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05/07/2006 | FRANCE | N°271244

France | France, Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 05 juillet 2006, 271244


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 16 août et 15 décembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Adama A, demeurant ... ; Mme BOULANGER-DUFOUR demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 1er juin 2004 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant d'une part à l'annulation du jugement du 13 janvier 2000 du tribunal administratif de Paris ayant rejeté sa demande d'annulation de la décision du 25 novembre 1993 du directeur du centre hospitalier Sainte-Anne refusant

de l'installer dans ses fonctions de praticien hospitalier à temps pa...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 16 août et 15 décembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Adama A, demeurant ... ; Mme BOULANGER-DUFOUR demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 1er juin 2004 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant d'une part à l'annulation du jugement du 13 janvier 2000 du tribunal administratif de Paris ayant rejeté sa demande d'annulation de la décision du 25 novembre 1993 du directeur du centre hospitalier Sainte-Anne refusant de l'installer dans ses fonctions de praticien hospitalier à temps partiel et de la décision implicite de rejet de son recours gracieux du 6 décembre 1993 et d'autre part à la condamnation du centre hospitalier au paiement de la somme de 12000 francs au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

2°) statuant au fond, d'annuler le jugement du 13 janvier 2000 du tribunal administratif de Paris et la décision du 25 novembre 1993 du directeur du centre hospitalier Sainte-Anne ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier Sainte-Anne la somme de 3000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu le décret n° 85-384 du 29 mars 1985 portant statut des praticiens exerçant leur activité à temps partiel dans les établissements d'hospitalisation publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Stéphane Hoynck, Auditeur,

- les observations de la SCP Richard, avocat de Mme A et de Me Le Prado, avocat du centre hospitalier Sainte-Anne,

- les conclusions de M. Mattias Guyomar, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant que l'article L. 714-4 du code de la santé publique, dans sa rédaction applicable à l'époque des faits, énumère les différentes matières sur lesquelles délibère le conseil d'administration d'un centre hospitalier ; que relèvent du 5° de cet article « les créations, suppressions, transformations de structures médicales (...) » ; que relèvent du 6° notamment les emplois de praticiens hospitaliers à temps partiel ; qu'en vertu de l'article L. 714-5 du même code, les délibérations prévues au 5° de l'article L. 714-4 sont exécutoires de plein droit dès leur réception par le représentant de l'Etat, et celles prévues au 6° sont soumises à l'approbation du représentant de l'Etat et sont réputées approuvées si celui-ci n'a pas fait connaître son opposition dans un délai de trente jours ; qu'aux termes de l'article L. 714-12 : « le directeur (...) est chargé de l'exécution des décisions du conseil d'administration et met en oeuvre la politique définie par ce dernier et approuvée par le représentant de l'Etat » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par arrêté du préfet d'Ile de France en date du 26 octobre 1993, Mme A a été nommée au poste de praticien hospitalier à temps partiel du service de chirurgie du centre hospitalier Saint-Anne qui avait été déclaré vacant par publication au Journal officiel du 14 avril 1993 ; que par une délibération du 28 octobre 1993, le conseil d'administration du centre hospitalier Saint-Anne a notamment décidé la suppression d'un poste de praticien hospitalier à temps partiel au service de chirurgie ; que par une décision du 25 novembre 1993, le directeur du centre hospitalier a rejeté la demande d'installation présentée par la requérante, au motif que ce poste avait été supprimé par la délibération en cause, et qu'il était tenu d'appliquer cette délibération ;

Considérant que la délibération en cause, dès lors que la transformation de structures médicales comportait la suppression d'un emploi de praticien hospitalier à temps partiel, relevait, comme le soutenait la requérante devant les juges du fond, du 6° de l'article L. 714-4 du code de la santé publique et n'était exécutoire qu'un mois après sa notification au représentant de l'Etat, soit postérieurement à la décision du directeur refusant d'installer la requérante ; qu'en estimant que le directeur était tenu, en application de l'article L. 714-12, de mettre en oeuvre la délibération du 28 octobre 1993 supprimant le poste sur lequel Mme A avait été nommée, au motif que cette délibération était devenue exécutoire de plein droit à compter du 2 novembre 1993, date de sa transmission au représentant de l'Etat, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit ; que l'arrêt attaqué doit, dès lors, être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au fond ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit plus haut, la délibération du centre hospitalier n'était en tout état de cause pas exécutoire lorsque le directeur a décidé de ne pas donner suite à l'arrêté de nomination de la requérante ;

Considérant qu'il incombe à l'ensemble des autorités administratives de tirer les conséquences légales d'un acte administratif aussi longtemps qu'il n'y a pas été mis fin ; qu'ainsi en l'espèce, le directeur ne peut utilement exciper de l'illégalité de l'arrêté de nomination, dont il n'est pas contesté d'ailleurs qu'il soit devenu définitif ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens présentés devant les premiers juges, que le directeur du centre hospitalier était tenu de donner suite à l'arrêté de nomination de Mme A ; que la requérante est donc fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du directeur du centre hospitalier Saint-Anne refusant sont installation ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la requérante, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement au centre hospitalier Saint-Anne de la somme de 2400 euros qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier Sainte-Anne une somme de 4800 euros au titre des frais exposés par Mme A devant la cour administrative d'appel et le Conseil d'Etat et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 1er juin 2004 et le jugement du tribunal administratif de Paris du 13 janvier 2000 sont annulés.

Article 2 : La décision du directeur du centre hospitalier Saint-Anne du 25 novembre 1993 est annulée.

Article 3 : Le centre hospitalier Saint-Anne versera à Mme A une somme de 4 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions du centre hospitalier Saint-Anne tendant à ce qu'il soit fait application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5: La présente décision sera notifiée à Mme Adama A, au ministre de la santé et des solidarités et au centre hospitalier Sainte-Anne.


Synthèse
Formation : 6ème et 1ère sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 271244
Date de la décision : 05/07/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 05 jui. 2006, n° 271244
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Stéphane Hoynck
Rapporteur public ?: M. Guyomar
Avocat(s) : SCP RICHARD ; LE PRADO

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:271244.20060705
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