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24/10/2006 | FRANCE | N°06PA01447

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, Juge des reconduites a la frontiere, 24 octobre 2006, 06PA01447


Vu la requête, enregistrée le 21 avril 2006, présentée pour Mme Voahangy X, épouse Y, demeurant ...), par Me X... ; Mme Y demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0602825/8 du 24 mars 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 13 février 2006 décidant sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer, sous astreinte de 300 euros par jo

ur de retard, une autorisation provisoire de séjour et de travail ;

4°) de mettre à la charg...

Vu la requête, enregistrée le 21 avril 2006, présentée pour Mme Voahangy X, épouse Y, demeurant ...), par Me X... ; Mme Y demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0602825/8 du 24 mars 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 13 février 2006 décidant sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer, sous astreinte de 300 euros par jour de retard, une autorisation provisoire de séjour et de travail ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du 1er septembre 2006 par laquelle le président de la cour a délégué les pouvoirs qui lui sont attribués par l'article L.512-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à M. Y... ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 octobre 2006 :

- le rapport de M. Y..., magistrat délégué,

- les observations de Me X..., pour Mme Y,

- et les conclusions de Mme Giraudon, commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ... 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé, ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ... » ; qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Y s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 10 octobre 2005, de la décision du préfet de police du 7 octobre 2005 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ;

Considérant que Mme Y soutient qu'elle est entrée en France en 1998 avec son mari et sa fille née à Madagascar en 1992, qu'elle est venue rejoindre sa mère, qui réside en France depuis plus de quinze ans, ainsi que douze de ses quatorze frères et soeurs, qui sont soit de nationalité française soit titulaires d'un titre de séjour, et que ses deux filles, dont la plus jeune est née à Créteil en 1999, sont scolarisées en France ; qu'au regard des pièces du dossier et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment de l'âge des deux enfants de l'intéressée qui sont scolarisées en France depuis plusieurs années et du degré d'intégration de l'ensemble de la famille, l'arrêté attaqué du 13 février 2006 décidant sa reconduite à la frontière a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il a, par suite, méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme Y est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 13 février 2006 décidant sa reconduite à la frontière ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé, … l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas » ; qu'il y a lieu, par application de cette disposition, d'ordonner au préfet de police de délivrer une autorisation provisoire de séjour à Mme Y et de se prononcer sur son droit à un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les frais irrépétibles :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à Mme Y la somme de 1000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du 24 mars 2006 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 13 février 2006 du préfet de police ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Y sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à Mme Y une autorisation provisoire de séjour et de statuer sur son droit à un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Mme Y la somme de 1000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme Y est rejeté.

N° 06PA01447

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : Juge des reconduites a la frontiere
Numéro d'arrêt : 06PA01447
Date de la décision : 24/10/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. le Prés François JANNIN
Rapporteur public ?: Mme GIRAUDON
Avocat(s) : GUILLOU

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2006-10-24;06pa01447 ?
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