Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 24 février 1995 et 21 juin 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Françoise X..., demeurant ... ; Mme X... demande que le Conseil d'Etat annule l'arrêt du 22 décembre 1994 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Versailles en date du 22 février 1994 et de l'arrêté du maire d'Orgerus en date du 30 juillet 1988 s'opposant à l'exécution de travaux sur un bâtiment agricole ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953, le décret n° 63-766 du 30 juillet 1963 modifié et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Lévy, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de Mme X... et de la SCP Tiffreau, Thouin-Palat, avocat de la commune d'Orgerus,
- les conclusions de Mme Daussun, Commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité de l'arrêt attaqué :
Considérant que, par un jugement du 22 février 1994, le tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de Mme X... tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 30 juillet 1988 par lequel le maire d'Orgerus a fait opposition à la réalisation de travaux sur un immeuble sis ..., aux motifs que Mme X... avait été régulièrement avisée du report du délai d'instruction à deux mois conformément à l'article R. 422-5 du code de l'urbanisme et que les travaux concernés par la déclaration nécessitaient un permis de construire en application de l'article L. 422-2 du même code ; que, saisie d'une requête dirigée contre ce jugement, la cour administrative d'appel de Paris, après avoir constaté qu'il n'était pas établi que Mme X... avait reçu notification du report du délai d'instruction de sa déclaration dans le mois suivant la date de son dépôt, le 7 juin 1988, a considéré que l'arrêté du 30 juillet 1988 attaqué devait s'analyser comme le retrait de la décision tacite de non opposition aux travaux déclarés intervenue le 7 juillet 1988 et que, cette dernière étant entachée d'illégalité, le maire avait pu légalement la retirer ;
Considérant, en premier lieu, que la cour, saisie de l'entier litige par l'effet dévolutif de l'appel, devait, après avoir, ainsi qu'il a été dit, requalifié la décision attaquée du maire d'Orgerus, se prononcer sur les conclusions de Mme X... tendant à son annulation et sur les moyens qu'elle avait invoqués à cette fin ; qu'en écartant ces conclusions, elle n'a pu, dès lors, statuer au-delà du litige dont elle était saisie ;
Considérant, en second lieu, qu'il appartient au juge de l'excès de pouvoir de donner aux décisions administratives qui lui sont déférées leur exacte qualification ; qu'en jugeant que l'arrêté du maire d'Orgerus constituait le retrait d'une décision tacite de non opposition aux travaux déclarés, la cour n'a pas relevé d'office un moyen d'ordre public sur l'existence duquel elle aurait dû aviser les parties en application de l'article R. 153-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Sur le bien fondé de l'arrêt attaqué :
Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article R. 422-10 du code de l'urbanisme instituent une procédure de publication obligatoire des décisions tacites de non opposition à travaux ; que de telles décisions peuvent, dès lors, être retirées dans le délai de recours contentieux pour un motif tiré de leur illégalité ; qu'en l'absence d'accomplissement des formalités d'affichage prévues par l'article R. 422-10 susrappelé le délai du recours contentieux ouvert aux tiers pour contester la décision tacite de non opposition aux travaux déclarés par Mme X... n'a pas commencé à courir ; que Mme X... n'est, dans ces conditions, pas fondée à soutenir que le maire d'Orgerus se trouvait dessaisi le 7 juillet 1988 et qu'il ne lui était plus possible, après cette date, de revenir, même dans le délai du recours contentieux, sur sa décision tacite ; que l'arrêt attaqué n'est, par suite, entaché sur ce point d'aucune erreur de droit ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme : "Sous réserve des dispositions des articles L. 422-1 à L. 422-5 le permis de construire est exigé pour les travaux exécutés sur les constructions existantes, lorsqu'ils ont pour effet d'en changer la destination ( ...)" et qu'à ceux de l'article R. 422-2 du même code : "Sont exemptés de permis de construire ( ...) les constructions ou travaux n'ayant pas pour effet de changer la destination d'une construction existante et qui n'ont pas pour effet de créer une surface de plancher nouvelle ou qui ont pour effet de créer sur un terrain supportant déjà un bâtiment une surface de plancher hors oeuvre brute inférieure ou égale à 20 mètres carrés" ;
Considérant que Mme X... a déposé à la mairie d'Orgerus une déclaration de travaux portant sur la "modification de façade d'un bâtiment agricole, le remplacement de deux chassis briques de verre par deux fenêtres et l'ouverture d'une porte en façade Sud Est" ; qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier soumis aux juges du fond que le bâtiment dont il s'agit fût effectivement en état d'habitabilité avant la réalisation des travaux faisant l'objet de la déclaration, alors même qu'il était en fait occupé par deux ouvriers agricoles ; qu'après avoir relevé qu'il résultait de l'instruction que les travaux déclarés avaient pour effet de rendre habitable un bâtiment à usage agricole la cour en a déduit que de tels travaux avaient pour effet de changer la destination de la construction sur laquelle ils devaient être réalisés et n'étaient en conséquence pas exemptés de permis de construire ; qu'en relevant, comme elle l'a fait, que les travaux déclarés avaient pour effet de rendre le bâtiment habitable la cour ne s'est pas fondée sur des constatations entachées d'inexactitude matérielle ; qu'en l'état des faits constatés qu'elle a souverainement appréciés sans les dénaturer la cour a pu légalement considérer que les travaux avaient pour effet de changer la destination de la construction ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X... n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que la commune d'Orgerus, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à payer à Mme X... une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de Mme X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Françoise X..., à la commune d'Orgerus et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.