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17/02/2015 | FRANCE | N°14BX02523

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 17 février 2015, 14BX02523


Vu la requête, enregistrée le 22 août 2014, présentée pour Mme A...B...demeurant..., par Me Chmani, avocat ;

Mme B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400627 du 24 juillet 2014 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 janvier 2014 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) d'en

joindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze...

Vu la requête, enregistrée le 22 août 2014, présentée pour Mme A...B...demeurant..., par Me Chmani, avocat ;

Mme B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400627 du 24 juillet 2014 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 janvier 2014 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

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Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code civil ;

Vu la loi n°79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

L'affaire ayant été dispensée d'instruction en application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 janvier 2015 ;

- le rapport de Mme Frédérique Munoz-Pauzies, premier conseiller ;

1. Considérant que MmeB..., de nationalité marocaine, est entrée en France le 18 mars 2012, sous couvert d'un visa de long séjour valant premier titre de séjour d'un an en sa qualité de conjointe d'un ressortissant français ; que, par arrêté du 14 janvier 2014, le préfet de la Haute-Garonne a refusé de renouveler son titre de séjour au motif que la communauté de vie entre les époux avait cessé, et a assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination ; que Mme B...relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979 : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / - restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ; que l'arrêté attaqué vise l'ensemble des textes applicables et rappelle les conditions de l'entrée et du séjour en France de MmeB..., notamment le fait qu'elle était mariée avec un ressortissant français, qu'elle a fait état de violences conjugales, qu'elle a déposé une requête en divorce et qu'une ordonnance de non-conciliation a été rendue le 20 novembre 2012 ; qu'il est par suite suffisamment motivé ; qu'il ressort de cette motivation que le préfet a procédé à l'examen de la situation personnelle et familiale de la requérante ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux différents titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers en général et aux conditions de leur délivrance s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 111-2 de ce code, " sous réserve des conventions internationales " ; qu'aux termes de l'article 9 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 susvisé : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) " ; que, selon l'article L. 313-12 de ce code, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté attaqué : " Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé, sauf si elle résulte du décès du conjoint français. Toutefois, lorsque la communauté de vie a été rompue en raison de violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint, l'autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l'étranger et peut en accorder le renouvellement. En cas de violence commise après l'arrivée en France du conjoint étranger mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint étranger se voit délivrer, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention ''vie privée et familiale'' " ;

4. Considérant que si les dispositions précitées de l'article L. 312-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne créent aucun droit au renouvellement du titre de séjour d'un étranger dont la communauté de vie avec son conjoint de nationalité française a été rompue en raison des violences conjugales qu'il a subies de la part de ce dernier, de telles violences, subies pendant la vie commune, ouvrent la faculté d'obtenir, sur le fondement de cet article, un titre de séjour, sans que cette possibilité soit limitée au premier renouvellement d'un tel titre ; qu'il incombe à l'autorité préfectorale, saisie d'une telle demande, d'apprécier, sous l'entier contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'intéressé justifie le renouvellement du titre à la date où il se prononce, en tenant compte, notamment, du délai qui s'est écoulé depuis la cessation de la vie commune et des conséquences qui peuvent encore résulter, à cette date, des violences subies ;

5. Considérant qu'il est constant qu'à la date à laquelle a été prise la décision contestée, MmeB..., séparée de son mari depuis le 13 mai 2012, ne remplissait pas la condition de communauté de vie entre époux ; que si elle soutient que la vie commune a été rompue en raison des violences psychologiques dont elle a été l'objet de la part de son mari, cette circonstance ne lui donne pas droit, ainsi qu'il vient d'être dit, au renouvellement de plein droit de son titre de séjour ; que si elle fait valoir qu'elle a occupé un emploi d'agent d'entretien du mois de mai 2012 au mois de novembre 2013 et noué d'importants liens amicaux en France, la requérante, qui est entrée en France à l'âge de trente-deux ans, était présente sur le territoire français depuis moins de deux ans à la date de l'arrêté attaqué et n'est pas dépourvue de toute attache dans son pays d'origine ; qu'elle ne justifie pas d'une insertion professionnelle stable sur le sol national ; que, dès lors, dans les circonstances de l'espèce, et à supposer établies les violences conjugales invoquées, le préfet a pu sans erreur de droit ou erreur d'appréciation refuser le renouvellement du titre de séjour de Mme B...;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'au soutien des moyens tirés, d'une part, du défaut d'examen par le préfet de la situation de Mme B...au regard des dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'autre part, de la méconnaissance de l'article 251 du code civil, la requérante ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance et ne critique pas les réponses apportées par le tribunal administratif ; qu'il y a lieu, dès lors, de les écarter par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique et au bien-être économique du pays (...)" ;

8. Considérant que Mme B...soutient qu'elle a noué des liens intenses en France où elle a exercé une activité salariée, qu'elle justifie d'une bonne connaissance des valeurs de la République, qu'elle s'est vue remettre une attestation ministérielle de dispense de formation linguistique et est hébergée dans un foyer ; que, toutefois, à la date de la décision en litige, le 14 janvier 2014, Mme B...ne séjournait en France que depuis un an et neuf mois ; qu'elle n'est pas chargée de famille et n'est pas dépourvue d'attaches au Maroc où elle a vécu jusqu'à l'âge de trente-deux ans et où résident à tout le moins ses parents, deux de ses soeurs et ses neveu et nièce ; que, dans ces conditions, l'arrêté attaqué n'a pas porté une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

9. Considérant, enfin, que le moyen tiré de la méconnaissance de la convention d'Istanbul ratifiée par la France le 4 juillet 2014 et de la loi du 4 août 2014 est inopérant à l'appui de la contestation de la décision de refus de séjour qui leur est antérieure ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

10. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour doit être écarté ;

11. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. " ; qu'il ressort de ces dispositions que la motivation de l'obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus ou du retrait de titre de séjour dont elle découle nécessairement ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas spécifiquement motivée doit être écarté ;

12. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort de l'ensemble des dispositions du livre V du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français ; que, dès lors, l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 qui fixe les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979, en prévoyant que ces décisions " n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales (...) ", ne saurait être utilement invoqué à l'encontre d'une décision portant obligation de quitter le territoire français prise sur le fondement du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

13. Considérant, en quatrième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

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N°14BX02523


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 14BX02523
Date de la décision : 17/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Frédérique MUNOZ-PAUZIES
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : CHMANI

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2015-02-17;14bx02523 ?
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