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25/10/2012 | FRANCE | N°12DA00670

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3 (quater), 25 octobre 2012, 12DA00670


Vu la requête, enregistrée par télécopie au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 7 mai 2012 et confirmée par la production de l'original le 11 mai 2012, présentée pour Mlle Fang A, demeurant ..., par Me E. Mahieu, avocat ; Mlle A demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 1200220 du 5 avril 2012 du tribunal administratif de Rouen en tant que ce jugement a rejeté sa demande en annulation des décisions du 26 décembre 2011 par lesquelles le préfet de la Seine-Maritime lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le terri

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Vu la requête, enregistrée par télécopie au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 7 mai 2012 et confirmée par la production de l'original le 11 mai 2012, présentée pour Mlle Fang A, demeurant ..., par Me E. Mahieu, avocat ; Mlle A demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 1200220 du 5 avril 2012 du tribunal administratif de Rouen en tant que ce jugement a rejeté sa demande en annulation des décisions du 26 décembre 2011 par lesquelles le préfet de la Seine-Maritime lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé la Chine comme pays de destination de cette mesure d'éloignement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " vie privée et familiale " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à verser à Me Mahieu dans les conditions prévues par l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Olivier Yeznikian, président de chambre ;

Considérant que Mlle A, ressortissante chinoise, est entrée régulièrement en France le 27 septembre 2007 afin de poursuivre des études de commerce ; qu'elle s'est vu délivrer un titre de séjour portant la mention " étudiant " renouvelé chaque année et valable en dernier lieu jusqu'au 31 octobre 2011 ; que cette dernière a sollicité, le 9 septembre 2011, auprès des services de la préfecture un changement de statut et la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié " ; que le préfet de la Seine-Maritime a, par un arrêté en date du 26 décembre 2011, refusé de lui délivrer un tel titre, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours, a fixé la Chine comme pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans ; que Mlle A relève appel du jugement du 5 avril 2012 par lequel le tribunal administratif de Rouen, après avoir annulé la décision portant interdiction de retour, a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation des décisions en date du 26 décembre 2011 du préfet de la Seine-Maritime rejetant sa demande de délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant la Chine comme pays de destination de cette mesure d'éloignement ;

Sur la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, que la décision attaquée comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que, par suite et sans qu'il soit besoin, en tout état de cause, de se prononcer sur sa recevabilité, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : / 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 5221-20 du code du travail : " Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : / (...) / 2° L'adéquation entre la qualification, l'expérience, les diplômes ou titres de l'étranger et les caractéristiques de l'emploi auquel il postule (...) " ;

Considérant que, pour refuser à Mlle A la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié ", le préfet de la Seine-Maritime s'est fondé, au regard des dispositions notamment de l'article R. 5221-20 du code du travail précité, sur le défaut de visa du contrat de travail produit par la requérante, compte tenu de l'inadéquation entre la qualification, l'expérience, les diplômes de cette dernière et les caractéristiques de l'emploi auquel elle postule ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la requérante, diplômée de l'Ecole supérieur de commerce de Rouen le 21 mars 2009, a obtenu un master " European management " ainsi que, le 28 juin 2010, le diplôme universitaire en langue française délivré par l'université de Rouen ; que la société World Services, après avoir employé l'intéressée par plusieurs contrats à durée déterminée sur le même poste, lui a proposé en mai 2011 un contrat à durée indéterminée pour continuer à occuper le poste d'" employée de service commercial " ; que les missions et attributions telles qu'indiquées dans le contrat consistent en : " la rédaction, l'établissement, la collecte ou la remise des documents du service Transport-transit ainsi que des paiements y afférents, auprès de la clientèle et plus particulièrement auprès des exportateurs et importateurs français d'origine chinoise. / Melle Fang A devra dans le cadre de ces attributions : / accueillir et renseigner la clientèle au téléphone et dans les bureaux / visiter la clientèle pour remettre ou collecter les documents nécessaires au service / utiliser la langue chinoise à l'écrit et à l'oral pour communiquer avec les agents en Chine / informer la Direction des tous éléments importants en rapport avec la clientèle " ; qu'il ne résulte ni de ces stipulations, ni d'un autre document que ces fonctions correspondent à une fonction de cadre ; que cela ne résulte d'ailleurs pas davantage de la rémunération de base retenue ; qu'il ressort, en revanche, des pièces du dossier que l'embauche de Mlle A repose en pratique sur sa maîtrise de la langue chinoise, voire d'un de ses dialectes, ainsi que de sa culture chinoise et sur l'expérience déjà acquise au sein de l'entreprise du fait de ses contrats à durée déterminée ; que ces circonstances ne suffisent pas, compte tenu de la qualification et des diplômes de cette dernière à l'issue de sa formation en école de commerce, à vérifier que l'emploi proposé est en adéquation avec son niveau universitaire ; que c'est, par suite, sans erreur de droit ou erreur d'appréciation que le préfet de la Seine-Maritime s'est fondé sur les dispositions combinées de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et celles de l'article R. 5221-20 du code du travail, pour refuser à Mlle A la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié " ;

Considérant, en troisième lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour en qualité de salarié ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; / (...) / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III (...) " ;

Considérant que Mlle A soutient que la décision souffre d'un défaut de motivation au regard des dispositions de l'article 12 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ; que, cependant, les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précitées relèvent que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle refusant le séjour ; que la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour étant suffisamment motivée, il en est de même pour celle portant obligation de quitter le territoire français ;

Considérant, en deuxième lieu, que Mlle A est entrée en France le 27 septembre 2007 afin de poursuivre ses études ; qu'elle est célibataire et sans enfant ; qu'ainsi, le préfet n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle en l'obligeant à quitter le territoire français ;

Considérant, en troisième lieu, que, comme il a été dit, il y a lieu d'écarter les moyens dirigés contre la décision portant refus d'un titre de séjour ; qu'ainsi, il convient d'écarter celui tiré de l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

Sur le délai de départ volontaire :

Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours (...) " ;

Considérant qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait au préfet de motiver son choix de ne pas faire usage de la possibilité d'accorder à Mlle A un délai supérieur à trente jours, laquelle revêt un caractère exceptionnel ; qu'ainsi, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas commis d'erreur de droit en fixant un délai de départ volontaire d'une durée de trente jours ;

Sur la décision fixant la Chine comme pays de destination :

Considérant, en premier lieu, que la décision fixant le pays de destination est suffisamment motivée en droit, par le visa de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et, en fait, par l'indication que la requérante, ressortissante chinoise, pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement à destination du pays dont elle est originaire ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte de ce qui précède, que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en fixant la Chine comme pays de destination de la mesure d'éloignement dont fait l'objet Mlle A ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mlle A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 5 avril 2012, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 26 décembre 2011 du préfet de la Seine-Maritime en tant qu'il a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sous trente jours et a fixé la Chine comme pays de destination ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mlle A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mlle Fang A, au ministre de l'intérieur et à Me Eglantine Mahieu.

Copie sera adressée pour information au préfet de la Seine-Maritime.

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N°12DA00670


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3 (quater)
Numéro d'arrêt : 12DA00670
Date de la décision : 25/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Olivier Yeznikian
Rapporteur public ?: M. Moreau
Avocat(s) : MAHIEU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2012-10-25;12da00670 ?
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