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29/02/2016 | FRANCE | N°15BX03200

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 29 février 2016, 15BX03200


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté en date du 16 septembre 2015 par lequel la préfète de la Vienne l'a placé en rétention administrative pour une durée de cinq jours.

Par un jugement n° 1504213 en date du 21 septembre 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 octobre 2015, M. A...C..., représentée par Me B..., deman

de à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1504213 en date du 21 septembre 2015 du tribunal admi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté en date du 16 septembre 2015 par lequel la préfète de la Vienne l'a placé en rétention administrative pour une durée de cinq jours.

Par un jugement n° 1504213 en date du 21 septembre 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 octobre 2015, M. A...C..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1504213 en date du 21 septembre 2015 du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'annuler l'arrêté du 16 septembre 2015 de la préfète de la Vienne ;

3°) de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Philippe Delvolvé, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.C..., né le 23 janvier 1987, de nationalité iranienne, a fait l'objet d'une obligation de quitter sans délai le territoire français par arrêté du 2 juin 2015 du préfet de la Savoie. Il a été interpellé par les services de police le 14 septembre 2015 pour faux et usage de faux document. Il a fait l'objet d'un arrêté de placement en rétention administrative par arrêté du 16 septembre 2015 de la préfète de la Vienne. M. C...relève appel du jugement du 21 septembre 2015 du tribunal administratif de Bordeaux rejetant sa demande tendant à l'annulation de ce dernier arrêté.

Sur la demande tendant à l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :

2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 : " Dans les cas d'urgence, sous réserve de l'appréciation des règles relatives aux commissions ou désignations d'office, l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d'aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président. (...) ". M. C...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 22 octobre 2015 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux. Il n'y a donc pas lieu de statuer sur sa demande tendant à son admission provisoire à l'aide juridictionnelle.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : (...) 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé (... ) ".

4. L'arrêté plaçant M. C...en rétention vise les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il fait application. L'arrêté indique également que l'intéressé a fait l'objet le 2 juin 2015 d'un arrêté, notifié le même jour, par lequel le préfet de la Savoie lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, qu'il existe un risque pour que l'intéressé se soustraie à la mesure d'éloignement et qu'il ne présente pas des garanties de représentation suffisantes, dès lors que, d'une part, il est dépourvu d'un document d'identité authentique en cours de validité, d'un domicile fixe et de ressources légales et que, d'autre part, il s'est présenté sous une autre identité sous couvert d'un faux passeport européen. La décision contestée est donc suffisamment motivée. Il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment de la motivation de la décision, que la préfète se serait abstenue de se livrer à un examen particulier de la situation de M.C....

5. M. C...soutient que l'arrêté de placement en rétention est illégal en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français sur lequel il se fonde. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants :/ 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; / 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée sur le territoire sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré (...) II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification. (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français :/ 1° Si le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :/ a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; / b) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ;/ e) Si l'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ; / f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2. "

6. Contrairement à ce qu'allègue le requérant, il ne justifie ni d'une entrée régulière en France, ni des démarches effectuées en vue de régulariser sa situation.

7. Aux termes de l'article L. 316-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace à l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " peut être délivrée à l'étranger qui dépose plainte contre une personne qu'il accuse d'avoir commis à son encontre les infractions visées aux articles 225-4-1 à 225-4-6 et 225-5 à 225-10 du code pénal ou témoigne dans une procédure pénale concernant une personne poursuivie pour ces mêmes infractions. La condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigée. Cette carte de séjour temporaire ouvre droit à l'exercice d'une activité professionnelle. Elle est renouvelée pendant toute la durée de la procédure pénale, sous réserve que les conditions prévues pour sa délivrance continuent d'être satisfaites. /En cas de condamnation définitive de la personne mise en cause, une carte de résident est délivrée de plein droit à l'étranger ayant déposé plainte ou témoigné. ". Aux termes de l'article R. 316-1 du même code : " Le service de police ou de gendarmerie qui dispose d'éléments permettant de considérer qu'un étranger, victime d'une des infractions constitutives de la traite des êtres humains ou du proxénétisme prévues et réprimées par les articles 225-4-1 à 225-4-6 et 225-5 à 225-10 du code pénal, est susceptible de porter plainte contre les auteurs de cette infraction ou de témoigner dans une procédure pénale contre une personne poursuivie pour une infraction identique, l'informe : / 1° De la possibilité d'admission au séjour et du droit à l'exercice d'une activité professionnelle qui lui sont ouverts par l'article L. 316-1 ; /2° Des mesures d'accueil, d'hébergement et de protection prévues à la section 2 du présent chapitre ; /3° Des droits mentionnés à l'article 53-1 du code de procédure pénale, notamment de la possibilité d'obtenir une aide juridique pour faire valoir ses droits. / Le service de police ou de gendarmerie informe également l'étranger qu'il peut bénéficier d'un délai de réflexion de trente jours, dans les conditions prévues à l'article R. 316-2 du présent code, pour choisir de bénéficier ou non de la possibilité d'admission au séjour mentionnée au deuxième alinéa. / Ces informations sont données dans une langue que l'étranger comprend et dans des conditions de confidentialité permettant de le mettre en confiance et d'assurer sa protection. / Ces informations peuvent être fournies, complétées ou développées auprès des personnes intéressées par des organismes de droit privé à but non lucratif, spécialisés dans le soutien aux personnes prostituées ou victimes de la traite des êtres humains, dans l'aide aux migrants ou dans l'action sociale, désignés à cet effet par le ministre chargé de l'action sociale. ". Aux termes de l'article R. 316-2 du même code : " L'étranger à qui un service de police ou de gendarmerie fournit les informations mentionnées à l'article R. 316-1 et qui choisit de bénéficier du délai de réflexion de trente jours (...) se voit délivrer un récépissé de même durée par le préfet (...) Ce délai court à compter de la remise du récépissé. Pendant le délai de réflexion, aucune mesure d'éloignement ne peut être prise à l'encontre de l'étranger en application de l'article L. 511-1, ni exécutée. (...) "

8. Les dispositions de l'article R. 316-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile chargent les services de police d'une mission d'information, à titre conservatoire et préalablement à toute qualification pénale, des victimes potentielles de faits de traite d'êtres humains. Ainsi, lorsque ces services ont des motifs raisonnables de considérer que l'étranger pourrait être reconnu victime de tels faits, il leur appartient d'informer ce dernier de ses droits en application de ces dispositions. En l'absence d'une telle information, l'étranger est fondé à se prévaloir du délai de réflexion pendant lequel aucune mesure de reconduite à la frontière ne peut être prise, ni exécutée, notamment dans l'hypothèse où il a effectivement porté plainte par la suite.

9. M. C...a été interpellé par les services des douanes, le 14 septembre 2015, à l'aéroport de Poitiers, alors que muni de faux documents administratifs, il tentait, en présence de deux autres personnes, d'embarquer pour la Grande-Bretagne. Il soutient que la préfète de la Vienne a méconnu les dispositions précitées des articles R. 316-1 et R. 316-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ne l'informant pas des droits qu'il tenait de ces dispositions, alors qu'il a été victime de passeurs qui, en échange d'importantes sommes d'argent, auraient exercé des pressions sur lui et lui auraient fait subir des violences. Il ressort toutefois des pièces du dossier, notamment des procès-verbaux d'audition des 14 et 15 septembre 2015 que le requérant a déclaré avoir décidé lui-même de quitter l'Iran, avec l'appui d'un passeur et a circulé seul sur le territoire français, où il se trouve depuis trois mois, dans le but de rejoindre l'Angleterre, qu'à Dunkerque, il a notamment été pris en charge par les services de la mairie et que son départ d'Iran a été organisé par son frère. S'il allègue avoir subi des violences d'un passeur, qui devait le conduire en Grande-Bretagne en camion, il a choisi de prendre l'avion, pour des raisons financières. Ainsi que l'a jugé le tribunal administratif, de tels motifs ne sont pas de nature à révéler que l'intéressé pouvait être victime de faits de traite d'êtres humains. Dans ces conditions, les services de police n'étaient pas tenus de lui délivrer l'information prévue par l'article R. 316-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il en résulte que le requérant n'est pas fondé à se prévaloir du délai de réflexion prévu par l'article R. 316-2 du même code pour prétendre que la décision ordonnant son éloignement sans délai du territoire français serait entachée d'illégalité.

10. Si M. C...soutient qu'en cas de retour forcé dans son pays d'origine, il pourrait être condamné à mort pour crime d'apostasie, à la suite de sa conversion au christianisme, l'intéressé, qui n'a pas déposé de demande au titre de l'asile, n'établit pas, par ses seules allégations non assorties de justificatifs suffisamment probants, la réalité de risques de traitements graves et inhumains personnellement et directement encourus en cas de retour en Iran. La décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

11. Il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. C...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande tendant à l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle présentée par M. C....

Article 2 : Le surplus de la requête est rejeté.

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N° 15BX03200 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 15BX03200
Date de la décision : 29/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: M. Philippe DELVOLVÉ
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : THOUY

Origine de la décision
Date de l'import : 11/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-02-29;15bx03200 ?
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