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22/10/2004 | FRANCE | N°245154

France | France, Conseil d'État, Section du contentieux, 22 octobre 2004, 245154


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 avril 2002 et 30 avril 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Alain X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 13 mars 2002 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 4 février 1999 du tribunal administratif de Lille rejetant sa demande tendant d'abord à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 31 décembre 1984 par lequel le président du conseil général d

u Nord l'a titularisé en qualité d'ouvrier professionnel et non en qualité...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 avril 2002 et 30 avril 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Alain X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 13 mars 2002 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 4 février 1999 du tribunal administratif de Lille rejetant sa demande tendant d'abord à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 31 décembre 1984 par lequel le président du conseil général du Nord l'a titularisé en qualité d'ouvrier professionnel et non en qualité d'aide technique de laboratoire, ensuite à ce qu'il soit enjoint au président du conseil général de le reclasser en qualité d'aide technique de laboratoire à compter du 1er janvier 1985 et de reconstituer sa carrière et, enfin, à ce que le département du Nord soit condamné à réparer le préjudice qu'il a subi du fait de l'arrêté contesté ;

2°) statuant au fond, d'annuler le jugement du 4 février 1999, ensemble l'arrêté du 31 décembre 1984, d'enjoindre au président du conseil général de le reclasser en qualité d'aide technique de laboratoire à compter du 1er janvier 1985 et de condamner le département du Nord à réparer le préjudice qu'il estime avoir subi du fait de cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge du département du Nord la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive n° 77/187/CEE du Conseil du 14 février 1977 ;

Vu le code du travail, notamment son article L. 122-12 ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Edouard Crépey, Auditeur,

- les observations de la SCP Peignot, Garreau, avocat de M. X,

- les conclusions de M. Emmanuel Glaser, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par délibération du bureau de son conseil général en date du 17 décembre 1984, le département du Nord a décidé d'exploiter en régie les activités de lutte contre la tuberculose et de vaccination précédemment assurées pour son compte par la Ligue du Nord d'hygiène sociale, constituée sous la forme d'une association reconnue d'utilité publique ; qu'il a créé à cet effet vingt emplois budgétaires, afin de rendre possible la titularisation de ceux des agents employés par cette association qui souhaitaient continuer à exercer leurs fonctions au sein du département ; que, par arrêté du 31 décembre 1984, le président du conseil général du Nord a titularisé M. X, salarié de l'association, en qualité d'ouvrier professionnel de première classe ; que le tribunal administratif de Lille, par un jugement du 4 février 1999, puis la cour administrative d'appel de Douai, par un arrêt du 13 mars 2002, ont rejeté les conclusions de l'intéressé tendant, d'abord, à l'annulation dudit arrêté en tant qu'il n'avait pas procédé à sa titularisation comme aide technique de laboratoire, ensuite, à ce qu'il soit enjoint au département de le reclasser en cette qualité à compter du 1er janvier 1985 et de reconstituer sa carrière et, enfin, à ce que le département du Nord soit condamné à réparer le préjudice qu'il estime avoir subi du fait de cet arrêté ; que M. X se pourvoit en cassation contre cet arrêt ;

Considérant, en premier lieu, que l'article 3 de la directive n° 77/187/CEE du Conseil du 14 février 1977 impose, en cas de cession d'une entreprise, que les droits et obligations qui résultent pour le cédant de tout contrat de travail existant à la date du transfert soient transférés au cessionnaire ; qu'aux termes de l'article L. 122-12 du code du travail, qui doit être regardé comme transposant ces dispositions pour ce qui concerne les salariés de droit privé : (...) S'il survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise ; qu'il résulte de ces dispositions que, lorsque l'activité d'une entité économique employant des salariés de droit privé est reprise par une personne publique gérant un service public administratif, il appartient à cette dernière, en l'absence de dispositions législatives spécifiques, et réserve faite du cas où le transfert entraînerait un changement d'identité de l'entité transférée, soit de maintenir le contrat de droit privé des intéressés, soit de leur proposer un contrat de droit public reprenant les clauses substantielles de leur ancien contrat dans la mesure, ainsi que l'a jugé la Cour de justice des Communautés européennes dans son arrêt n° C-175/99 du 26 septembre 2000, où des dispositions législatives ou réglementaires n'y font pas obstacle ; que, dans cette dernière hypothèse, le refus des salariés d'accepter les modifications qui résulteraient de cette proposition implique leur licenciement par la personne publique, aux conditions prévues par le droit du travail et leur ancien contrat ; qu'en revanche, la garantie résultant des dispositions précitées ne peut être utilement invoquée à l'appui d'une contestation des conditions dans lesquelles la personne publique aurait procédé à leur titularisation dans un emploi, corps ou cadre d'emplois de la fonction publique ; que, par suite, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que l'article L. 122-12 du code du travail, interprété au regard de la directive du 14 février 1977, ne conférait à M. X aucun droit à être titularisé en qualité d'aide technique de laboratoire ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'en vertu de l'article 16 de la loi du 13 juillet 1983, les fonctionnaires ne peuvent être recrutés que par concours, sauf dérogation prévue par la loi ; qu'en l'absence d'une telle dérogation, M. X n'avait aucun droit à titularisation ; que, dès lors, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en écartant pour ce motif le moyen tiré par l'intéressé, au soutien de ses conclusions d'annulation, du caractère insuffisant de son grade et de sa rémunération, sans rechercher si le département s'était conformé aux règles qu'il aurait lui-même fixées pour la prise en compte des conditions d'emploi dont le requérant bénéficiait antérieurement ;

Considérant, en troisième et dernier lieu, que M. X n'avait, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, aucun droit à être titularisé ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire ni aucun principe général du droit n'imposent, lors d'une titularisation, la prise en compte de la situation et de la carrière antérieures de l'intéressé ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, il ne ressort pas des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le département du Nord se serait engagé à lui offrir une situation au moins aussi favorable ; qu'ainsi, la cour administrative d'appel de Douai a pu, sans dénaturer les faits, rejeter les conclusions indemnitaires de M. X au motif que le département du Nord n'avait pas commis de faute en ne tenant pas compte d'une promotion dont celui-ci aurait bénéficié dans son précédent emploi ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la somme demandée par M. X au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens soit mise à la charge du département du Nord, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Alain X, au département du Nord, au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales et au ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.


Synthèse
Formation : Section du contentieux
Numéro d'arrêt : 245154
Date de la décision : 22/10/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-04-04 FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - CHANGEMENT DE CADRES, RECLASSEMENTS, INTÉGRATIONS - INTÉGRATION DE PERSONNELS N'APPARTENANT PAS ANTÉRIEUREMENT À LA FONCTION PUBLIQUE - PERSONNE PRIVÉE EXERÇANT UNE ACTIVITÉ ÉCONOMIQUE ET LIÉE PAR CONTRAT À SON PERSONNEL SALARIÉ - REPRISE DE CETTE ACTIVITÉ PAR UNE PERSONNE MORALE DE DROIT PUBLIC - EFFETS DE LA REPRISE À L'ÉGARD DU PERSONNEL (ART. L. 122-2 DU CODE DU TRAVAIL) - OBLIGATIONS INCOMBANT À LA PERSONNE PUBLIQUE - A) POURSUITE DES LIENS CONTRACTUELS - EXISTENCE - CONDITIONS - PORTÉE [RJ1] - B) TITULARISATION DES PERSONNELS INTÉRESSÉS - ABSENCE - CONSÉQUENCE - INOPÉRANCE DU MOYEN DIRIGÉ CONTRE UNE TELLE TITULARISATION ET TIRÉ DE LA MÉCONNAISSANCE DE CES EFFETS.

36-04-04 a) Il résulte des dispositions de l'article L. 122-12 du code du travail, interprétées conformément aux objectifs poursuivis par les prévisions de l'article 3 de la directive n° 77/187/CEE du Conseil du 14 février 1977 dont elles assurent, pour ce qui concerne les salariés de droit privé, la transposition, que lorsque l'activité d'une entité économique employant des salariés de droit privé est reprise par une personne publique gérant un service public administratif, il appartient à cette dernière, en l'absence de dispositions législatives spécifiques, et réserve faite du cas où le transfert entraînerait un changement d'identité de l'entité transférée, soit de maintenir le contrat de droit privé des intéressés, soit de leur proposer un contrat de droit public reprenant les clauses substantielles de leur ancien contrat dans la mesure où des dispositions législatives ou réglementaires n'y font pas obstacle.... ...Dans cette dernière hypothèse, le refus des salariés d'accepter les modifications qui résulteraient de cette proposition implique leur licenciement par la personne publique, aux conditions prévues par le droit du travail et leur ancien contrat.,,b) En revanche, la garantie résultant des dispositions précitées ne peut être utilement invoquée à l'appui d'une contestation des conditions dans lesquelles la personne publique aurait procédé à leur titularisation dans un emploi, corps ou cadre d'emplois de la fonction publique.


Références :

[RJ1]

Rappr. CJCE, 26 septembre 2000, Mayeur c/ Association Promotion de l'information messine, aff. C-175/99 ;

TC, 19 janvier 2004, Mme Devun et autres c/ Commune de Saint-Chamond, n° 3393 ;

Comp. TC, 25 mars 1996, Préfet de la région Rhône-Alpes, Préfet du Rhône et autres c/ Conseil de prud'hommes de Lyon (arrêt dit Berkani), p. 535.


Publications
Proposition de citation : CE, 22 oct. 2004, n° 245154
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Genevois
Rapporteur ?: M. Edouard Crépey
Rapporteur public ?: M. Glaser
Avocat(s) : SCP PEIGNOT, GARREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:245154.20041022
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