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04/06/2013 | FRANCE | N°11MA03038

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 04 juin 2013, 11MA03038


Vu la requête enregistrée par télécopie le 29 juillet 2011 et régularisée par courrier le

1er août 2011, présentée pour le Département des Bouches-du-Rhône, 52 avenue de Saint-Just à Marseille (13256) cedex 20, par Me H...G... ; Il demande à la Cour :

- d'annuler le jugement n° 0905121 et 0907161 rendu le 1er juin 2011 par le tribunal administratif de Marseille ;

- de rejeter les requêtes de M.E... ;

- de mettre à la charge de M. E...le paiement d'une somme de 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice admi

nistrative ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi...

Vu la requête enregistrée par télécopie le 29 juillet 2011 et régularisée par courrier le

1er août 2011, présentée pour le Département des Bouches-du-Rhône, 52 avenue de Saint-Just à Marseille (13256) cedex 20, par Me H...G... ; Il demande à la Cour :

- d'annuler le jugement n° 0905121 et 0907161 rendu le 1er juin 2011 par le tribunal administratif de Marseille ;

- de rejeter les requêtes de M.E... ;

- de mettre à la charge de M. E...le paiement d'une somme de 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

Vu le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision en date du 1er septembre 2012 du président de la cour administrative d'appel de Marseille portant désignation, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, de M. Philippe Renouf, président assesseur, pour présider les formations de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Gonzales, président de la 8ème chambre ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 mai 2013 :

- le rapport de Mme Vincent-Dominguez, rapporteur,

- les conclusions de Mme Hogedez, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., substituant MeD..., pour M. E... ;

1. Considérant que, par une décision en date du 18 juin 2009, M.E..., adjoint technique territorial de 2ème classe exerçant les fonctions de chef cuisinier au sein du collège Pont-de-Vivaux de Marseille a été exclu temporairement de ses fonctions pendant une durée de deux mois en raison d'anomalies dans la gestion des stocks, de la découverte d'aliments périmés depuis plusieurs mois, voire plusieurs années, d'un défaut d'entretien des cuisines et du matériel et d'un comportement irrespectueux envers son entourage professionnel ; que ledit arrêté prévoyait que cette sanction serait exécutée du 26 juin 2009 au 26 août 2009 ; que, toutefois, M. E... ayant été placé, par arrêté du 17 juillet 2009, en congé de longue maladie du 22 décembre 2008 au 21 décembre 2009, le président du Conseil général des Bouches-du-Rhône a décidé, par arrêté du 31 août 2009, de reporter l'exécution de son précédent arrêté au retour du congé de maladie de l'intéressé ; que, par un jugement en date du 1er juin 2011, le tribunal administratif de Marseille, estimant que l'arrêté du 18 juin 2009 avait été retiré par l'article 1er de l'arrêté du 31 août 2009, a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions présentées par M. E... dans le cadre d'une requête enregistrée sous le n° 0905121 tendant à l'annulation du premier arrêté et annulé, dans le cadre de conclusions présentées dans le dossier n° 097161, l'article 2 du second arrêté au motif qu'il avait pour effet de reporter l'exécution d'un arrêté qui avait disparu de l'ordonnancement juridique ; que le département des Bouches-du-Rhône interjette appel dudit jugement ;

Sur l'interprétation de l'arrêté du 31 août 2009 :

2. Considérant que si l'article 1er de l'arrêté du 31 août 2009 a employé le verbe "retirer", l'intention de l'administration, qui se révèle tant par les visas que par le dispositif même dudit arrêté et notamment son article 2, était uniquement, du fait de l'intervention de l'arrêté du 17 juillet 2009 plaçant M. E...en congé de longue maladie du 22 décembre 2008 au 21 décembre 2009, de procéder au retrait de l'arrêté du 18 juin 2009 en tant qu'il prévoyait une exécution du 26 juin 2009 au 26 août 2009 et de reporter l'exécution de celui-ci au retour du congé de maladie de l'agent ;

3. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède, en l'absence de retrait de la décision de sanction prononcée le 18 juin 2009 à l'encontre de M.E..., que le département des Bouches-du-Rhône est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions présentées par M. E...tendant à l'annulation de ladite décision ; qu'il y a lieu d'annuler ledit jugement et de statuer, dans cette mesure, par la voie de l'évocation ;

4. Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'interprétation précitée que le département des Bouches-du-Rhône est également fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a annulé l'article 2 de l'arrêté du

31 août 2009 comme ayant entendu reporter l'exécution d'un acte qui aurait été retiré ; qu'il y a lieu, par suite, d'annuler également ledit jugement en tant qu'il a annulé l'article 2 de l'arrêté du 31 août 2009 et de statuer dans cette mesure, par l'effet dévolutif de l'appel, sur les conclusions présentées par M.E... ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne la légalité externe :

5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 3221-1 du code général des collectivités territoriales : " Le président du conseil général est l'organe exécutif du département. / Il prépare et exécute les délibérations du conseil général " ; qu'aux termes de l'article L. 3221-3 du même code : " (...) Le président du conseil général est le chef des services du département. Il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, donner délégation de signature en toute matière aux responsables desdits services " ; qu'il résulte desdites dispositions que le président du conseil général peut, y compris en ce qui concerne la matière disciplinaire, donner délégation de signature ;

6. Considérant que Mme F...A..., directeur général des services du département des Bouches-du-Rhône a, par arrêté en date du 16 juillet 2008, publié au recueil des actes administratifs du département le 1er août 2008, reçu délégation de signature en toutes matières à l'exception, en ce qui concerne la fonction publique, des titularisations, recrutements et ordres de missions pour les déplacements internationaux ; que cette délégation de signature, dont aucune disposition législative ni règlementaire n'imposait qu'elle soit, comme le soutient M.E..., rédigée de "manière positive", était suffisamment précise ; que, par ailleurs,

Mme A...n'a pas signé en son nom propre mais pour le Président du Conseil général ; que le moyen tiré de l'incompétence du signataire des arrêtés des 18 juin 2009 et 31 août 2009 doit donc, en toutes ses branches, être écarté ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que tant l'arrêté du 18 juin 2009 que l'arrêté du

31 août 2009, précisent de manière suffisamment circonstanciée les circonstances de droit et de fait qui les fondent ;

8. Considérant, en troisième lieu, que le dossier disciplinaire d'un agent n'a pas, eu égard à l'exigence de secret médical, à comporter de documents relatifs à l'état de santé de l'agent ; qu'en tout état de cause, si M. E...soutient que les droits de la défense auraient, pour ce motif, été méconnus, il ressort des pièces du dossier et notamment du mémoire présenté par M. E...en vue de la réunion du conseil de discipline, que ce dernier a communiqué audit conseil les éléments médicaux qu'il estimait utile de porter à sa connaissance ; que, par ailleurs, si M. E...fait valoir que son dossier était également incomplet en ce qu'il ne comportait pas le rapport établi par les autorités sanitaires, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'autorité administrative se serait fondée sur d'autres rapports que ceux en date des 19 décembre 2008,

16 et 22 janvier 2009 dont M. E...a eu connaissance ni d'ailleurs que les autorités sanitaires auraient, outre les vérifications effectuées par la direction de l'établissement, procédé à un tel contrôle ; que le moyen tiré de l'incomplétude du dossier communiqué à M. E...doit donc, en toutes ses branches, être écarté ;

En ce qui concerne la légalité interne :

9. Considérant, en premier lieu, qu'a été reproché à M. E...un défaut d'entretien des cuisines et du matériel qui s'y trouve ; que toutefois, ce reproche apparaît pour la première fois dans un rapport établi par le principal du collège le 22 janvier 2009 alors qu'à cette date, l'intéressé était depuis un mois en congé de maladie ; qu'il n'est donc pas établi par les pièces du dossier que le défaut d'entretien allégué, à le supposer établi, serait imputable à M.E... ;

10. Considérant, en deuxième lieu, qu'ont également été reprochées à M. E...des disparitions puis réapparitions de marchandises ; que s'il n'est pas suffisamment établi, bien que M. E...ait été bénéficiaire d'un logement de fonction et ait eu la clef des locaux, qu'il aurait été l'auteur de réapparitions suspectes desdites marchandises, il ressort, en revanche, des pièces du dossier, et notamment d'un contrôle diligenté le 5 décembre 2008, soit avant que M. E...ne soit placé en congé de maladie, qu'il existait un certain nombre d'anomalies dans la gestion des stocks, certains produits commandés et réceptionnés ne figurant pas en stock et n'ayant pas été utilisés pour la préparation des repas ; que si M. E...soutient qu'il ne lui appartenait pas de gérer les stocks et n'avait pas été formé à cette fin, il résulte de la fiche de poste afférente à l'emploi de chef de cuisine que, contrairement à ce qu'il soutient, cette tâche lui incombait ;

11. Considérant, en troisième lieu, qu'il a été également reproché à M. E...d'avoir conservé des aliments périmés depuis plusieurs mois, voire plusieurs années ; que si M. E...fait valoir que c'est uniquement la date limite d'utilisation optimale et non la date limite de consommation qui avait été dépassée, il a néanmoins fait preuve d'un comportement très négligent susceptible d'avoir des conséquences sur la qualité des repas, voire sur la santé des élèves ;

12. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier et n'est pas contesté que M. E...a eu un comportement irrespectueux, le 18 décembre 2008, à l'occasion du repas traditionnel de Noël, tant à l'égard du chef d'établissement que d'enseignants ; qu'alors même que M. E...souffrait de problèmes de santé à cette date, ce comportement était, en l'espèce, constitutif d'une faute ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'existence d'anomalies dans la gestion des stocks, la présence dans les locaux de la cuisine de denrées dont la date limite d'utilisation optimale avait été dépassée depuis fort longtemps ainsi que le comportement irrespectueux de M. E...à l'occasion du repas du 18 décembre 2008 sont établis ; que ces faits, pris dans leur globalité, révélaient non l'insuffisance professionnelle de M. E...mais un comportement fautif, susceptible de donner lieu à sanction disciplinaire ; qu'eu égard aux fautes dont la matérialité était établie, à la circonstance que M. E...avait déjà été rappelé à l'ordre en 2007 dans le cadre de sa notation, soit avant qu'il ne présente des problèmes de santé, pour des faits similaires, l'exclusion temporaire de fonctions de deux mois prononcée à son encontre n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les conclusions aux fins d'annulation présentées par M. E...doivent être rejetées ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

15. Considérant que le présent arrêt qui rejette les conclusions aux fins d'annulation présentées par M. E...n'appelle aucune mesure d'exécution ; qu'il y a lieu, par suite, de rejeter les conclusions présentées par M. E...tendant au retrait de la sanction d'exclusion temporaire de fonctions de deux mois de son dossier administratif ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

16. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

17. Considérant que les dispositions précitées font obstacle à ce que soit versée à M. E... la somme qu'il réclame en application desdites dispositions ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par le département des Bouches-du-Rhône en application des mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0905121 et 0907161 rendu le 1er juin 2011 par le tribunal administratif de Marseille est annulé.

Article 2 : Les demandes présentées par M. E...sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions présentées par le département des Bouches-du-Rhône en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...E...et au département des

Bouches-du-Rhône.

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N° 11MA030385


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11MA03038
Date de la décision : 04/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-02-01 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Caractère disciplinaire d'une mesure. Mesure présentant ce caractère.


Composition du Tribunal
Président : M. RENOUF
Rapporteur ?: Mme Aurélia VINCENT-DOMINGUEZ
Rapporteur public ?: Mme HOGEDEZ
Avocat(s) : MENDES CONSTANTE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-06-04;11ma03038 ?
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