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31/05/2016 | FRANCE | N°15MA03377

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 31 mai 2016, 15MA03377


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête enregistrée sous le n° 1304690, M. C... A...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la délibération du 20 juin 2013 par laquelle le jury académique a proposé de refuser sa titularisation ainsi que la décision du 30 août 2013 par laquelle le ministre de l'éducation nationale l'a licencié et d'enjoindre audit ministre de le titulariser dans le corps des professeurs certifiés à partir de l'année scolaire 2013/2014.

Par une requête enregistrée sous le n° 1305

900, M. A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête enregistrée sous le n° 1304690, M. C... A...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la délibération du 20 juin 2013 par laquelle le jury académique a proposé de refuser sa titularisation ainsi que la décision du 30 août 2013 par laquelle le ministre de l'éducation nationale l'a licencié et d'enjoindre audit ministre de le titulariser dans le corps des professeurs certifiés à partir de l'année scolaire 2013/2014.

Par une requête enregistrée sous le n° 1305900, M. A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 30 août 2013 par laquelle le ministre de l'éducation nationale a décidé de le licencier ainsi que la décision du recteur de l'académie d'Aix-Marseille qui y est visée, et présenté les mêmes conclusions aux fins d'injonction.

Par un jugement du 11 juin 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté les requêtes de M. A....

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 10 août 2015 et 10 mars 2016, M. A..., représenté par Me E... B...D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 11 juin 2015 ;

2°) d'annuler la délibération précitée du jury académique du 20 juin 2013 ainsi que la décision en date du 30 août 2013 par laquelle le ministre de l'éducation nationale l'a licencié ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'éducation nationale de prononcer sa titularisation dans le corps des professeurs certifiés à compter du 1er septembre 2013 avec toutes conséquences de droit ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la formation dont il a bénéficié était illégale et insuffisante pour atteindre les compétences requises ;

- le jury académique a commis une erreur manifeste d'appréciation quant à sa manière de servir.

Par un mémoire en défense enregistré le 11 février 2016, le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche conclut au rejet de la requête de M. A....

Il soutient que les moyens de la requête sont infondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 72-581 du 4 juillet 1972 ;

- l'arrêté du 22 août 2005 ;

- l'arrêté du 19 décembre 2006 ;

- les arrêtés du 12 mai 2010 ;

- l'arrêté du 15 juin 2012 ;

- le code de l'éducation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Vincent-Dominguez,

- les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public,

- et les observations de Me B...D..., représentant M.A....

1. Considérant que M. A... a été admis en 2011 au concours externe de recrutement des professeurs certifiés dans la discipline " éducation musicale et chant choral " ; qu'il a été placé en stage à compter du 1er septembre 2011 et affecté au collège Camille Claudel à Vitrolles ; que, par un arrêté en date du 29 juin 2012, le recteur de l'académie d'Aix-Marseille l'a autorisé à effectuer une seconde année de stage à compter du 1er septembre 2012 ; qu'il a alors été affecté au collège Longchamp à Marseille ; qu'à l'issue de cette deuxième année de stage, le jury académique a, par une délibération du 20 juin 2013, émis un avis défavorable à sa titularisation ; que cet avis a été transmis par le recteur de l'académie au ministre de l'éducation nationale le 26 juin 2013 ; que, par une décision en date du 30 août 2013, le ministre a décidé de licencier M. A... ; que ce dernier a demandé au tribunal administratif de Marseille, par les deux requêtes susvisées, d'annuler la délibération du jury précitée, la lettre du recteur en date du 26 juin 2013, ensemble la décision du ministre de l'éducation nationale du 30 août 2013 ; que, par un jugement en date du 11 juin 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté comme étant irrecevables les conclusions dirigées contre la lettre du recteur du 26 juin 2013 et rejeté au fond les autres conclusions de l'intéressé ; que M. A... doit être regardé comme interjetant appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation de la délibération du jury et de la décision du ministre de l'éducation nationale le licenciant ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction ;

2. Considérant, en premier lieu, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 625-1 du code de l'éducation dans sa rédaction alors applicable : " La formation des maîtres est assurée par les instituts universitaires de formation des maîtres. Ces instituts accueillent à cette fin des étudiants préparant les concours d'accès aux corps des personnels enseignants et les stagiaires admis à ces concours. / La formation dispensée dans les instituts universitaires de formation des maîtres répond à un cahier des charges fixé par arrêté des ministres chargés de l'enseignement supérieur et de l'éducation nationale après avis du Haut Conseil de l'éducation. Elle fait alterner des périodes de formation théorique et des périodes de formation pratique " ; qu'aux termes de l'article 24 du décret susvisé n° 72-581 du 4 juillet 1972 relatif au statut des professeurs certifiés dans sa rédaction issue du décret n° 2009-915 du 28 juillet 2009 : " Les candidats reçus aux concours prévus aux articles 6 et 11 ou ayant bénéficié d'une dispense en application du premier alinéa de l'article 23, et remplissant les conditions de nomination dans le corps, sont nommés fonctionnaires stagiaires et affectés pour la durée du stage dans une académie par le ministre chargé de l'éducation. / Le stage a une durée d'un an. Ses prolongations éventuelles sont prononcées par le recteur de l'académie dans le ressort de laquelle il est accompli. / Au cours de leur stage, les professeurs stagiaires bénéficient d'une formation dispensée, dans le cadre des orientations définies par l'Etat, sous la forme d'actions organisées à l'université, d'un tutorat, ainsi que le cas échéant d'autres types d'actions d'accompagnement. Les modalités du stage et les conditions de son évaluation par un jury sont arrêtées par le ministre chargé de l'éducation. " ; qu'aux termes de l'article 26 dudit décret : " A l'issue du stage, la titularisation est prononcée par le recteur de l'académie dans le ressort de laquelle le stage est accompli, sur proposition du jury mentionné à l'article 24. La titularisation confère le certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement du second degré ou le certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement technique. / Les stagiaires qui n'ont pas été titularisés peuvent être autorisés par le recteur de l'académie dans le ressort de laquelle ils ont accompli leur stage à effectuer une seconde année de stage ; celle-ci n'est pas prise en compte dans l'ancienneté d'échelon. A l'issue de cette année, ils sont titularisés dans les conditions fixées au premier alinéa. / Les stagiaires qui n'ont pas été autorisés à accomplir une seconde année de stage ou qui, à l'issue de la seconde année de stage, n'ont pas été titularisés sont soit licenciés, soit réintégrés dans leur corps ou cadre d'emplois d'origine s'ils avaient la qualité de fonctionnaire " ;

3. Considérant, d'autre part, que, par l'article 3 d'un arrêté en date du 12 mai 2010 portant définition des compétences à acquérir par les professeurs, documentalistes et conseillers principaux d'éducation pour l'exercice de leur métier, le ministre de l'éducation nationale a abrogé l'arrêté du 19 décembre 2006 portant cahier des charges de la formation des maîtres en institut universitaire de formation des maîtres ; que cependant, le Conseil d'Etat, par arrêt n° 341775, 343288, 343336, 343362 du 28 novembre 2011, a, au motif de l'incompétence du seul ministre de l'éducation nationale, annulé l'article 3 dudit arrêté en tant qu'il abrogeait les dispositions de l'arrêté interministériel du 19 décembre 2006 portant cahier des charges de la formation des maîtres en institut universitaire de formation des maîtres autres que celles de son article 5 et de la troisième partie de son annexe ; que, par un arrêt postérieur du 1er juin 2012, le Conseil d'Etat a modulé dans le temps les effets de cette annulation en jugeant que celle-ci prendrait effet à la date du 31 juillet 2012 ; qu'avant que soit remis en vigueur l'arrêté interministériel du 19 décembre 2006, le ministre de l'éducation nationale et le ministre de l'enseignement supérieur ont, le 15 juin 2012, conjointement édicté un arrêté fixant le cahier des charges de la formation des professeurs, documentalistes et conseillers principaux d'éducation abrogeant celui du 19 décembre 2006 ; que ledit arrêté du 15 juin 2012 était applicable au titre de l'année scolaire 2012-2013, soit au titre de la 2ème année de stage de M. A... qui n'est, dès lors, pas fondé à se prévaloir des dispositions du cahier des charges du 19 décembre 2006 ; qu'il résulte de l'article 1.2 de l'annexe du cahier des charges de la formation des maîtres du 15 juin 2012 que : " L'année qui suit le concours permet de consolider les compétences professionnelles construites dans le cadre du cursus universitaire et de retravailler celles qui feraient éventuellement encore défaut. / A l'issue du concours, les fonctionnaires stagiaires sont placés en situation d'exercice du métier et affectés dans une école ou un établissement scolaire. La formation lors de l'année de stage se compose, d'une part, d'un dispositif d'accueil, d'aide à la prise de fonction, puis d'accompagnement et de tutorat tout au long de l'année et, d'autre part, de cycles ou de sessions de formation pédagogique et didactique. Le volume de formation et d'accompagnement dispensé est équivalent, au plus, à un tiers de l'obligation réglementaire de service du corps auquel appartient le stagiaire (...) " ; que l'obligation réglementaire de service des professeurs certifiés est de 18 h en application de l'article 1er du décret n° 50-581 du 25 mai 1950 portant règlement d'administration publique pour la fixation des maxima de service hebdomadaire du personnel enseignant des établissements d'enseignement du second degré dans sa rédaction alors applicable ; que si les dispositions précitées fixent un volume maximal de formation au tiers de l'obligation réglementaire de service, soit 6 h, elles ne fixent pas, en revanche, de seuil minimal ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui avait, au demeurant, déjà suivi une formation lors de sa première année de stage, a bénéficié, au titre de sa seconde année de stage, de 3 h de décharge de service, accomplissant ainsi 15 h d'enseignement, les heures effectuées au titre de la chorale n'entrant pas dans ses obligations de service, et de

105 heures de formation pédagogique et didactique auxquelles se sont ajoutées, d'une part, quelques heures dans le cadre du dispositif d'accueil et, d'autre part, une cinquantaine d'heures de tutorat individualisé ; que les conditions du déroulement du stage de M. A... lors de sa deuxième année de stage n'étaient ni contraires aux dispositions précitées de l'arrêté du 15 juin 2012 ni insuffisantes ;

4. Considérant, enfin, que si M. A... se prévaut des dispositions de l'arrêté du 22 août 2005 relatif aux conditions d'accomplissement du stage et de la formation de certains personnels stagiaires de l'enseignement du second degré relevant du ministre chargé de l'éducation, il est constant que ledit arrêté avait été abrogé par l'article 9 de l'arrêté du 12 mai 2010 fixant les modalités d'évaluation et de titularisation de certains personnels stagiaires de l'enseignement du second degré relevant du ministre chargé de l'éducation, lequel n'a pas été annulé par le Conseil d'Etat par l'arrêt précité du 28 novembre 2011 ; que, par suite, M. A... n'est pas fondé à se prévaloir de la méconnaissance des dispositions dudit arrêté du 22 août 2005 qui n'étaient plus en vigueur lors de sa seconde année de stage ;

5. Considérant, en second lieu, que les jurys académiques, appelés notamment à se prononcer en vue de la titularisation des professeurs stagiaires nommés dans certains corps, statuent à l'issue d'une période de formation et de stage ; que s'agissant non d'un concours ou d'un examen mais d'une procédure tendant à l'appréciation de la manière de servir qui doit être faite en fin de stage, cette appréciation est contrôlée par le juge de l'excès de pouvoir ;

6. Considérant qu'il ressort du rapport d'inspection pédagogique régionale - éducation musicale - en date du 23 mai 2013 que le contenu de la séance, dont les deux tiers consistaient en une dictée ininterrompue, était improvisé, que les élèves étaient confrontés à une absence totale de pratique à caractère expérimental, que le répertoire choisi par M. A... n'était pas adapté au public scolaire, que celui-ci faisait preuve d'un manque d'écoute à l'égard de ses élèves et que sa pédagogie était " catastrophique " ; que, par ailleurs, le chef d'établissement du collège Longchamp a également émis, le 22 mai 2013, un avis défavorable à la titularisation de l'intéressé en soulignant ses importantes difficultés dans la gestion des classes, bien que celles-ci aient pu effectivement, ainsi que cela ressort des pièces du dossier, être, pour certaines d'entre elles, difficiles, et le fait que le requérant s'est très peu intéressé à la vie de l'établissement ; que, par ailleurs, il ressort également du rapport du tuteur de M. A..., bien que celui-ci ait, par lettre du 10 juillet 2015 produite en appel, atténué la portée de ses propos, que l'année de stage de l'intéressé avait été " paradoxale " ; que ce rapport expliquait en effet que si celui-ci pouvait être regardé comme un professeur sérieux, assidu et disposant de solides connaissances en musicologie, il faisait, en revanche, preuve de nonchalance et de passivité et ne brillait pas par son ouverture et son intégration au sein de l'équipe enseignante ; qu'il en résulte également que les séquences de M. A... ne trouvaient pas toujours l'écho souhaité devant les élèves, l'enseignement étant peu interactif et participatif ; qu'enfin, il résulte de la fiche récapitulative des éléments d'évaluation du stage, laquelle a été signée non seulement par le chef d'établissement et l'inspecteur pédagogique régional, mais également par le tuteur du requérant, que neuf compétences sur les dix requises n'étaient, au terme de cette seconde année de stage, pas acquises ; qu'il suit de là que c'est sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation que, par sa délibération du 20 juin 2013, le jury académique a émis un avis défavorable à la titularisation de M. A... ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation de la délibération du jury académique du 20 juin 2013 et de la décision du 30 août 2013 par laquelle le ministre de l'éducation nationale, qui avait compétence liée, a prononcé son licenciement ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

9. Considérant que les dispositions précitées font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, le paiement de la somme demandée par M. A... ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Délibéré après l'audience du 10 mai 2016, où siégeaient :

- M. Gonzales, président,

- M. Renouf, président assesseur,

- Mme Vincent-Dominguez, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 31 mai 2016.

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N° 15MA03377


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA03377
Date de la décision : 31/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-03-04-01 Fonctionnaires et agents publics. Entrée en service. Stage. Fin de stage.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: Mme Aurélia VINCENT-DOMINGUEZ
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : MCL AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-05-31;15ma03377 ?
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