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07/05/2003 | FRANCE | N°246899

France | France, Conseil d'État, 2eme et 1ere sous-sections reunies, 07 mai 2003, 246899


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 et 28 mai 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'INSTITUT NATIONAL DES APPELLATIONS D'ORIGINE, dont le siège est 138, avenue des Champs-Elysées, Paris (75008) ; l'INSTITUT NATIONAL DES APPELLATIONS D'ORIGINE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 26 avril 2002 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux, faisant droit à la demande de M. Michel X, a suspendu l'exécution de la décision du 4 février 2002 par laquelle ledit

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Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 et 28 mai 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'INSTITUT NATIONAL DES APPELLATIONS D'ORIGINE, dont le siège est 138, avenue des Champs-Elysées, Paris (75008) ; l'INSTITUT NATIONAL DES APPELLATIONS D'ORIGINE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 26 avril 2002 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux, faisant droit à la demande de M. Michel X, a suspendu l'exécution de la décision du 4 février 2002 par laquelle ledit établissement a refusé d'accorder l'agrément Saint-Emilion à un lot de vin de 30 hectolitres et 38 litres présenté par M. X ;

2°) de rejeter la requête en référé de M. X ;

3°) de condamner M. X à verser à l'INSTITUT NATIONAL DES APPELLATIONS D'ORIGINE la somme de 2 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le décret n° 74-871 du 19 octobre 1974 ;

Vu l'arrêté du 20 novembre 1974 relatif aux examens analytique et organoleptique des vins à appellation d'origine contrôlée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Imbert-Quaretta, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Parmentier, Didier, avocat de l'INSTITUT NATIONAL DES APPELLATIONS D'ORIGINE et de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. X,

- les conclusions de Mme Prada Bordenave, Commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions à fins de non-lieu :

Considérant que la circonstance que le juge des référés, saisi d'une demande de l'INSTITUT NATIONAL DES APPELLATIONS D'ORIGINE, ait refusé, par une ordonnance du 22 juillet 2002, de mettre fin à la suspension décidée par ordonnance du 26 avril 2002, objet du présent pourvoi, n'a pas pour effet de rendre celui-ci sans objet ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'ordonnance attaquée :

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ;

En ce qui concerne l'urgence :

Considérant que la condition d'urgence à laquelle est subordonné le prononcé d'une mesure de suspension doit être regardée comme remplie lorsque la décision contestée préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à la situation du requérant et aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il en va ainsi, alors même que cette décision n'aurait un objet ou des répercussions que purement financiers et que, en cas d'annulation, ses effets pourraient être effacés par une réparation pécuniaire ; qu'il appartient au juge des référés, saisi d'une demande tendant à la suspension d'une telle décision, d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de celle-ci sur la situation de ce dernier ou, le cas échéant, des personnes concernées, sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue ;

Considérant que, pour estimer que la condition d'urgence était remplie, le juge des référés qui a relevé que le lot de vin présenté par l'intéressé à l'agrément de l'INSTITUT NATIONAL DES APPELLATIONS D'ORIGINE était en cours de commercialisation et que le refus d'agrément le privait de la possibilité de vendre ce lot sous l'appellation contrôlée saint-émilion, s'est livré à une appréciation souveraine des pièces du dossier et a suffisamment motivé sur ce point l'ordonnance attaquée ;

En ce qui concerne l'existence d'un doute sérieux sur la légalité de la décision :

Considérant qu'après avoir visé les mémoires produits, analysé les moyens invoqués devant lui et cité les dispositions en application desquelles il a statué, le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux a suffisamment motivé sa décision en relevant que, malgré la production par l'INSTITUT NATIONAL DES APPELLATIONS D'ORIGINE d'un règlement intérieur des vins d'appellation contrôlée saint-émilion et saint-émilion grand cru approuvé par le Comité national de l'INSTITUT NATIONAL DES APPELLATIONS D'ORIGINE le 17 mai 1989, le moyen tiré de ce que le règlement intérieur des vins d'appellations contrôlée saint-émilion et saint-émilion grand cru établi par le syndicat des viticulteurs intéressé le 30 avril 1999 n'avait pas été régulièrement approuvé par le Comité national de l'INSTITUT NATIONAL DES APPELLATIONS D'ORIGINE était de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision ; qu'en procédant ainsi, le juge des référés qui n'a pas commis d'erreur de droit, s'est livré à une appréciation souveraine des pièces du dossier qui, en l'absence de dénaturation, n'est pas susceptible d'être discutée devant le juge de cassation ;

En ce qui concerne l'injonction faite à l'INSTITUT NATIONAL DES APPELLATONS D'ORIGINE de faire procéder à un réexamen du lot de vin litigieux dans des conditions régulières dans un délai de 30 jours :

Considérant que s'il lui apparaît que la suspension qu'il ordonne implique nécessairement que l'auteur de la décision prenne une mesure dans un sens déterminé, le juge des référés, saisi de conclusions en ce sens lorsque la suspension d'une décision administrative à caractère exécutoire est demandée et de sa propre initiative dans le cas de décisions de rejet, peut assortir la mesure de suspension de l'indication des obligations provisoires qui en découleront pour l'administration ;

Considérant qu'ainsi le juge des référés n'a pas excédé sa compétence en assortissant, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative et à la demande de M. X, la suspension de la décision de refus d'agrément d'une injonction adressée à l'INSTITUT NATIONAL DES APPELLATIONS D'ORIGINE de faire procéder, dans des conditions régulières, à un nouvel examen du lot de vin en cause ;

Considérant qu'en fixant ce délai à trente jours et en ne l'assortissant pas du prononcé d'une astreinte, le juge des référés s'est livré à une appréciation souveraine, exempte de contradiction de motifs, des contraintes auxquelles l'INSTITUT NATIONAL DES APPELLATIONS D'ORIGINE était confronté pour exécuter l'injonction prononcée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'INSTITUT NATIONAL DES APPELLATIONS D'ORIGINE n'est pas fondé à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée ;

Sur les conclusions incidentes de M. X tendant à ce que l'injonction faite à l'INSTITUT NATIONAL DES APPELLATIONS D'ORIGINE soit assortie d'une astreinte de 100 euros par jour :

Considérant que M. X n'est pas recevable à demander pour la première fois devant le Conseil d'Etat, juge de cassation, que l'injonction faite à l'INSTITUT NATIONAL DES APPELLATIONS D'ORIGINE soit assortie d'une astreinte ; que sa demande doit, par suite, être rejetée ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, d'une part, que ces dispositions font obstacle à ce que M. X, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à l'INSTITUT NATIONAL DES APPELLATIONS D'ORIGINE la somme que demande celui-ci au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Considérant, d'autre part, que M. X a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. X, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de condamner l'INSTITUT NATIONAL DES APPELLATIONS D'ORIGINE à payer à la SCP Waquet, Farge, Hazan la somme de 2 300 euros ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de l'INSTITUT NATIONAL DES APPELLATIONS D'ORIGINE est rejetée.

Article 2 : L'INSTITUT NATIONAL DES APPELLATIONS D'ORIGINE versera à la SCP Waquet, Farge, Hazan une somme de 2 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de M. X est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'INSTITUT NATIONAL DES APPELLATIONS D'ORIGINE, à M. Michel X et au ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.


Synthèse
Formation : 2eme et 1ere sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 246899
Date de la décision : 07/05/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 07 mai. 2003, n° 246899
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Robineau
Rapporteur ?: Mme Mireille Imbert-Quaretta
Rapporteur public ?: Mme Prada Bordenave
Avocat(s) : SCP PARMENTIER, DIDIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:246899.20030507
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