Vu la requête, enregistrée le 8 août 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 11 mai 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 26 octobre 2000 décidant la reconduite à la frontière de Mme Erlinda X ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme X devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Pierre-François Mourier, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Pierre Collin, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la notification du refus ou du retrait (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X, ressortissante philippine née en 1948, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 12 juillet 2000, de l'arrêté du 4 juillet 2000 par lequel le PREFET DE POLICE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'elle se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, Mme X a fait valoir qu'elle séjournait habituellement en France depuis plus de dix ans et qu'elle entrait dès lors dans les prévisions du 3°) de l'article 12 bis de l'ordonnance précitée au titre duquel une carte de séjour est délivrée de plein droit ; que les pièces qu'elle produit, avant l'année 1994 sont toutefois insuffisantes pour établir une résidence habituelle sur le territoire depuis plus de dix ans ; qu'ainsi, à la date de l'arrêté attaqué, elle ne justifiait pas résider habituellement en France depuis plus de dix ans ; que c'est, dès lors, à tort que, pour annuler l'arrêté attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur ce qu'il méconnaissait les dispositions de l'article 12 bis 3°) de l'ordonnance précitée ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme X devant le tribunal administratif de Paris et devant le Conseil d'Etat ;
Considérant que Mme X vit seule en France ; qu'elle n'est pas sans attache dans son pays d'origine où vivent son mari et son enfant ; que compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté attaqué, à la date à laquelle il a été pris, ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant que si Mme X invoque à l'appui des conclusions de sa requête dirigée contre la décision fixant les Philippines comme pays de destination, la violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en faisant état de la situation politique aux Philippines et de risques personnels qu'elle pourrait encourir à son retour dans ce pays, elle ne produit aucun élément précis permettant d'apprécier le bien-fondé de ce moyen ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé sa décision du 26 octobre 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement en date du 11 mai 2001 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme X devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE et à Mme Erlinda X.