La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/04/2023 | FRANCE | N°21BX01609

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 25 avril 2023, 21BX01609


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du 8 février 2019 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de révision de sa pension militaire d'invalidité.

Par un jugement n° 1905562 du 23 février 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 avril 2021, M. D..., représenté par la SCP Puybaraud, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement

du tribunal administratif de Bordeaux du 23 février 2021 ;

2°) d'annuler la décision ministérielle du ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du 8 février 2019 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de révision de sa pension militaire d'invalidité.

Par un jugement n° 1905562 du 23 février 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 avril 2021, M. D..., représenté par la SCP Puybaraud, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 23 février 2021 ;

2°) d'annuler la décision ministérielle du 8 février 2019 ;

3°) à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à son conseil sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce que la minute n'est pas signée par le président ;

- il est insuffisamment motivé lorsqu'il écarte la nécessité d'une nouvelle expertise ;

- le rapport d'expertise sur lequel s'est fondé le tribunal est insuffisant pour écarter ses demandes de révision de sa pension et d'attribution d'une majoration pour assistance d'une tierce personne, l'expert n'ayant pas rempli les missions qui lui sont confiées par l'instruction ministérielle du 25 juillet 1976 ; son rapport ne permet pas de justifier l'absence d'imputabilité à l'infirmité dorso-lombaire pensionnée des aggravations de son état de santé;

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, les pièces produites permettaient de constater une aggravation de l'infirmité dorso-lombaire, du fait de l'apparition d'une sténose canalaire associée à un étalement discal ;

- le fait qu'il ne puisse pas se lever seul, ni s'habiller, ni faire sa toilette de manière autonome justifie l'attribution d'une majoration pour assistance d'une tierce personne.

Par un mémoire en défense enregistré le 10 mars 2022, le ministre des armées conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- le jugement n'est entaché d'aucun vice de forme ;

- la nouvelle pathologie relative à une sténose canalaire est d'origine dégénérative et n'est pas rattachable à une infirmité pensionnée ; le tribunal pouvait ainsi estimer qu'une nouvelle expertise n'était pas utile ;

- les documents médicaux confirment une consolidation de l'état de santé, en rapport avec la pathologie dorso-lombaire, le 12 décembre 2018, avec une incapacité évaluée à 35 %, et un état stationnaire depuis cette date ; la sténose du canal lombaire est d'origine dégénérative et n'est donc pas en relation médicale directe avec l'infirmité pensionnée ;

- la demande de majoration pour tierce personne a déjà été rejetée par la cour régionale des pensions de Bordeaux le 18 octobre 2016 aux motifs que les difficultés liées à l'habillage, au déshabillage, à la toilette et au lever du lit ne sont pas la conséquence d'infirmités imputables, et que le risque avéré de chute est comparable aux risques d'une population âgée et dépendante et ne met pas immédiatement en jeu le pronostic vital de l'intéressé ; en l'absence d'aggravation des infirmités pensionnées, le rejet de la demande relative à la tierce personne a acquis un caractère définitif ; au demeurant, les contraintes relatives aux actes que l'intéressé ne peut plus faire constituent un critère insuffisant pour prétendre à l'allocation d'une majoration pour tierce personne, dès lors qu'il n'est pas établi que la nécessité d'une aide permanente résulterait exclusivement des infirmités pensionnées.

M. D... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision

du 3 juin 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C... A...,

- les conclusions de Mme Kolia Gallier, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., né le 23 février 1948, est titulaire, depuis le 9 décembre 2009, d'une pension militaire d'invalidité au taux de 100 % + 16°, concédée par arrêté du 21 mars 2011, en raison de dix infirmités consécutives à un accident de la circulation survenu

le 29 février 1968 alors qu'il était appelé du contingent. Il a sollicité, le 15 décembre 2017, la révision de sa pension au motif, d'une part, de l'aggravation de l'infirmité relative à une " scoliose dorso-lombaire avec enraidissement de la colonne vertébrale secondaire au raccourcissement du membre inférieur gauche ", et, d'autre part, de la nécessité de recourir à l'assistance d'une tierce personne. Par une décision du 8 février 2019, la ministre des armées a rejeté sa demande. M. D... a sollicité l'annulation de cette décision auprès du tribunal administratif de Bordeaux qui, par jugement du 23 février 2021, a rejeté sa demande. Par la présente requête, M. D... relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". Il ressort des pièces du dossier de première instance que la minute du jugement attaqué est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté.

3. En second lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Il ressort des énonciations du jugement attaqué que les premiers juges ont considéré que la nouvelle pathologie, relative à une sténose canalaire accompagnée d'un étalement discal, était d'origine dégénérative, et qu'aucun des éléments médicaux produits par M. D... ne permettait d'établir un lien direct entre cette nouvelle infirmité et une infirmité pensionnée. Ils en ont déduit que cette infirmité ne pouvait pas conduire à une majoration de la pension pour aggravation. Ils ont également estimé que, l'aggravation de l'état de santé étant due à une pathologie sans lien avec les infirmités pensionnées, elle ne pouvait ouvrir droit à l'allocation spéciale pour recours à une tierce personne. Les premiers juges pouvaient ainsi rejeter la demande présentée par M. D... sans avoir besoin d'ordonner une nouvelle expertise, qui ne présentait aucune utilité. Le moyen tiré du défaut de motivation du rejet de la demande d'expertise doit être écarté.

Sur les droits à pension :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 154-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs des infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. / Cette demande est recevable sans condition de délai. / (...) / Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. (...) ".

5. Il résulte de ces dispositions que le droit à pension est destiné à réparer toutes les conséquences des faits de service dommageables telles qu'elles se révèlent par suite de l'évolution physiologique, pour autant qu'aucune cause étrangère, telle qu'une affection distincte de l'affection pensionnée, ne vienne, pour sa part, aggraver l'état de l'intéressé. Ainsi, l'aggravation de l'infirmité initiale, si elle est seulement due au vieillissement, peut justifier une révision du taux de la pension. En revanche, si le vieillissement cause une nouvelle infirmité, distincte de l'infirmité pensionnée, qui contribue à l'aggravation de celle-ci, les dispositions précitées de l'article L. 154-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre font obstacle à cette révision, dès lors que l'aggravation est due à une cause étrangère à l'infirmité pensionnée.

6. M. D... a demandé la majoration de sa pension militaire d'invalidité en raison de l'aggravation de l'infirmité relative à une scoliose dorso-lombaire avec enraidissement de la colonne vertébrale secondaire au raccourcissement du membre inférieur gauche, en se prévalant d'un certificat de son médecin traitant faisant état d'une sténose canalaire L4-L5. Il résulte toutefois de l'instruction, et notamment de la doctrine scientifique produite par le ministre en défense, que la sténose du canal lombaire est une affection d'origine dégénérative. Aucune des pièces produites ne permet d'établir un lien entre cette nouvelle affection et l'infirmité relative à la scoliose dorso-lombaire déjà pensionnée. En outre, si l'intéressé produit un certificat d'un neurochirurgien du 27 janvier 2020 mentionnant une arthrose lombaire majorée par rapport au dernier examen, ce document médical n'est pas de nature à établir une aggravation de l'infirmité déjà pensionnée, qui a été évaluée en 2010 à un taux d'incapacité de 35 %, et que l'expertise médicale du 12 décembre 2018 a jugé consolidée. Dès lors qu'il est établi que l'aggravation de l'état de santé de M. D... n'est pas en lien avec une infirmité déjà pensionnée, il n'est pas utile d'ordonner une nouvelle expertise sur ce point. Par suite, la ministre des armées, en rejetant la demande de M. D..., n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 154-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre.

7. En second lieu, aux termes de l'article L. 133-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Les invalides que leurs infirmités rendent incapables de se mouvoir, de se conduire ou d'accomplir les actes essentiels de la vie et qui, vivant chez eux, sont obligés de recourir de manière constante aux soins d'une tierce personne, ont droit, à titre d'allocation spéciale, à une majoration égale au quart de la pension ". Il résulte de ces dispositions que les infirmités qui doivent être prises en considération pour apprécier si un invalide remplit les conditions spéciales d'invalidité auxquelles le bénéfice de l'hospitalisation ou de la majoration est subordonné sont exclusivement celles qui ouvrent droit à pension au profit de l'intéressé.

8. Il résulte de l'instruction que, depuis l'attribution de sa pension le 9 décembre 2009, M. D... n'a pas fait l'objet d'une majoration de sa pension au titre des infirmités déjà pensionnées. Si les pièces médicales font ressortir que M. D... n'est pas en mesure, sans l'aide d'un tiers, de se vêtir et de se dévêtir, et d'utiliser un moyen de transport, et qu'il fait en outre des chutes fréquentes, il n'est pas établi que cette gêne fonctionnelle, qui au demeurant ne nécessite pas une assistance permanente, résulterait des seules infirmités pensionnées, alors qu'il ressort des pièces médicales que l'aggravation de son état de santé est due à une nouvelle pathologie d'origine dégénérative. Par suite, et sans qu'il soit nécessaire de recourir à une nouvelle expertise, la ministre des armées a pu légalement rejeter sa demande d'allocation spéciale pour l'assistance d'une tierce personne.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 8 février 2019.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le conseil de M. D... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D... et au ministre des armées.

Délibéré après l'audience du 28 mars 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, présidente,

Mme Anne Meyer, présidente assesseure,

M. Olivier Cotte, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 avril 2023.

Le rapporteur,

Olivier A...

La présidente,

Catherine GiraultLa greffière,

Virginie Guillout

La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21BX01609


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX01609
Date de la décision : 25/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Olivier COTTE
Rapporteur public ?: Mme GALLIER
Avocat(s) : PUYBARAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-04-25;21bx01609 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award