Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 novembre 2003 et 18 mars 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE CIVILE D'EXPLOITATION AGRICOLE « DOMAINE DES BAUMARD », dont le siège est ... et pour le SYNDICAT DE DEFENSE DE L'APPELLATION D'ORIGINE CONTRÔLEE « QUARTS DE CHAUME », dont le siège est en Mairie à Rochefort-sur-Loire (49190) ; la SOCIETE CIVILE D'EXPLOITATION AGRICOLE « DOMAINE DES BAUMARD » et le SYNDICAT DE DEFENSE DE L'APPELLATION D'ORIGINE CONTRÔLEE « QUARTS DE CHAUME » demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le décret du 19 septembre 2003 relatif à l'appellation d'origine contrôlée « Chaume-Premier cru des Coteaux du Layon » ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 588 euros en application de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code rural ;
Vu le code de la consommation ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Martine Jodeau-Grymberg, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de la SOCIETE CIVILE D'EXPLOITATION AGRICOLE « DOMAINE DES BAUMARD » et du SYNDICAT DE DEFENSE DE L'APPELLATION D'ORIGINE CONTRÔLEE « QUARTS DE CHAUME » et de la SCP Parmentier, Didier, avocat de l'Institut national des appellations d'origine,
- les conclusions de Mme X... de Silva, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 115 ;1 du code de la consommation : « Constitue une appellation d'origine la dénomination d'un pays, d'une région ou d'une localité servant à désigner un produit qui en est originaire et dont la qualité ou les caractères sont dus au milieu géographique, comprenant des facteurs naturels et des facteurs humains » et qu'aux termes de l'article L. 641 ;2 du code rural, dans sa rédaction applicable à la date du décret attaqué : « Les produits agricoles, forestiers ou alimentaires (…) peuvent se voir reconnaître exclusivement une appellation d'origine contrôlée (…)./ Dans les conditions prévues ci-après, ces produits peuvent bénéficier d'une appellation d'origine contrôlée s'ils répondent aux dispositions de l'article L. 115 ;1 du code de la consommation, possèdent une notoriété dûment établie et font l'objet de procédures d'agrément. / L'appellation d'origine contrôlée ne peut jamais être considérée comme présentant un caractère générique et tomber dans le domaine public. / Le nom qui constitue l'appellation d'origine ou toute autre mention l'évoquant ne peuvent être employés pour aucun produit similaire, sans préjudice des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur au 6 juillet 1990, ni pour aucun autre produit ou service lorsque cette utilisation est susceptible de détourner ou d'affaiblir la notoriété de l'appellation d'origine (…) » ;
Considérant que les vins produits à partir des terres situées autour du village de Chaume, dans la commune de Rochefort-sur-Loire, ont obtenu le bénéfice de l'appellation d'origine contrôlée « Quarts de Chaume » par décret du 10 août 1954 ; que, compte tenu de la notoriété acquise par l'appellation d'origine contrôlée « Quarts de Chaume », d'ailleurs reconnue par le comité national des vins et eaux-de-vie de l'Institut national des appellations d'origine contrôlée, l'utilisation du nom de « Chaume » associé à la mention ‘‘premier cru'' pour la création d'une nouvelle appellation « Chaume-Premier cru des Coteaux du Layon », par le décret contesté du 19 septembre 2003, correspondant à une aire de production extérieure au village de Chaume, permet à cette nouvelle appellation de bénéficier de la notoriété du « Quarts de Chaume » tout en profitant exclusivement de la mention « premier cru » ; qu'ainsi, l'utilisation du nom de « Chaume » associé à la mention ‘‘premier cru'' est de nature à susciter une confusion dans l'esprit du consommateur, à créer l'apparence d'une hiérarchisation des vins favorable à la nouvelle appellation et, par conséquent, à détourner ou affaiblir la notoriété de l'appellation « Quarts de Chaume » en violation des dispositions précitées de l'article L. 641 ;2 du code rural ; que, par suite, il y a lieu d'annuler le décret contesté du 19 septembre 2003 relatif à l'appellation d'origine contrôlée « Chaume-Premier cru des Coteaux du Layon » ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SOCIETE CIVILE D'EXPLOITATION AGRICOLE « DOMAINE DES BAUMARD » et du SYNDICAT DE DEFENSE DE L'APPELLATION D'ORIGINE CONTRÔLEE « QUARTS DE CHAUME », qui ne sont pas dans la présente instance les parties perdantes, la somme que demande l'Institut national des appellations d'origine au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme globale de 3 500 euros au titre des frais exposés par la SOCIETE CIVILE D'EXPLOITATION AGRICOLE « DOMAINE DES BAUMARD » et le SYNDICAT DE DEFENSE DE L'APPELLATION D'ORIGINE CONTROLEE « QUARTS DE CHAUME » et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le décret du 19 septembre 2003 relatif à l'appellation d'origine contrôlée « Chaume-Premier cru des Coteaux du Layon » est annulé.
Article 2 : L'Etat versera conjointement à la SOCIETE CIVILE D'EXPLOITATION AGRICOLE « DOMAINE DES BAUMARD » et au SYNDICAT DE DEFENSE DE L'APPELLATION D'ORIGINE CONTROLEE « QUARTS DE CHAUME » la somme globale de 3 500 euros au titre de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions de l'Institut national des appellations d'origine tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE CIVILE D'EXPLOITATION AGRICOLE « DOMAINE DES BAUMARD », au SYNDICAT DE DEFENSE DE L'APPELLATION D'ORIGINE CONTRÔLEE « QUARTS DE CHAUME », à l'Institut national des appellations d'origine, au ministre de l'agriculture et de la pêche, au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et au Premier ministre.