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23/02/2004 | FRANCE | N°259260

France | France, Conseil d'État, 9eme et 10eme sous-sections reunies, 23 février 2004, 259260


Vu le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, enregistré le 6 août 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande au Conseil d'Etat d'annuler l'article 1er de l'ordonnance du 23 juillet 2003 par lequel le juge des référés du tribunal administratif de Paris, faisant partiellement droit à la demande de la SA Tekelec Airtronic, a suspendu l'exécution de l'avis de mise en recouvrement émis le 16 juin 2003 par le receveur des impôts de Sèvres pour le paiement des compléments de taxe sur

la valeur ajoutée et des pénalités dont ils sont assortis a...

Vu le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, enregistré le 6 août 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande au Conseil d'Etat d'annuler l'article 1er de l'ordonnance du 23 juillet 2003 par lequel le juge des référés du tribunal administratif de Paris, faisant partiellement droit à la demande de la SA Tekelec Airtronic, a suspendu l'exécution de l'avis de mise en recouvrement émis le 16 juin 2003 par le receveur des impôts de Sèvres pour le paiement des compléments de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités dont ils sont assortis auxquels ladite société a été assujettie au titre de la période du 1er mai 1998 au 31 décembre 1998 ainsi que de l'amende prévue à l'article 1740 ter du code général des impôts, pour un montant total de 2 121 992 euros ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Laignelot, Auditeur,

- les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, avocat de la SA Tekelec Airtronic,

- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du recours :

Considérant que l'article L. 521-1 du code de justice administrative dispose : Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une demande en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ; qu'aux termes de l'article R. 190-1 du livre des procédures fiscales : Le contribuable qui désire contester tout ou partie d'un impôt qui le concerne doit d'abord adresser une réclamation au service territorial, selon le cas, de l'administration des impôts ou de l'administration des douanes et droits indirects dont dépend le lieu de l'imposition (..) ; que l'article L. 199 de ce livre dispose : (..) Les décisions rendues par l'administration sur les réclamations contentieuses et qui ne donnent pas entière satisfaction aux intéressés peuvent être portées devant le tribunal administratif (..) ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 277 du même livre : Le contribuable qui conteste le bien-fondé ou le montant des impositions mises à sa charge peut, s'il en a expressément formulé la demande dans sa réclamation et précisé le montant ou les bases du dégrèvement auquel il estime avoir droit, être autorisé à différer le paiement de la partie contestée de ces impositions et des pénalités y afférentes. Le sursis de paiement ne peut être refusé au contribuable que s'il n'a pas constitué auprès du comptable les garanties propres à assurer le recouvrement de la créance du Trésor ; que le quatrième alinéa de cet article prévoit : A défaut de constitution de garanties ou si les garanties offertes sont estimées insuffisantes, le comptable peut prendre des mesures conservatoires pour les impôts contestés. L'exigibilité de la créance et la prescription de l'action en recouvrement sont suspendues jusqu'à ce qu'une décision définitive ait été prise sur la réclamation soit par l'administration, soit par le tribunal compétent ; qu'enfin, aux termes de l'article R.* 277-1 dudit livre : Le comptable compétent invite le contribuable qui a demandé à différer le paiement des impositions à constituer les garanties prévues à l'article L. 277. Le contribuable dispose d'un délai de quinze jours à compter de la réception de l'invitation formulée par le comptable pour faire connaître les garanties qu'il s'engage à constituer. (...) Si le comptable estime ne pas pouvoir accepter les garanties offertes par le contribuable (...), il lui notifie sa décision par lettre recommandée ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que, lorsqu'un contribuable a régulièrement déposé la demande de sursis visée au premier alinéa de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales, et tant que le comptable n'a pas rejeté cette demande dans les formes prévues par l'article R.*277-1 du même livre, l'impôt dont le contribuable réclame le dégrèvement ou la réduction n'est plus exigible et ne peut donner lieu à la prise de mesures conservatoires ;

Considérant qu'il suit de là que le dépôt régulier d'une demande tendant, sur le fondement de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales, à ce qu'il soit sursis au paiement d'une imposition rend irrecevables les conclusions tendant à la suspension, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de la mise en recouvrement de cette même imposition, lorsque celles-ci sont présentées avant que le comptable chargé du recouvrement de l'imposition en cause ait, le cas échéant, rejeté, dans les formes prévues par l'article R.*277-1 du livre des procédures fiscales, les garanties proposées par le contribuable à l'appui de sa demande de sursis ; qu'il ne peut en être autrement que dans le cas où le recouvrement de l'imposition litigieuse a d'ores et déjà fait l'objet de mesures d'exécution forcée ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Paris que la SA Tekelec Airtronic a régulièrement saisi le 2 juillet 2003 le service de l'assiette d'une réclamation préalable dirigée contre les rappels de taxe sur la valeur ajoutée, les pénalités dont ils ont été assortis et l'amende prévue à l'article 1740 ter du code général des impôts, auxquels elle a été assujettie le 16 juin 2003 à la suite d'une vérification de comptabilité portant, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, sur la période du 1er mai au 31 décembre 1998 ; que cette réclamation était assortie d'une demande tendant à ce qu'il soit sursis au paiement de cette imposition, dans les conditions prévues à l'article L. 277 du livre des procédures fiscales ; qu'en outre, la SA Tekelec Airtronic a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Paris d'une demande enregistrée le 3 juillet 2003, présentée sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative et tendant à ce que l'exécution de l'avis de mise en recouvrement émis le 16 juin 2003, dont il n'est pas allégué qu'il aurait donné lieu à des mesures de recouvrement forcé, soit suspendue ; qu'ainsi que le soutient le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, à la date du dépôt de cette demande de suspension, le comptable chargé du recouvrement de l'imposition litigieuse n'avait pas rejeté, dans les formes prévues à l'article R.* 277-1 précité, la demande de sursis dont il était saisi, ni même invité la société contribuable à constituer des garanties à l'appui de ses prétentions ; qu'il résulte de ce qui précède qu'à la date à laquelle le juge des référés a été saisi des conclusions de la SA Tekelec Airtronic tendant à la suspension de l'exécution de la décision d'imposition litigieuse, ces conclusions étaient irrecevables ; que, dès lors, en y faisant droit, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a entaché l'ordonnance attaquée d'une erreur de droit ; qu'il y a lieu, par suite, d'annuler cette ordonnance en tant qu'elle a accordé la suspension sollicitée, et de rejeter sur ce point la demande présentée devant le juge des référés ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la SA Tekelec Airtronic la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'article 1er de l'ordonnance du 23 juillet 2003 du juge des référés du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande de suspension de l'exécution de l'avis de mise en recouvrement du 16 juin 2003, présentée par la SA Tekelec Airtronic devant le juge des référés du tribunal administratif de Paris, est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de la SA Tekelec Airtronic présentées devant le Conseil d'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE et à la SA Tekelec Airtronic.


Synthèse
Formation : 9eme et 10eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 259260
Date de la décision : 23/02/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 23 fév. 2004, n° 259260
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Labetoulle
Rapporteur ?: M. Laignelot
Rapporteur public ?: M. Goulard
Avocat(s) : SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:259260.20040223
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