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31/12/2012 | FRANCE | N°11DA01596

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 31 décembre 2012, 11DA01596


Vu le recours, enregistré par courrier électronique le 14 octobre 2011, régularisé le 17 octobre 2011 par la production de l'original au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT qui demande à la cour :

1°) d'annuler les articles 1er et 2 du jugement n° 0902675 du 7 juillet 2011 par lequel le tribunal administratif de Lille a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme Marc A ont été assujettis au titr

e de l'année 2003, ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de re...

Vu le recours, enregistré par courrier électronique le 14 octobre 2011, régularisé le 17 octobre 2011 par la production de l'original au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT qui demande à la cour :

1°) d'annuler les articles 1er et 2 du jugement n° 0902675 du 7 juillet 2011 par lequel le tribunal administratif de Lille a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme Marc A ont été assujettis au titre de l'année 2003, ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de rejeter la demande de M. et Mme Marc A présentée devant le tribunal administratif de Lille ;

3°) de rétablir M. et Mme Marc A au rôle supplémentaire de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales au titre de l'année 2003 ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Patrick Minne, premier conseiller,

- les conclusions de M. Vladan Marjanovic, rapporteur public,

- les observations de Me Hernout, avocat, pour M. et Mme Marc A ;

1. Considérant que la SA Macge Fool Town a cédé à ses actionnaires, M. Marc A et M. Gérard A, par acte du 30 janvier 2003, l'intégralité des 620 parts composant le capital de la SARL Au Corset d'Or ; qu'à l'issue de la vérification de comptabilité dont la SA Macge Fool Town a fait l'objet, l'administration a rectifié le prix de cession de ces parts, consenti au prix unitaire d'un euro, et réintégré dans les résultats de l'exercice 2003 de la société vérifiée une somme, qualifiée de libéralité anormalement consentie aux cessionnaires, calculée sur la base d'un prix unitaire, estimé à 3 725 euros au stade de la proposition de rectification du 8 mars 2006 avant d'être fixé à 3 311 euros au stade de la lettre de réponse aux observations des contribuables ; que ces derniers ont été personnellement imposés sur l'avantage, qualifié d'occulte, qu'ils ont reçu ; que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT fait appel du jugement du 7 juillet 2011 par lequel le tribunal administratif de Lille a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme A ont été assujettis au titre de l'année 2003, ainsi que des pénalités y afférentes ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) " ;

3. Considérant qu'il résulte de la proposition de rectification du 8 mars 2006 adressée à M. et Mme A que le vérificateur a observé que l'actif de la SARL Au Corset d'Or cédée était composé d'un immeuble situé au 28 rue Neuve à Lille, donné à bail commercial à une entreprise de vente de vêtements féminins ; que la valeur unitaire des parts de cette SARL a été déterminée par la moyenne de deux valeurs calculées, respectivement, à partir d'une méthode mathématique fondée sur la valeur de l'immeuble composant l'actif, elle-même estimée par comparaison avec trois locaux commerciaux retenus à titre principal complétés par deux termes d'appoint, et à partir d'une méthode ayant consisté à évaluer la productivité de l'entreprise fondée sur des éléments intrinsèques relatifs à sa rentabilité ; qu'alors même que le prix unitaire moyen a été obtenu en pondérant la somme de 3 496 euros calculée selon la méthode mathématique d'un coefficient plus élevé que celui affecté à la somme de 6 069 euros calculée selon la méthode fondée sur la valeur de productivité, l'administration, en ayant omis de mentionner la nature des activités exercées dans les locaux retenus comme termes de comparaison, leur mode juridique d'occupation et leurs principales caractéristiques physiques, n'a pas, dans les circonstances de l'espèce, privé les contribuables du droit d'engager de manière utile une discussion contradictoire dès lors que le redressement, fondé sur une combinaison de deux méthodes distinctes, consistait en la réévaluation de parts cédées faisant intervenir de multiples facteurs d'appréciation variés et ne consistait pas exclusivement en la réévaluation de loyers ou du prix de cession d'un immeuble ; que, par suite, le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT est fondé à faire valoir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a estimé que la proposition de rectification du 8 mars 2006 n'était pas suffisamment motivée, au sens des dispositions précitées de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. et Mme A tant devant la cour que devant le tribunal administratif de Lille ;

Sur la procédure d'imposition :

5. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction qu'était jointe à la proposition de rectification du 8 mars 2006 adressée à M. et Mme A une annexe de 4 pages et demi reprenant les modalités d'évaluation de la valeur vénale des titres de la SARL Au Corset d'Or définies par le service de fiscalité immobilière de Lille-Nord, à laquelle se référait expressément le vérificateur pour évaluer le montant de la libéralité anormalement consentie selon lui à MM A ; que, contrairement à ce que soutiennent les intimés, la circonstance qu'ils ont été destinataires d'une proposition de rectification du 28 février 2006, en matière de droits d'enregistrement, n'implique pas que la proposition de rectification adressée par la suite, en matière d'impôt sur le revenu, doive comporter en annexe la proposition de rectification intervenue en matière de droits d'enregistrement ; que l'article L. 17 du livre des procédures fiscales n'impose pas cette formalité ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la proposition de rectification du 8 mars 2006 est insuffisamment motivée doit être écarté ;

6. Considérant, en second lieu, que les positions exprimées au paragraphe n° 6 de la documentation administrative n° 7 A-61 du 10 septembre 1996, au paragraphe n° 86 de la documentation administrative n° 13 L-1513 du 1er juillet 2002 et dans la réponse ministérielle à M. Peyrou, sénateur, publiée le 31 octobre 1981 sous le n° 1742, toutes prises à propos de la procédure d'imposition, ne comportent pas d'interprétation de la loi fiscale ; que, par suite, M. et Mme A ne sont pas fondés à s'en prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c) Les rémunérations et avantages occultes (...) " ; qu'en cas de vente par une société de titres de participation à un prix que les parties ont délibérément minoré, sans que cet écart de prix comporte de contrepartie, l'avantage ainsi octroyé doit être requalifié de libéralité représentant un avantage occulte constitutif d'une distribution de revenus au sens des dispositions précitées du c) de l'article 111 du code général des impôts ; que la preuve d'une telle distribution occulte doit être regardée comme apportée par l'administration lorsqu'est établie l'existence, d'une part, d'un écart significatif entre le prix convenu et la valeur vénale du bien cédé et, d'autre part, d'une intention, pour la société, d'octroyer et, pour le co-contractant, de recevoir, une libéralité du fait des conditions de la cession ;

8. Considérant, en premier lieu, que la valeur vénale réelle de titres non cotés en bourse sur un marché réglementé doit être appréciée compte tenu de tous les éléments dont l'ensemble permet d'obtenir un chiffre aussi voisin que possible de celui résultant du jeu de l'offre et de la demande à la date à laquelle la cession est intervenue ; que M. et Mme A ne contestent pas qu'aucune transaction portant sur des sociétés similaires à la SARL Au Corset d'Or serait intervenue dans des conditions équivalentes ; que, par suite, l'administration était en droit de calculer la valeur vénale des titres en recourant à la combinaison de deux méthodes consistant à déterminer une moyenne à partir d'une valeur mathématique et d'une valeur de productivité ;

9. Considérant, en deuxième lieu, que, pour déterminer la valeur mathématique des titres de participation, le vérificateur a cherché à évaluer, par comparaison avec d'autres locaux à usage commercial, la valeur vénale de l'immeuble situé au 28 rue Neuve à Lille, qui forme l'essentiel de l'actif de la SARL Au Corset d'Or ; que le vérificateur s'est appuyé sur les prix de trois immeubles à usage mixte de commerce et d'habitation vendus au cours de l'année 2002 précédant la cession de parts en cause, situés à proximité du bien à évaluer, complétés par deux autres ventes réalisées en 2002 et en 1999 dans le même secteur ; que, contrairement à ce que soutiennent les contribuables, le service pouvait valablement se fonder sur les données propres à ces différentes mutations et sur les caractéristiques de superficie et de catégorie des immeubles issues de la matrice cadastrale, qui présentent le caractère de critères objectifs ayant permis une comparaison ;

10. Considérant, en troisième lieu, que si M. et Mme A soutiennent que l'administration s'est méprise sur la superficie exacte de l'immeuble à évaluer, qui devait être une surface hors oeuvre nette totale de 499 m² et non pas une surface réelle de 543 m², cette différence n'a pas pour effet de regarder la méthode comme erronée dès lors que le rapport établi en avril 2010 par un expert judiciaire dans le cadre d'un litige commercial procède d'une analyse de plans réduits d'architecte dressés en avril 2009 alors que le service s'est appuyé sur les données de surface totale, certes moins affinées mais plus objectives, de la matrice cadastrale, lesquelles permettaient de comparer utilement les locaux entre eux ; que la circonstance que le rapport d'expertise d'avril 2010 était plus précis sur les coefficients de commercialité affectés aux différentes zones du magasin n'est pas davantage de nature à invalider ou priver de sa pertinence la comparaison effectuée, dès lors que le service a fait la part, pour chaque terme de référence retenu, entre la surface affectée au commerce et celle affectée à l'habitation rapportées à la surface cadastrale et qu'il a, une nouvelle fois, utilisé les mêmes critères de comparaison ; que, par suite, le moyen tiré d'une grave erreur matérielle entachant le calcul des superficies doit être écarté ;

11. Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte des deux rapports d'expertise établis les 8 et 14 septembre 2010 dans le cadre d'une procédure de péril imminent frappant l'immeuble en cause ainsi que d'un rapport d'architecte du 22 octobre 2010, que ce bien menaçant ruine était atteint depuis plusieurs dizaines d'années d'un vice de conception relatif au mauvais état du mur mitoyen avec l'immeuble situé au 26 de la rue Neuve et que la fragilité de cette structure porteuse a été aggravée par des travaux d'aménagement entrepris dans le magasin au cours de l'année 2003 et peut-être avant cette date ; que si ces phénomènes, révélés plus de sept ans après la cession de parts intervenue le 30 janvier 2003, ont une origine antérieure ou contemporaine de cette opération, ils n'étaient pas connus des parties à cette transaction, qui a été convenue moyennant un prix qui n'en tenait pas compte ; que le rapport d'un huissier de justice constatant un état dégradé des parties dévolues à l'habitation au cours de l'année 2006 n'a pas plus d'incidence sur cette appréciation de la valeur vénale à la date de la cession ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la méthode de l'administration est viciée ou sommaire au motif qu'elle ne tient pas compte de l'état inhérent du bien à évaluer doit être écarté ;

12. Considérant, en cinquième lieu, qu'il est vrai, comme le soutiennent M. et Mme A, que l'exercice de comparaison auquel s'est livré le vérificateur souffre de plusieurs imperfections liées en particulier à l'absence d'indication sur le mode juridique d'occupation des surfaces de commerce et d'habitation des locaux à usage mixte choisis et à l'absence de précision du commerce exercé dans les murs ; que, toutefois, la portée de ces imprécisions doit être relativisée dès lors que la méthode d'évaluation par comparaison du local n'est qu'une des modalités de détermination de la valeur vénale des titres de participation en litige ; que les termes de référence se situent dans les rues Neuve, de Béthune et de la Vieille Comédie, dans le secteur piétonnier du centre-ville commerçant de Lille, à la seule exception du local de la rue des Trois Couronnes qui, bien que non piétonnière, est située à proximité immédiate de la place du Général de Gaulle, soit dans un secteur également très commerçant ; que, contrairement à ce que soutiennent les défendeurs à l'appel, l'administration a suffisamment tenu compte de l'état de vétusté de l'immeuble à évaluer, classé dans la catégorie 5 " assez confortable ", soit un état plus dégradé que les trois termes de comparaison principaux et les deux termes d'appoint, tous classés dans les catégories 5M intermédiaire, 6 " ordinaire " ou 7 " médiocre " ; que, dès lors qu'il n'est pas établi par les photographies et les documents versés au dossier que le classement de l'ensemble des immeubles à évaluer et pris comme terme de comparaison était erroné, l'appréciation de l'administration, favorable aux contribuables, compense les imprécisions relevées ci-dessus ; que si deux locaux pris comme termes de comparaison principaux présentent des surfaces totales, et commerciales, nettement inférieures aux superficies totale et commerciale du local à évaluer, respectivement de 543 m² et 177 m², le troisième terme de référence principal présente, à l'inverse, une surface totale comparable de 551 m², dont une surface vouée au commerce de 331 m² significativement plus importante ; que la proportion, variable, des surfaces affectées au logement et au commerce de chaque local de référence ne leur ôte pas davantage leur caractère de terme de comparaison efficace ; que, par suite, les différences de caractéristiques entre ces immeubles, au demeurant admises par le ministre, ne sont pas de nature à retirer sa pertinence à la méthode comparative suivie, laquelle a porté sur des biens intrinsèquement similaires et présentant des valeurs au m² homogènes, variant de 2 295 à 3 154 euros ;

13. Considérant, en sixième lieu, que, par cette méthode par comparaison, le service justifie que le prix au m² s'élève à 2 669 euros, conférant à l'immeuble du 28 rue Neuve une valeur vénale de 1 449 267 euros, nettement supérieure à celle de 278 524 euros convenue entre les parties à l'acte de cession de parts remis en cause ; que la somme de 1 449 267 euros, qui se substituait à la valeur nette comptable de 101 217 euros inscrite au bilan de la SARL Au Corset d'Or, ne devait pas être diminuée de ce dernier montant ; que, par ajout des capitaux propres retenus pour leur valeur d'inscription à 57 223 euros, le service était en droit d'arrêter la valeur patrimoniale à 1 506 490 euros, soit une valeur mathématique unitaire de 2 430 euros ;

14. Considérant, en septième lieu, que la valeur de productivité de la SARL Au Corset d'Or a été calculée suivant une méthode ayant consisté à convertir en capital le résultat net moyen de cette entreprise des trois exercices précédant la cession, à savoir les années 2000 à 2002 ; qu'il est exact, comme le soutiennent M. et Mme A, que l'indemnité d'éviction de 5 millions de francs (762 245 euros), versée au cours l'année 2000 au locataire alors en place dans l'immeuble situé au 28 rue Neuve à Lille, n'a eu d'autre finalité que de redonner ce bien en location à des conditions significativement plus favorables puisque le loyer convenu avec le nouveau preneur, par contrat signé le 21 octobre 1999, est de près de six fois supérieur ; que, cependant, cette charge, qui pouvait venir en déduction des résultats imposables de l'exercice 2000 de la SARL Au Corset d'Or pour le calcul de l'impôt sur les sociétés dû au titre de cet unique exercice, n'est pas représentative de la valeur intrinsèque de cette entreprise dont la rentabilité doit s'apprécier sur la base d'un bénéfice présumé reproductible, assis par voie de conséquence sur un résultat net courant, évalué indépendamment des charges et produits exceptionnels enregistrés à un moment isolé de son existence ; que, par suite, l'administration, qui était en droit de neutraliser ledit montant de 762 245 euros dans le calcul de la rentabilité moyenne de l'entreprise, apporte la preuve que son bénéfice moyen s'élève, après impôts, à 158 035 euros ;

15. Considérant, en huitième lieu, qu'en énonçant que l'indemnité d'éviction versée dans les conditions qui viennent d'être exposées s'analyse en une charge de l'exercice et non pas en une dépense ayant pour effet d'acquérir un élément d'actif, le paragraphe n° 10 de la documentation administrative n° 4 C-2111 ne contient pas de position sur les règles de détermination de la valeur globale d'une entreprise ; que, par suite, M. et Mme A ne sont pas fondés à s'en prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

16. Considérant, en neuvième lieu, que la méthode de capitalisation des bénéfices repose sur une estimation de bénéfices réputés constants, évalués sur la base de données comptables existantes, et non pas sur une estimation probable de bénéfices futurs reposant sur des hypothèses de croissance espérée ; que, par suite, et conformément à une pratique générale de calcul de la capitalisation du bénéfice à l'infini, le service pouvait légalement appliquer au bénéfice moyen calculé suivant les modalités définies ci-dessus, un taux de capitalisation de base égal au taux de rendement des emprunts d'Etat à long terme de 2,80 % qui, après prise en compte d'une hypothèse d'inflation, s'élève à 2,68 % ; que ce taux de base pouvait, à bon droit, être majoré d'une prime de risque de 1,50 % calculée en prenant en compte le taux historique du marché français dans un secteur à faible risque eu égard à l'activité de bailleur exercée par la SARL Au Corset d'Or ; que le taux de capitalisation, arrondi à 4,20 %, justifié par le service ne peut pas être remplacé par un taux compris entre 9 et 11 % proposé par les contribuables intimés, dès lors que la référence au taux de rendement d'un placement immobilier n'est pas adaptée à la recherche de la valeur intrinsèque d'une entreprise commerciale et que M. et Mme A ne justifient pas de l'existence de l'usage dont ils se prévalent pour retenir un tel pourcentage ; que, par suite, le service était en droit d'arrêter la valeur totale du bénéfice capitalisé à la somme de 3 762 738 euros, soit une valeur de productivité unitaire de 6 069 euros ;

17. Considérant, en dixième lieu, que, pour définir la valeur moyenne des titres de la SARL Au Corset d'Or, le service avait, dans un premier temps, intégré par erreur dans son patrimoine le droit au bail afférent à l'occupation du local du 28 rue Neuve, alors pourtant que cet élément constitutif du fonds de commerce appartient au preneur, conférant dans la même proportion à l'actif du bailleur une prépondérance immobilière qui justifiait que la valeur mathématique fût affectée d'un coefficient de 3 dans le calcul de la moyenne des valeurs ; qu'ayant, dans un second temps, renoncé à majorer l'actif de la SARL Au Corset d'Or de ce droit au bail, l'administration, qui a observé que le facteur de la rentabilité présentait un caractère important en raison du montant des loyers acquittés par le preneur entré dans les lieux en 2000 et de l'augmentation significative de ces loyers en application d'une clause d'indexation, apporte la preuve de ce que chacune des deux valeurs entrant dans le calcul de la moyenne devait se voir appliquer un coefficient de pondération égal ; que, par suite, le service était, après application d'un abattement de 20 % destiné à tenir compte de l'absence de liquidité des titres de participation, en droit d'arrêter la valeur moyenne totale du capital de la SARL Au Corset d'Or à la somme de 2 052 820 euros, définie au stade de sa réponse aux observations des contribuables, soit une valeur unitaire de 3 311 euros ;

18. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'administration apporte la preuve de ce que le prix unitaire d'un euro, auquel a été fixé la valeur des parts du capital de la SARL Au Corset d'Or, ne reflète pas le prix du marché ; qu'en expliquant que ce prix symbolique se justifiait par sa situation nette négative provoquée par la prise en charge de l'indemnité d'éviction de 5 millions de francs (762 245 euros) déjà mentionnée par la SA Macge Fool Town, M. et Mme A n'apportent aucune justification de l'avantage propre que cette société a retiré de cette cession consentie à un prix notablement inférieur à la valeur réelle des titres de sa filiale ; que, par suite, à concurrence de l'insuffisance du prix stipulé, le ministre démontre, d'une part, l'existence d'un écart significatif entre le prix convenu et la valeur vénale du bien cédé et, d'autre part, l'intention, pour la société, d'octroyer et, pour les contribuables, de recevoir, une libéralité du fait des conditions de la cession ;

Sur les majorations :

19. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts, alors applicable : " 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie (...) " ;

20. Considérant que l'administration fait valoir que les actionnaires de la SA Macge Fool Town, en ayant accepté de recevoir, à un prix très minoré, les titres de la SARL Au Corset d'Or, soit des valeurs d'actif qu'ils savaient importantes en raison de la revalorisation très significative du loyer acquitté par le preneur arrivé dans l'immeuble du 28 rue Neuve au cours de l'année 2000, ont délibérément mis en place l'octroi d'une libéralité anormale que leur position de dirigeants de ces deux entreprises a permis d'organiser ; que, ce faisant, le ministre requérant établit l'intention de M. et Mme A de se soustraire à l'impôt ;

21. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT est fondé à faire valoir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a prononcé la décharge des impositions contestées ; qu'il y a lieu d'annuler ce jugement et de rétablir les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme A ont été assujettis au titre de l'année 2003 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

22. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

23. Considérant qu'en vertu de ces dispositions, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par M. et Mme A doivent, dès lors, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0902675 du 7 juillet 2011 du tribunal administratif de Lille est annulé.

Article 2 : Les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme A ont été assujettis au titre de l'année 2003 sont remises à leur charge, ainsi que les pénalités correspondantes.

Article 3 : Les conclusions de M. et Mme A présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Marc A et au MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES.

Copie sera adressée au directeur chargé de la direction de contrôle fiscal Nord.

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N°11DA01596


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11DA01596
Date de la décision : 31/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Redressement - Notification de redressement - Motivation.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables - Revenus distribués - Notion de revenus distribués - Imposition personnelle du bénéficiaire.


Composition du Tribunal
Président : M. Mortelecq
Rapporteur ?: M. Patrick Minne
Rapporteur public ?: M. Marjanovic
Avocat(s) : SELARL DOXA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2012-12-31;11da01596 ?
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