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16/04/2010 | FRANCE | N°322711

France | France, Conseil d'État, 4ème et 5ème sous-sections réunies, 16 avril 2010, 322711


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 novembre 2008 et 25 février 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SCI DU BASTAN, dont le siège est 1565, chemin du Jouliou à Roques-sur-Garonne (31120) ; la SCI DU BASTAN demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 10 juin 2008 par laquelle la commission nationale d'équipement commercial a accordé à la société Leroy Merlin France et à la SA Immobilière Leroy Merlin France l'autorisation préalable requise en vue de la création d'un magasin de bricola

ge, de jardinage et de décoration de la maison de 15 200 m² de surface de ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 novembre 2008 et 25 février 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SCI DU BASTAN, dont le siège est 1565, chemin du Jouliou à Roques-sur-Garonne (31120) ; la SCI DU BASTAN demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 10 juin 2008 par laquelle la commission nationale d'équipement commercial a accordé à la société Leroy Merlin France et à la SA Immobilière Leroy Merlin France l'autorisation préalable requise en vue de la création d'un magasin de bricolage, de jardinage et de décoration de la maison de 15 200 m² de surface de vente à l'enseigne Leroy Merlin France à Roques-sur-Garonne (Haute-Garonne) ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de commerce ;

Vu la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Francine Mariani-Ducray, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Delvolvé, Delvolvé, avocat de la SCI DU BASTAN et de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la société Leroy Merlin France et de la société L'immobilière Leroy Merlin France,

- les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public,

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Delvolvé, Delvolvé, avocat de la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE DU BASTAN et à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la société Leroy Merlin France et de la société L'immobilière Leroy Merlin France ;

Considérant que, par la décision attaquée du 10 juin 2008, la commission nationale d'équipement commercial a accordé à la société Leroy Merlin France et à la SA L'Immobilière Leroy Merlin France l'autorisation préalable requise en vue de la création d'un magasin de bricolage, de jardinage et de décoration de la maison de 15 200 m² de surface de vente à l'enseigne Leroy Merlin France à Roques-sur-Garonne (Haute-Garonne) ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la société Leroy Merlin France et la SA L'Immobilière Leroy Merlin France ;

Considérant que l'annulation, par une décision du 9 juillet 2007 du Conseil d'Etat statuant au contentieux, de l'autorisation qui avait été accordée aux sociétés Leroy Merlin France et L'Immobilière Leroy Merlin France, par une décision du 20 décembre 2005 de la commission nationale d'équipement commercial, en vue de la création du même magasin, a eu pour effet de ressaisir cette commission de la demande d'autorisation présentée par ces sociétés ; qu'il lui appartenait, contrairement à ce que soutient la société requérante, de procéder, notamment par le moyen d'une nouvelle enquête publique, à une nouvelle instruction ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la décision attaquée a été prise compte tenu de l'évolution des circonstances de fait, notamment des données démographiques et des données sur l'emploi intervenues depuis la décision du 20 décembre 2005 ; que, dès lors, le moyen tiré d'une méconnaissance de l'autorité de la chose jugée par la décision du Conseil d'Etat mentionnée ci-dessus ne peut être accueilli ;

Considérant que, pour l'application des dispositions combinées de l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973 et des articles L. 752-1 et L. 752-3 du code de commerce, dans leur rédaction applicable en l'espèce, il appartient aux commissions d'équipement commercial, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, d'apprécier si un projet soumis à autorisation est de nature à compromettre, dans la zone de chalandise intéressée, l'équilibre recherché par le législateur entre les diverses formes de commerce et, dans l'affirmative, de rechercher si cet inconvénient est compensé par les effets positifs du projet appréciés, d'une part, en tenant compte de sa contribution à l'emploi, à l'aménagement du territoire, à la concurrence, à la modernisation des équipements commerciaux et, plus généralement, à la satisfaction des besoins des consommateurs et, d'autre part, en évaluant son impact sur les conditions de circulation et de stationnement aux abords du site envisagé ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la commission nationale d'équipement commercial a pu, sans erreur de fait, estimer, compte tenu du dynamisme démographique de la zone de chalandise avéré plus de deux ans après la décision du 20 décembre 2005, que les densités commerciales du secteur du bricolage, du jardinage et de la décoration n'excédaient que faiblement les moyennes nationale et départementale ; qu'elle a recherché si le déséquilibre entre les différentes formes de commerce résultant de ce dépassement était compensé par les effets positifs du projet ;

Considérant que, si la société requérante fait valoir, en ce qui concerne l'impact sur la concurrence, que le poids du groupe Leroy Merlin dans la zone de chalandise sera, après réalisation du projet, très supérieur au pourcentage de 20 % retenu par la commission nationale et que l'importance cumulée des groupes Leroy Merlin et Castorama sera portée, du fait des deux autorisations délivrées le même jour par la commission nationale d'équipement commercial, à plus de 80 % des surfaces de vente dans le même secteur, il ressort des pièces du dossier que la commission nationale a retenu que le groupe Leroy Merlin détiendrait moins de 20 % de la surface de vente totale des magasins de bricolage, de jardinage et de décoration de la maison, selon une définition qui inclut notamment les magasins de fleurs et jardinerie et les magasins d'équipement du foyer et de luminaires ; que l'équipement litigieux comporte des surfaces et références importantes dans les domaines de l'aménagement et de la décoration ; que l'emprise globale des groupes Castorama et Leroy Merlin s'élève, dans cette définition, à environ 35 % ; que, s'il n'est pas contesté que le nouveau magasin a pour effet d'accroître le poids de l'enseigne Leroy Merlin, la définition de ce périmètre d'activité par la commission pour son évaluation de l'effet du projet sur la concurrence n'est entachée ni d'erreur de droit, ni d'erreur de fait, ni d'erreur d'appréciation ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la baisse du chiffre d'affaires d'un magasin de plus de 300 m2, si elle n'a pas été mentionnée dans la décision attaquée, a été prise en compte par la commission nationale d'équipement commercial au cours de l'instruction de l'affaire ; que le moyen tiré de ce que la commission n'aurait pas apprécié l'impact prévisible du projet en cause sur l'équipement commercial existant dans ses différentes formes n'est pas fondé ; que l'effet sur l'emploi, positif à hauteur d'une centaine de créations nettes d'emplois, a été suffisamment examiné ; que par suite la requérante n'est pas fondée à soutenir que la commission nationale d'équipement commercial, qui n'a pas commis d'erreur de droit en donnant à ce critère, qui est au nombre des motifs d'intérêt général qu'elle devait prendre en compte, un rôle important dans son appréciation, aurait inexactement apprécié l'ensemble des effets du projet, au regard des dispositions législatives précitées, en estimant que ses effets positifs compensaient les déséquilibres pouvant résulter du dépassement des densités de référence constatés ;

Considérant, enfin, que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SCI DU BASTAN n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision attaquée et que ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent en conséquence qu'être rejetées ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application de ces dispositions, de mettre à sa charge la somme globale de 3 000 euros à verser conjointement aux sociétés Leroy Merlin France et L'Immobilière Leroy Merlin France ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la SCI DU BASTAN est rejetée.

Article 2 : La SCI DU BASTAN versera conjointement à la société Leroy Merlin France et à la société L'Immobilière Leroy Merlin France une somme globale de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SCI DU BASTAN, à la société Leroy Merlin France et à la société L'Immobilière Leroy Merlin France et à la commission nationale d'aménagement commercial.

Copie en sera adressée pour information à la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.


Synthèse
Formation : 4ème et 5ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 322711
Date de la décision : 16/04/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 16 avr. 2010, n° 322711
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: Mme Francine Mariani-Ducray
Rapporteur public ?: Mme Dumortier Gaëlle
Avocat(s) : SCP DELVOLVE, DELVOLVE ; SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:322711.20100416
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