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10/11/2023 | FRANCE | N°467645

France | France, Conseil d'État, 6ème - 5ème chambres réunies, 10 novembre 2023, 467645


Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 19 septembre 2022, 15 novembre 2022 et 28 février 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'ordre des avocats au barreau des Hauts-de-Seine et l'association des magistrats du tribunal judiciaire de Nanterre demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la note du garde des sceaux, ministre de la justice du 27 juillet 2022 relative à la localisation des emplois de magistrats et fonctionnaires des services judiciaire

s pour l'année 2022 ainsi que son annexe n° 1, en tant qu'elles concern...

Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 19 septembre 2022, 15 novembre 2022 et 28 février 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'ordre des avocats au barreau des Hauts-de-Seine et l'association des magistrats du tribunal judiciaire de Nanterre demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la note du garde des sceaux, ministre de la justice du 27 juillet 2022 relative à la localisation des emplois de magistrats et fonctionnaires des services judiciaires pour l'année 2022 ainsi que son annexe n° 1, en tant qu'elles concernent les créations de postes de magistrats au sein du tribunal judiciaire de Nanterre ;

2°) d'enjoindre à l'Etat d'affecter des postes de magistrats au tribunal judiciaire de Nanterre sur la base de critères objectifs et pertinents, tenant notamment compte de la nature des affaires soumises à cette juridiction et susceptibles de permettre le jugement des affaires dans un délai raisonnable ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son article 65 ;

- l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. David Gaudillère, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Nicolas Agnoux, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL cabinet Briard, avocat de l'association des magistrats du tribunal judiciaire de Nanterre ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 16 octobre 2023, présentée par l'ordre des avocats au barreau des Hauts-de-Seine ;

Considérant ce qui suit :

1. L'ordre des avocats au barreau des Hauts-de-Seine et l'association des magistrats du tribunal judiciaire de Nanterre demandent au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la note du garde des sceaux, ministre de la justice du 27 juillet 2022 relative à la localisation des emplois de magistrats et fonctionnaires des services judiciaires pour l'année 2022 ainsi que son annexe n° 1, en tant qu'elles concernent les postes de magistrats au sein du tribunal judiciaire de Nanterre.

2. Il ressort des pièces du dossier que la note attaquée, intitulée " circulaire de localisation des emplois ", constitue un document de programmation par lequel le garde des sceaux, ministre de la justice informe, chaque année, les chefs de juridictions et les procureurs généraux de la répartition envisagée, entre les juridictions judiciaires de métropole et d'outre-mer, des effectifs de magistrats du siège et du parquet ainsi que de fonctionnaires des services judiciaires prévus en loi de finances. Si, comme le font valoir les requérants, cette note constitue, pour l'administration, un outil annuel de gestion et de répartition prévisionnelle des effectifs de magistrats, les objectifs chiffrés qu'elle mentionne ne revêtent qu'un caractère indicatif, ce document n'ayant pas pour objet et ne pouvant avoir pour effet de lier le Président de la République dans l'exercice de son pouvoir de nomination individuelle des magistrats, dans les conditions prévues par l'article 65 de la Constitution et l'article 28 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature. Cette note, qui est dépourvue de caractère décisoire, ne saurait, eu égard à son objet et à sa portée, contrairement à ce que soutiennent les requérants, être regardée comme ayant, par elle-même, des effets sur les droits ou la situation des usagers du service public de la justice justifiant qu'elle puisse faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir.

3. La requête de l'ordre des avocats au barreau des Hauts-de-Seine et de l'association des magistrats du tribunal judiciaire de Nanterre doit par suite être rejetée comme irrecevable. Les interventions formées au soutien de cette requête par l'association " ACE-Avocats, ensemble ", le Syndicat des avocats de France (SAF), l'Union des jeunes avocats du barreau des Hauts-de-Seine et la Fédération nationale des unions de jeunes avocats (FNUJA), l'Union syndicale des magistrats (USM) et le Syndicat de la magistrature ne peuvent, par voie de conséquence, être admises.

D E C I D E :

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Article 1er : Les interventions présentées par l'Union syndicale des magistrats (USM), l'association " ACE-Avocats, ensemble ", le Syndicat des avocats de France (SAF), l'Union des jeunes avocats du barreau des Hauts-de-Seine et la Fédération nationale des unions de jeunes avocats (FNUJA) ainsi que le Syndicat de la magistrature ne sont pas admises.

Article 2 : La requête de l'ordre des avocats au barreau des Hauts-de-Seine et de l'association des magistrats du tribunal judiciaire de Nanterre est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'ordre des avocats au barreau des Hauts-de-Seine, à l'association des magistrats du tribunal judiciaire de Nanterre, au garde des sceaux, ministre de la justice, à l'Union syndicale des magistrats (USM), à l'association " ACE-Avocats, ensemble ", au Syndicat des avocats de France (SAF), à l'Union des jeunes avocats du barreau des Hauts-de-Seine et à la Fédération nationale des unions de jeunes avocats (FNUJA), ainsi qu'au Syndicat de la magistrature.

Délibéré à l'issue de la séance du 16 octobre 2023 où siégeaient : M. Pierre Collin, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, M. Jean-Philippe Mochon, présidents de chambre ; Mme Suzanne von Coester, Mme Fabienne Lambolez, M. Olivier Yeznikian, conseillers d'Etat et M. David Gaudillère, maître des requêtes-rapporteur.

Rendu le 10 novembre 2023.

Le président :

Signé : M. Pierre Collin

Le rapporteur :

Signé : M. David Gaudillère

La secrétaire :

Signé : Mme Marie-Adeline Allain


Synthèse
Formation : 6ème - 5ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 467645
Date de la décision : 10/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - DIFFÉRENTES CATÉGORIES D'ACTES - ACTES ADMINISTRATIFS - NOTION - ACTES À CARACTÈRE DE DÉCISION - ACTES NE PRÉSENTANT PAS CE CARACTÈRE - CIRCULAIRE DE LOCALISATION DES EMPLOIS PRISE PAR LE GARDE DES SCEAUX.

01-01-05-02-02 La note intitulée « circulaire de localisation des emplois » constitue un document de programmation par lequel le garde des sceaux, ministre de la justice informe, chaque année, les chefs de juridictions et les procureurs généraux de la répartition envisagée, entre les juridictions judiciaires de métropole et d’outre-mer, des effectifs de magistrats du siège et du parquet ainsi que de fonctionnaires des services judiciaires prévus en loi de finances. ...Si cette note constitue, pour l’administration, un outil annuel de gestion et de répartition prévisionnelle des effectifs de magistrats, les objectifs chiffrés qu’elle mentionne ne revêtent qu’un caractère indicatif, ce document n’ayant pas pour objet et ne pouvant avoir pour effet de lier le Président de la République dans l’exercice de son pouvoir de nomination individuelle des magistrats, dans les conditions prévues par l’article 65 de la Constitution et l’article 28 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958. ...Elle est, par suite, dépourvue de caractère décisoire.

JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES ET JUDICIAIRES - SERVICE PUBLIC DE LA JUSTICE - ORGANISATION - CIRCULAIRE DE LOCALISATION DES EMPLOIS PRISE PAR LE GARDE DES SCEAUX – RECEVABILITÉ DU REP À SON ENCONTRE – ABSENCE.

37-02-01 La note intitulée « circulaire de localisation des emplois » constitue un document de programmation par lequel le garde des sceaux, ministre de la justice informe, chaque année, les chefs de juridictions et les procureurs généraux de la répartition envisagée, entre les juridictions judiciaires de métropole et d’outre-mer, des effectifs de magistrats du siège et du parquet ainsi que de fonctionnaires des services judiciaires prévus en loi de finances. ...Si cette note constitue, pour l’administration, un outil annuel de gestion et de répartition prévisionnelle des effectifs de magistrats, les objectifs chiffrés qu’elle mentionne ne revêtent qu’un caractère indicatif, ce document n’ayant pas pour objet et ne pouvant avoir pour effet de lier le Président de la République dans l’exercice de son pouvoir de nomination individuelle des magistrats, dans les conditions prévues par l’article 65 de la Constitution et l’article 28 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958. Cette note, qui est dépourvue de caractère décisoire, ne saurait, eu égard à son objet et à sa portée, contrairement à ce que soutiennent les requérants, être regardée comme ayant, par elle-même, des effets sur les droits ou la situation des usagers du service public de la justice justifiant qu’elle puisse faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir....Les conclusions tendant à son annulation pour excès de pouvoir sont, par suite, irrecevables.

PROCÉDURE - INTRODUCTION DE L'INSTANCE - DÉCISIONS POUVANT OU NON FAIRE L'OBJET D'UN RECOURS - ACTES NE CONSTITUANT PAS DES DÉCISIONS SUSCEPTIBLES DE RECOURS - CIRCULAIRE DE LOCALISATION DES EMPLOIS PRISE PAR LE GARDE DES SCEAUX – 1) CARACTÈRE DÉCISOIRE – ABSENCE – 2) EFFETS NOTABLES SUR LES USAGERS [RJ1] – ABSENCE.

54-01-01-02 La note intitulée « circulaire de localisation des emplois » constitue un document de programmation par lequel le garde des sceaux, ministre de la justice informe, chaque année, les chefs de juridictions et les procureurs généraux de la répartition envisagée, entre les juridictions judiciaires de métropole et d’outre-mer, des effectifs de magistrats du siège et du parquet ainsi que de fonctionnaires des services judiciaires prévus en loi de finances. ...Si cette note constitue, pour l’administration, un outil annuel de gestion et de répartition prévisionnelle des effectifs de magistrats, les objectifs chiffrés qu’elle mentionne ne revêtent qu’un caractère indicatif, ce document n’ayant pas pour objet et ne pouvant avoir pour effet de lier le Président de la République dans l’exercice de son pouvoir de nomination individuelle des magistrats, dans les conditions prévues par l’article 65 de la Constitution et l’article 28 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958. Cette note, qui est dépourvue de caractère décisoire, ne saurait, eu égard à son objet et à sa portée, contrairement à ce que soutiennent les requérants, être regardée comme ayant, par elle-même, des effets sur les droits ou la situation des usagers du service public de la justice justifiant qu’elle puisse faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir....Les conclusions tendant à son annulation pour excès de pouvoir sont, par suite, irrecevables.


Références :

[RJ1]

Cf. CE, Section, 12 juin 2020, Groupe d’information et de soutien des immigré.e.s (GISTI), n° 418142, p. 192.


Publications
Proposition de citation : CE, 10 nov. 2023, n° 467645
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. David Gaudillère
Rapporteur public ?: M. Nicolas Agnoux
Avocat(s) : SARL CABINET BRIARD

Origine de la décision
Date de l'import : 25/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:467645.20231110
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