du Code des douanes, 25 de la convention de Lomé III, 26 de la convention de Lomé IV, 593 du Code de

procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'a...

REJET du pourvoi formé par :
- l'administration des Douanes et droits indirects, partie poursuivante,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 9e chambre, du 24 mai 1994, qui l'a déboutée de ses demandes après avoir relaxé Kenneth X... du chef du délit réputé importation sans déclaration de marchandises prohibées.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 336, 426, § 4, 414 du Code des douanes, 25 de la convention de Lomé III, 26 de la convention de Lomé IV, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a relaxé le prévenu des fins de la poursuite ;
" aux motifs propres que l'administration des Douanes ne saurait, en cause d'appel, invoquer l'application d'un texte nouveau soit la convention dite de Lomé IV non en vigueur à la date des faits poursuivis ;
" et aux motifs adoptés que la contradiction apparue entre les mentions des documents douaniers et les résultats de l'enquête permettait à l'administration des Douanes de suspecter l'existence d'une fraude ; qu'il lui appartenait, en présence d'un doute quant à l'inexactitude des renseignements relatifs à l'origine réelle des marchandises en cause, de renvoyer les certificats EUR 1 à l'Etat exportateur afin qu'il effectue le contrôle et en porte les résultats à la connaissance des autorités douanières de l'Etat d'importation ; que faute de s'être conformée aux dispositions de l'article 25 de la convention de Lomé III, l'administration des Douanes ne peut mettre en cause la valeur probante des documents émis par le Lesotho ;
" alors qu'il résultait des déclarations de Kenneth X..., consignées dans les procès-verbaux de douane, et des factures produites par celui-ci que ce dernier a importé et mis à la consommation en France, en provenance du Lesotho, des vêtements, en suspension des droits de douane sous couvert de certificats EUR 1, fabriqués au Lesotho par une société américaine, à partir de "tissus" importés dans ce pays via l'Afrique du Sud puis des pays tiers (Taïwan, Japon, Hong Kong, les EUAN, et l'Afrique du Sud) ; qu'en vertu des accords CEE-ACP, le caractère de produits originaires n'est acquis que si les vêtements sont fabriqués à partie de "fils", ce qui n'était pas le cas, ainsi qu'il résultait des aveux du prévenu ; qu'il n'y avait donc aucun "doute" quant à l'inexactitude des mentions figurant sur les documents douaniers ; qu'en vertu de l'article 25 de la convention de Lomé III, les autorités douanières de l'Etat d'importation ne sont tenues de renvoyer les certificats EUR 1 aux autorités douanières de l'Etat d'exportation que si elles ont "des doutes fondés quant à l'authenticité du document ou quant à l'exactitude des renseignements relatifs à l'origine réelle de la marchandise en cause" ; qu'il s'ensuit qu'en relaxant le prévenu des fins de la poursuite aux motifs que l'Administration aurait dû mettre en oeuvre la procédure prévue à l'article 25 susvisé, bien qu'il n'eût aucun doute quant à l'existence d'une fraude et ce, au vu des factures et des déclarations du prévenu, la cour d'appel a violé les articles 336 du Code des douanes et 25 de la convention de Lomé III ;
" alors que, en tout état de cause, un texte nouveau non en vigueur au moment des faits, ne rétroagit pas s'il modifie les éléments constitutifs du délit ; qu'en l'espèce, ainsi que l'Administration l'avait fait valoir, la convention de Lomé IV ne modifie en rien les éléments constitutifs du délit douanier reproché au prévenu et s'est bornée à autoriser l'administration des Douanes à produire les résultats de constatations matérielles (article 26) ; qu'en déclarant que l'Administration ne pouvait invoquer en appel les dispositions de la convention de Lomé IV aux motifs qu'elle n'aurait pas été en vigueur au moment des faits, sans constater que les éléments constitutifs du délit douanier auraient été modifiés dans un sens défavorable au prévenu, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 426 du Code des douanes et des articles 1 et suivants de la convention de Lomé IV " ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 369-4 et 377 bis du Code des douanes, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a débouté l'Administration de sa demande en paiement des droits fraudés ;
" alors qu'en vertu de l'article 377 bis, alinéa 2, du Code des douanes modifié par l'article 36 de la loi de finances du 30 décembre 1991, applicable immédiatement aux instances en cours, même quand elle ne prononce aucune condamnation, la juridiction répressive est compétente pour se prononcer sur les dispositions de l'article 369-4 du Code des douanes ; qu'en refusant de condamner le prévenu, comme le demandait l'Administration, au paiement des droits et taxes éludés, la cour d'appel a violé les articles 377 bis et 369-4 du Code des douanes " ;
Les moyens étant réunis :
Attendu que Kenneth X... a importé du Lésotho, en 1987 et 1988, des vêtements de sport qu'il a déclarés comme originaires de cet Etat, ainsi que l'attestait les certificats d'origine accompagnant la marchandise, et comme bénéficiant à ce titre du régime d'exonération de droits à l'importation prévu par la convention de Lomé du 8 décembre 1984 ;
Qu'après avoir effectué le contrôle des déclarations d'importation, l'administration des Douanes a contesté que la marchandise ait pu bénéficier dudit régime préférentiel, les vêtements paraissant, au vu de documents obtenus du fabricant, avoir été confectionnés au Lesotho, non à partir de fils tissés sur place, mais de tissus importés ;
Que de ce fait Kenneth X... a été cité directement, par l'administration des Douanes, devant la juridiction correctionnelle, sur le fondement de l'article 426.4° du Code des douanes, pour importation réalisée à l'aide de documents inapplicables, réputée faite sans déclaration, de marchandises prohibées ;
Attendu que, pour renvoyer le prévenu des fins de la poursuite, la cour d'appel énonce qu'en raison des doutes qu'elle avait eu quant à l'origine réelle des vêtements en cause, l'administration des Douanes française aurait dû retourner, à son homologue du Lésotho, les certificats d'origine " EUR 1 " délivrés lors de l'exportation de la marchandise et demander à celle-ci de s'assurer, au regard des conditions de fabrication de ces produits, de l'exactitude de ces documents et que faute, pour elle, de s'être conformée à cette procédure, prévue par la convention elle-même, la valeur probante de ces certificats, attestant une origine préférentielle, ne pouvait être remise en cause ;
Que les juges ajoutent que la partie poursuivante ne saurait invoquer, en outre, les dispositions prétendument plus souples de la 4e convention de Lomé, cette dernière n'étant pas en vigueur lors des importations contestées ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, la cour d'appel qui n'avait pas, en l'absence de fraude établie, à faire application des dispositions de l'article 377 bis, alinéa 2, du Code des douanes, a justifié sa décision ;
Qu'en effet, l'appréciation des éléments retenus, pour déterminer l'origine d'un produit et l'admission de celui-ci au régime préférentiel prévu par la convention de Lomé du 8 décembre 1984, relevant exclusivement de l'administration douanière de l'Etat exportateur du produit fini, toute contestation relative à l'origine de ce produit, élevée par les autorités du pays d'importation, implique la mise en oeuvre préalable de la procédure de contrôle a posteriori prévue par l'article 25 du protocole n°1 annexé à ladite convention ;
D'où il suit que les moyens doivent être écartés ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 94-83382
Date de la décision : 20/06/1996
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° COMMUNAUTES EUROPEENNES - Douanes - Importation de marchandises - Marchandises prohibées - Convention de Lomé III du 8 décembre 1984 - Contestation de l'origine préférentielle ACP - Procédure - Demande de contrôle a posteriori aux autorités douanières de l'Etat exportateur - Nécessité.

1° DOUANES - Importation sans déclaration - Marchandises - Marchandises prohibées - Poursuites sur le fondement de l'article 426 - 4° du Code des douanes - Contestation de certificats d'origine préférentielle EUR 1 - - Conditions.

1° L'appréciation des éléments retenus, pour déterminer l'origine d'un produit et l'admission de celui-ci au régime préférentiel prévu par la convention de Lomé du 8 décembre 1984, relevant exclusivement de l'administration douanière de l'Etat exportateur du produit fini(1), toute contestation relative à l'origine de ce produit, élevée par les autorités du pays d'importation, implique la mise en oeuvre préalable de la procédure de contrôle a posteriori prévue par l'article 25 du protocole n° 1 annexé à ladite convention. En l'absence d'un tel contrôle, la valeur probante des certificats d'origine préférentielle EUR 1, à l'aide desquels la marchandise est dédouanée, ne peut être remise en cause.

2° DOUANES - Peines - Paiement des sommes fraudées ou indûment obtenues - Condamnation - Condition.

2° Les dispositions de l'article 377 bis, alinéa 2, du Code des douanes qui prévoient que, même lorsqu'elle ne prononce aucune condamnation, la juridiction répressive reste compétente pour ordonner le paiement des sommes fraudées ou indûment obtenues ne trouvent pas à s'appliquer en l'absence de fraude établie ou d'avantages indûment perçus (2).


Références :

1° :
2° :
2° :
Code des douanes 336, 426 4°, 414
Code des douanes 377 bis, al. 2
Convention de Lomé III du 08 décembre 1984 art. 25

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 24 mai 1994

CONFER : (1°). (1) Cf. Cour de justice des Communautés européennes, 1984-07-12, affaire 218/83, Rec. 1984, p. 3105. Chambre commerciale, 1985-03-05, Bulletin 1985, IV, n° 83, p. 73 (cassation)

arrêt cité. CONFER : (2°). (2) A rapprocher : Chambre criminelle, 1993-06-14, Bulletin criminel 1993, n° 207 (4), p. 519 (rejet et cassation partielle sans renvoi).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 20 jui. 1996, pourvoi n°94-83382, Bull. crim. criminel 1996 N° 267 p. 802
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1996 N° 267 p. 802

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Culié, conseiller le plus ancien faisant fonction.
Avocat général : Avocat général : M. Le Foyer de Costil.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. de Mordant de Massiac.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Boré et Xavier, M. Bertrand.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1996:94.83382
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