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27/05/2010 | FRANCE | N°10DA00049

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3 (bis), 27 mai 2010, 10DA00049


Vu la requête, enregistrée le 11 janvier 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Manka A, demeurant ..., par la SCP Caron, Daquo, Amouel, Pereira ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902421 en date du 15 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 août 2009 par lequel le préfet de la Somme a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français et à ce qu'il soit ordonné au préfet de la S

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Vu la requête, enregistrée le 11 janvier 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Manka A, demeurant ..., par la SCP Caron, Daquo, Amouel, Pereira ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902421 en date du 15 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 août 2009 par lequel le préfet de la Somme a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français et à ce qu'il soit ordonné au préfet de la Somme de lui délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement ;

2°) de faire droit à sa demande de première instance ;

Il soutient que le préfet ne se trouve pas en situation de compétence liée ; qu'il existe une contradiction entre le fait d'instruire la demande sans opposer a priori la situation de l'emploi, pour finalement rejeter la demande en se fondant sur cette situation ; que l'admission exceptionnelle au séjour n'est pas réservée aux personnes relevant des métiers dans lesquels la situation de l'emploi est sous tension ; que cette admission est possible pour toute personne présentant des gages sérieux d'insertion dans la société française ; qu'il n'a pas démissionné ; que la décision du préfet ne repose pas sur un examen complet de sa situation ; qu'il ne peut retourner dans son pays d'origine, en raison de son engagement politique et des risques auxquels il y serait exposé ; qu'il réside depuis quatre ans en France, chez son oncle, dans la famille duquel il est pleinement intégré ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu la décision du 1er février 2010 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai accordant à M. A le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 mars 2010, présenté par le préfet de la Somme, qui conclut au rejet de la requête ; il fait valoir que, le requérant faisant valoir les mêmes moyens et arguments que devant les premiers juges, il maintient ses premières écritures ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret

n° 91-1266 du 19 décembre 1991 modifié ;

Vu l'arrêté du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Antoine Durup de Baleine, premier conseiller, les conclusions de M. Alain de Pontonx, rapporteur, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que M. A, qui, né en 1982, est ressortissant de la République démocratique du Congo, est, selon ses déclarations, arrivé en France le 31 octobre 2005 ; que, par des décisions des 12 juin 2006 et 26 novembre 2008, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile ont rejeté la demande de l'intéressé présentée le 30 janvier 2006 et tendant à la reconnaissance de la qualité de réfugié ; que, par une lettre du 29 décembre 2008, M. A a sollicité du préfet de la Somme la délivrance d'un titre de séjour portant la mention salarié au titre de l'admission exceptionnelle au séjour ; qu'il relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 26 août 2009 par lequel le préfet de la Somme a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la légalité des décisions refusant la délivrance d'un titre de séjour et assortissant ce refus d'une obligation de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort tant des motifs de l'arrêté attaqué que des pièces du dossier qu'alors même qu'en méconnaissance de la règle de présentation personnelle du demandeur imposée par les dispositions de l'article R. 311-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile M. A s'était borné à saisir le préfet de la Somme d'une demande de titre de séjour adressée par voie épistolaire, cette autorité s'est livrée à un examen complet de l'ensemble des éléments propres à la situation personnelle du pétitionnaire porté à sa connaissance par ce dernier et, alors même qu'elle n'y était pas tenue, a fait procéder, par le service de la main-d'oeuvre étrangère de la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, à une mesure d'instruction ; qu'ainsi, le moyen tiré d'un défaut d'examen complet de la situation de M. A doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) ;

Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que, lors du contrôle de l'établissement exploité à Rivery (Somme) par la SARL Restoland, dont, dans sa demande de titre de séjour, M. A affirmait être le salarié à temps partiel depuis le 14 octobre 2008, le gérant de cette société a indiqué que l'intéressé avait démissionné pour occuper un emploi saisonnier à temps plein du 30 avril au 30 octobre 2009 dans un restaurant à Saint-Valéry-sur-Somme ; que les pièces du dossier prouvent que M. A était salarié de la SARL Lpc La Terrasse, qui exploite un restaurant à Saint-Valéry-sur-Somme, à compter du mois d'avril 2009 ; que la circonstance que les gérants de ces deux sociétés sont frères est sans influence ; qu'ainsi, en estimant que M. A a démissionné de la SARL Restoland, le préfet de la Somme n'a pas commis d'erreur de fait ;

Considérant, d'autre part, que, pour apprécier s'il y avait lieu, au titre de l'admission exceptionnelle au séjour prévue par les dispositions de l'article L. 313-14 précité, de délivrer à M. A le titre de séjour portant la mention salarié qu'il sollicitait, le préfet de la Somme a pu, sans erreur de droit, rechercher si l'emploi dans lequel la SARL Restoland se déclarait disposée à recruter l'intéressé était, dans la région Picardie, au nombre des métiers énumérés par l'annexe à l'arrêté susvisé du 18 janvier 2008 ; qu'en effet, le préfet n'a pas estimé que la circonstance que cet emploi n'est pas au nombre de ces métiers le placerait en situation de compétence liée pour refuser la délivrance du titre de séjour sollicité mais a seulement fait de cette circonstance l'un des éléments de son appréciation du bien-fondé de la demande de M. A ;

Considérant, enfin, qu'en refusant de délivrer le titre de séjour sollicité aux motifs que M. A avait quitté son emploi au sein de la SARL Restoland et que cet emploi n'est pas au nombre des métiers connaissant, dans la région Picardie, des difficultés de recrutement, énumérés par l'annexe à l'arrêté susmentionné du 18 janvier 2008, le préfet de la Somme n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant, en troisième lieu, que, si le requérant soutient qu'il résidait en France depuis près de quatre ans à la date de l'arrêté en litige et qu'il est pleinement intégré dans la famille d'un oncle résidant à Amiens, ces circonstances ne faisaient pas obstacle à ce que soit pris cet arrêté, dès lors que M. A est célibataire, n'a personne à charge et que l'allégation selon laquelle il n'a plus de famille proche dans son pays d'origine n'est assortie d'aucun commencement de preuve ;

Considérant, en quatrième lieu, que, si le requérant soutient qu'il ne peut retourner dans son pays d'origine en raison des risques auxquels, d'après lui, il y serait exposé du fait d'activités de nature politique qui y auraient été les siennes, ces circonstances, qui ne sauraient avoir d'incidence que sur l'appréciation de la légalité de la fixation du pays de destination en cas d'exécution d'office de l'obligation de quitter le territoire français, ne sont pas au nombre des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels prévus par l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui n'a ni pour objet, ni pour effet, de subordonner la légalité de la décision refusant, le cas échéant, l'admission exceptionnelle au séjour qu'il prévoit à l'absence pour le pétitionnaire de risque réel pour sa personne dans le pays dont il est ressortissant ou un autre pays dans lequel il serait légalement admissible ;

En ce qui concerne la légalité de la fixation du pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ; qu'aux termes de ce dernier : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ; que ces dispositions et stipulations combinées font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne, soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de destination ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée ;

Considérant que, si M. A, dont la demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, soutient qu'il ne peut retourner en République démocratique du Congo car il craint d'y être victime de représailles et de persécutions en raison d'activités politiques antérieures à sa venue en France, il n'établit pas, par ses allégations et les pièces qu'il produit à leur soutien, qu'il existerait des motifs sérieux et avérés de croire qu'il serait exposé dans ce pays à un risque réel pour sa personne ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions et stipulations précitées, à le supposer soulevé par la requête, doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions tendant à ce qu'il soit ordonné au préfet de la Somme de délivrer à M. A une carte de séjour temporaire ne peuvent être accueillies ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Manka A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Copie sera adressée au préfet de la Somme.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 10DA00049
Date de la décision : 27/05/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Gayet
Rapporteur ?: M. Antoine Durup de Baleine
Rapporteur public ?: M. de Pontonx
Avocat(s) : SCP CARON-DAQUO-AMOUEL-PEREIRA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-05-27;10da00049 ?
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