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29/03/2018 | FRANCE | N°17BX02468

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 29 mars 2018, 17BX02468


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du 26 mars 2015 par laquelle le préfet de la Dordogne a rejeté son recours gracieux dirigé contre l'arrêté du 2 février 2015 portant refus de titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1503901 du 29 mai 2017, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregis

trée le 25 juillet 2017, M.B..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce j...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du 26 mars 2015 par laquelle le préfet de la Dordogne a rejeté son recours gracieux dirigé contre l'arrêté du 2 février 2015 portant refus de titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1503901 du 29 mai 2017, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 juillet 2017, M.B..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 29 mai 2017 du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'annuler cette décision du préfet de la Dordogne du 26 mars 2015 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Dordogne de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, d'enjoindre au préfet de la Dordogne de réexaminer sa situation, sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte, et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour lui permettant de travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 813 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et au titre du droit de plaidoirie.

Il soutient que :

- le préfet de la Dordogne aurait dû saisir la commission du titre de séjour dès lors qu'il réside en France de façon habituelle depuis plus de 10 ans ;

- en refusant de statuer sur la demande d'autorisation de travail qu'il avait présentée, le préfet a refusé d'exécuter l'injonction de réexamen prononcée par la cour administrative d'appel de Bordeaux dans un arrêt du 20 novembre 2014 et a ainsi méconnu l'autorité de la chose jugée par cette décision ;

- la décision portant refus de séjour est entachée d'erreur de fait et d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il justifie de sa présence en France depuis 2004 ;

- en refusant de statuer sur sa demande d'autorisation de travail, le préfet a commis une erreur de droit ;

- la décision méconnaît l'article R. 5221-20 du code du travail en n'apportant aucune motivation quant aux éléments d'appréciation que prévoit cette disposition ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'illégalité en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour.

Par ordonnance du 21 décembre 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 7 février 2018 à 12h00.

Un mémoire en défense, enregistré le 16 février 2018, a été présenté par le préfet de la Dordogne.

Par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 21 septembre 2017, la demande de M. B...tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle a été rejetée.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord du 9 octobre 1987 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Cécile Cabanne a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A...B..., ressortissant marocain né le 10 mars 1975, est entré irrégulièrement en France selon ses déclarations le 3 janvier 2004. Il a sollicité le 18 février 2013 son admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté du 19 avril 2013, le préfet de la Dordogne a rejeté la demande et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours. Par un arrêt n° 14BX00620 du 20 novembre 2014, la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé cet arrêté et enjoint au préfet de la Dordogne de statuer à nouveau sur la demande de titre de séjour de M.B.... Le 2 février 2015, le préfet de la Dordogne a pris, sur le double fondement des stipulations des articles 3 et 9 de l'accord franco-marocain et des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, un nouvel arrêté rejetant la demande de titre de séjour de M.B..., portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi. M. B... a alors formé un recours gracieux contre cet arrêté en produisant pour la première fois un contrat de travail à temps plein, lequel a été rejeté par le préfet de la Dordogne par une décision du 26 mars 2015 notifiant un délai de recours de deux mois. Interprétant son recours comme dirigé non seulement contre la décision de rejet du recours gracieux, mais également contre l'arrêté du 2 février 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a, par un jugement du 29 mai 2017, rejeté la demande de M. B...d'annulation de ces décisions.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. ".

3. M. B...soutient qu'il justifie, par la production de nombreux documents de différentes sources, de sa présence sur le territoire français depuis plus de dix ans. Si le requérant peut être regardé comme justifiant de sa présence en France depuis 2008, en produisant une attestation de son logeur corroborée par des factures d'électricité et d'eau à son nom et un témoignage d'un voisin, en revanche, les autres pièces produites ne permettent pas de caractériser sa présence continue en France de 2004 à 2008. Pour cette période, il produit, pour l'essentiel, des attestations de personnes déclarant le connaître. Ces pièces ne permettent d'attester, tout au plus, que d'une présence ponctuelle sur le territoire français. Par suite, M. B... n'étant pas en mesure d'établir sa résidence continue sur le territoire français depuis l'année 2004, le moyen tiré de l'erreur de fait sur sa durée de présence en France doit être écarté. Par suite, le préfet n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour.

4. Dans son arrêt n° 14BX00620 du 20 novembre 2014 prononçant l'annulation de l'arrêté du 19 avril 2013, la cour de céans a enjoint au préfet de la Dordogne de procéder au réexamen de la situation de M. B...dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt. En exécution de cette décision, le préfet a délivré une autorisation provisoire de séjour à l'intéressé, puis a pris un nouvel arrêté portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français. Cependant, alors que la cour a en 2014 censuré le motif tiré de l'absence de production par l'intéressé d'un contrat de travail visé par les services de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, les décisions des 2 février et 26 mars 2015 sont motivées par l'absence de rémunération mensuelle équivalente au SMIC du fait d'un contrat à temps partiel et l'absence de visa de long séjour pour la première, et la seule absence de visa de long séjour pour la seconde. Ainsi, les nouvelles décisions ne méconnaissent en tout état de cause pas l'autorité de la chose jugée dès lors qu'elles se fondent sur d'autres motifs que ceux retenus par le premier arrêté.

5. Aux termes de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum et qui ne relèvent pas de l'article 1er du présent accord, reçoivent après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention salarié éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles (...) ". Aux termes de l'article 9 du même accord : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux États sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord. / Chaque État délivre notamment aux ressortissants de l'autre État tous titres de séjour autres que ceux visés au présent Accord, dans les conditions prévues par sa législation ". Aux termes de l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers du droit d'asile, alors en vigueur, auquel l'accord franco-marocain ne déroge pas : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour "compétences et talents" sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois. ". Selon l'article L. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail. ". L'article R. 5221-15 du même code dispose que " Lorsque l'étranger est déjà présent sur le territoire national, la demande d'autorisation de travail mentionnée à l'article R. 5221-11 est adressée au préfet de son département de résidence. ".

6. Il résulte de la combinaison des textes précités que si la situation des ressortissants marocains souhaitant bénéficier d'un titre de séjour portant la mention "salarié" est régie par les stipulations de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, la délivrance à un ressortissant marocain du titre de séjour "salarié" prévu à l'article 3 précité de cette convention est subordonnée, en vertu de son article 9, à la condition prévue à l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile de la production par ce ressortissant d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois.

7. M. B... ne conteste pas davantage en appel que devant les premiers juges être entré en France sans visa, et n'établit ni même ne soutient qu'il aurait été titulaire d'un visa de long séjour lors de sa demande. Par suite, le préfet de la Dordogne pouvait légalement, sur ce seul motif et sans même avoir à se prononcer sur l'autorisation de travail qui lui était présentée, rejeter la demande de titre de séjour en qualité de salarié. Le préfet n'ayant pas statué sur cette demande d'autorisation de travail et n'ayant pas fondé l'arrêté en litige sur un quelconque refus d'autorisation, M. B... ne peut utilement invoquer, par voie d'exception, la méconnaissance par un tel refus de l'article R. 5221-20 du code du travail.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. Le présent arrêt écarte les moyens dirigés contre la décision de refus de titre de séjour. Dans ces conditions, et en tout état de cause, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas privée de base légale.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que ses conclusions présentées au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Dordogne.

Délibéré après l'audience du 1er mars 2018 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,

Mme Cécile Cabanne, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 29 mars 2018

Le rapporteur,

Cécile CABANNELe président,

Catherine GIRAULT

Le greffier,

Virginie MARTY

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

5

No 17BX02468


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX02468
Date de la décision : 29/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Cécile CABANNE
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : CLAVEL

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-03-29;17bx02468 ?
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