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28/04/2016 | FRANCE | N°14BX03361

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre (formation à trois), 28 avril 2016, 14BX03361


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux, d'une part, d'annuler la décision du 30 mars 2012 par laquelle le président du conseil régional d'Aquitaine a décidé de ne pas renouveler son contrat arrivant à échéance le 30 avril 2012, ensemble la décision implicite par laquelle il a rejeté le recours gracieux formé contre cette décision et a refusé de lui attribuer un contrat à durée indéterminée, d'autre part, d'enjoindre à la région Aquitaine de requalifier ses contrats de travail

durée déterminée successifs en contrat à durée indéterminée à compter du 12 mars ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux, d'une part, d'annuler la décision du 30 mars 2012 par laquelle le président du conseil régional d'Aquitaine a décidé de ne pas renouveler son contrat arrivant à échéance le 30 avril 2012, ensemble la décision implicite par laquelle il a rejeté le recours gracieux formé contre cette décision et a refusé de lui attribuer un contrat à durée indéterminée, d'autre part, d'enjoindre à la région Aquitaine de requalifier ses contrats de travail à durée déterminée successifs en contrat à durée indéterminée à compter du 12 mars 2012 et de la réintégrer dans ses fonctions ou toutes autres fonctions équivalentes sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement, et enfin, d'enjoindre à la région Aquitaine de la titulariser dans un délai de six mois à compter de sa réintégration effective, sous la même astreinte. En cours d'instance, Mme D...a, en outre, sollicité la condamnation de la région Aquitaine à lui verser une somme de 57 589,20 euros.

Par un jugement n°1202862 du 30 septembre 2014, le tribunal administratif de Bordeaux a donné acte à Mme D...de son désistement de ses conclusions indemnitaires et a rejeté le surplus de ses conclusions.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 2 décembre 2014, Mme G...D..., représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 30 septembre 2014 ;

2°) d'annuler la décision du 30 mars 2012 du conseil régional d'Aquitaine de ne pas renouveler son contrat de travail, ainsi que la décision implicite de rejet de sa demande de titularisation formée le 13 avril 2012 ;

3°) d'ordonner sa réintégration à son poste d'adjoint administratif de 2eme classe au sein de la direction logistique et patrimoine ou à tout autre poste équivalent, avec effet rétroactif au jour de la publication de la loi tel que prévu par l'article 21 de la loi du 13 mars 2012, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir ;

4°) d'enjoindre au conseil régional d'Aquitaine de procéder à sa titularisation ou à tout le moins de mettre en oeuvre le dispositif de titularisation à son profit, dans les six mois au plus tard à compter de sa réintégration effective, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à l'échéance de ces six mois ;

5°) de prendre acte de son désistement d'instance s'agissant de sa demande indemnitaire ;

6°) de mettre à la charge du conseil régional d'Aquitaine une somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique ;

- le décret n° 2012-1293 du 22 novembre 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Patricia Rouault-Chalier,

- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;

- et les observations de Mme E...et M.F..., pour le conseil régional de la Région Aquitaine- Limousin -Poitou-Charentes ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme D...a été recrutée par le conseil régional d'Aquitaine, par contrat signé le 13 juin 2006 sur le fondement du premier alinéa de l'article 3 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 afin de pourvoir, du 1er juin au 30 août 2006, au remplacement d'un premier agent titulaire, M.C..., en congé maladie. Ce contrat de travail a été reconduit du 31 août au 30 septembre 2006 afin de pourvoir à la prolongation du congé maladie du même agent. Après une interruption de trois mois, un nouveau contrat a été conclu, sur le même fondement, afin de pourvoir au remplacement d'un deuxième agent titulaire, MmeH..., en congé maladie pour la période du 2 au 31 janvier 2007. Du 1er au 28 février 2007, le contrat de travail de Mme D...a été renouvelé, toujours sur le même fondement, afin de pourvoir au remplacement d'un troisième agent titulaire, MmeA.... Le congé de maladie de cette dernière s'étant prolongé, les relations contractuelles entre Mme D...et la région Aquitaine ont été successivement reconduites jusqu'au 30 avril 2012 au moyen de trente-cinq contrats à durée déterminée, variant d'un mois à six mois, tous conclus sur le fondement du premier alinéa de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984. Par courrier du 30 mars 2012, le président du conseil régional d'Aquitaine a informé l'intéressée que son contrat de travail à durée déterminée prenant fin le 30 avril 2012 ne serait pas renouvelé. Le 13 avril 2012, Mme D...a exercé un recours gracieux à l'encontre de cette décision et sollicité sa titularisation sur le poste d'adjoint administratif qu'elle occupait. Mme D... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de non-renouvellement de son contrat de travail du 30 mars 2012 et de la décision implicite de rejet de son recours gracieux.

Sur la légalité de la décision de non-renouvellement du contrat de travail à durée déterminée :

2. Par la décision attaquée du 30 mars 2012, le président du conseil régional d'Aquitaine a décidé de ne pas renouveler le contrat de travail de MmeD..., qui arrivait à son terme le 30 avril 2012. Si une telle décision, qui ne constitue pas un licenciement en cours de contrat, n'est pas, sauf si elle revêt un caractère disciplinaire, au nombre des décisions qui doivent être motivées en application de la loi du 11 juillet 1979, elle doit néanmoins ne pas avoir été prise pour des motifs étrangers à l'intérêt du service.

3. Si Mme D...soutient que la décision litigieuse n'est pas justifiée par l'intérêt du service public, mais a eu en réalité pour but de ne pas la faire bénéficier d'un contrat à durée indéterminée, en application des dispositions de l'article 21 de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 susvisée, il est constant que l'intéressée, qui a été recrutée pour la première fois le 1er juin 2006, ne remplissait pas, à la date du 13 mars 2012 à laquelle ladite loi a été publiée, la condition de six années de services effectifs accomplis auprès de la même collectivité pour se voir obligatoirement proposer une titularisation. Il ressort, par ailleurs, des pièces du dossier qu'à la date à laquelle le président du conseil régional a décidé de ne pas renouveler le contrat de travail de MmeD..., MmeA..., qu'elle remplaçait, avait été déclarée totalement et définitivement inapte à toute fonction par le comité médical départemental réuni le 6 octobre 2011, et qu'une procédure de mise à la retraite de l'intéressée pour invalidité avait été initiée, laquelle a finalement été prononcée à compter du 4 janvier 2012. La région Aquitaine fait valoir, en outre, que le non-renouvellement du contrat s'est inscrit dans le cadre de la réflexion engagée, à partir de 2010, par la direction de la logistique et du patrimoine, en vue de la réorganisation de son service de l'accueil téléphonique, ayant conduit à la mise en oeuvre de deux plans d'action tendant, d'une part, au resserrement des horaires de travail et, d'autre part, à la réduction du nombre des appels quotidiens. Les gains de productivité ainsi obtenus ont permis, dans un premier temps, de libérer un demi poste au profit d'une autre direction, puis, dans un second temps, de supprimer le poste d'adjoint territorial qu'a occupé Mme D...jusqu'au 30 avril 2012 en remplacement de MmeA.... Il ne ressort pas des pièces du dossier que ces motifs reposeraient sur des faits matériellement inexacts ou seraient entachés d'une erreur manifeste d'appréciation ou d'un détournement de procédure, alors même que la délibération de la commission permanente modifiant le tableau des emplois et supprimant le poste de standardiste en cause n'est intervenue que le 11 février 2013. Par suite, et comme l'ont relevé à juste titre les premiers juges, qui n'ont à cet égard pas inversé la charge de la preuve, la décision de non-renouvellement du contrat ne saurait être regardée comme n'ayant pas été prise dans l'intérêt du service.

Sur la décision implicite de refus de titularisation :

4. Aux termes de l'article 13 de la loi du 12 mars 2012 susvisée : " Par dérogation à l'article 36 de la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, l'accès aux cadres d'emplois de fonctionnaires territoriaux peut être ouvert par la voie de modes de recrutement réservés valorisant les acquis professionnels, dans les conditions définies par le présent chapitre et précisées par des décrets en Conseil d'Etat, pendant une durée de quatre ans à compter de la date de publication de la présente loi. (...) ". Aux termes de l'article 14 de cette même loi : " I. - L'accès à la fonction publique territoriale prévu à l'article 13 est réservé aux agents occupant, à la date du 31 mars 2011, en qualité d'agent contractuel de droit public et, dans le cas d'agents employés à temps non complet, pour une quotité de temps de travail au moins égale à 50 % : 1° Un emploi permanent pourvu conformément à l'article 3 de la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 précitée ; (...) Les agents intéressés doivent, au 31 mars 2011, être en fonction (....) ". Aux termes de l'article 15 de cette loi : " I. - Le bénéfice de l'accès à la fonction publique territoriale prévu à l'article 13 est subordonné, pour les agents titulaires d'un contrat à durée déterminée, à une durée de services publics effectifs au moins égale à quatre années en équivalent temps plein : 1° Soit au cours des six années précédant le 31 mars 2011 ; (...) Les quatre années de services publics doivent avoir été accomplies auprès de la collectivité territoriale ou de l'établissement public qui emploie l'intéressé au 31 mars 2011 (...) ". Aux termes de l'article 16 de la loi : " Les décrets en Conseil d'Etat mentionnés à l'article 13 déterminent, en fonction des objectifs de la gestion des cadres d'emplois, les cadres d'emplois et grades de la fonction publique territoriale auxquels les agents peuvent accéder et les modalités selon lesquelles sont définis, pour chaque agent candidat, le ou les cadres d'emplois qui lui sont accessibles. Ils fixent le mode de recrutement retenu pour l'accès à chaque cadre d'emplois et grade et les conditions de nomination et de classement dans ces cadres d'emplois des agents déclarés aptes ". Aux termes de l'article 17 de cette loi : " Dans un délai de trois mois suivant la publication des décrets prévus à l'article 16, l'autorité territoriale présente au comité technique compétent un rapport sur la situation des agents remplissant les conditions définies aux articles 14 et 15 ainsi qu'un programme pluriannuel d'accès à l'emploi titulaire. Ce programme détermine notamment, en fonction des besoins de la collectivité territoriale ou de l'établissement public intéressé et des objectifs de la gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois et des compétences, les cadres d'emplois ouverts aux recrutements réservés, le nombre d'emplois ouverts à chacun de ces recrutements et leur répartition entre les sessions successives de recrutement. Le programme pluriannuel peut mentionner également les prévisions sur quatre ans de transformation des contrats à durée déterminée en contrats à durée indéterminée conformément aux articles 21 et 41 de la présente loi. La présentation du rapport et du programme donne lieu à un avis du comité technique dans les conditions fixées à l'article 33 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée. Le programme pluriannuel d'accès à l'emploi est soumis à l'approbation de l'organe délibérant de la collectivité ou de l'établissement, puis mis en oeuvre par décisions de l'autorité territoriale. ".

5. Les dispositions précitées des articles 13, 14 et 15 de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 dont Mme D...se prévaut au soutien de sa demande de titularisation, ne sont pas assorties de précisions suffisantes pour permettre leur application immédiate. Par conséquent, leur entrée en vigueur était subordonnée à l'entrée en vigueur du décret en Conseil d'Etat, dont elles prévoyaient d'ailleurs l'intervention, et qui devait, notamment, déterminer les cadres d'emplois et grades de la fonction publique territoriale auxquels les agents peuvent accéder et le mode de recrutement retenu pour l'accès à chaque cadre d'emplois et grade. Ce décret, pris pour l'application du chapitre II du titre Ier de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique a été pris le 22 novembre 2012 et a été publié le 24 novembre suivant au Journal officiel de la République française. Les nouvelles dispositions législatives invoquées par la requérante n'étaient donc pas applicables à la date du 30 mars 2012, à laquelle le président du conseil régional d'Aquitaine a décidé de ne pas renouveler son contrat de travail arrivant à échéance le 30 avril 2012. Par suite, ni l'autorité administrative ni les premiers juges n'ont commis d'erreur de droit en considérant que la décision en litige ne méconnaît pas les dispositions susrappelées de la loi du 12 mars 2012.

6. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non recevoir opposées par la région Aquitaine, que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par la requérante, n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction ne peuvent être accueillies.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du conseil régional d'Aquitaine, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que Mme D...demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme D...la somme demandée au même titre par la région Aquitaine.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la région Aquitaine présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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No 14BX03361


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre (formation à trois)
Numéro d'arrêt : 14BX03361
Date de la décision : 28/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Application dans le temps - Entrée en vigueur - Entrée en vigueur subordonnée à l'intervention de mesures d'application.

Fonctionnaires et agents publics - Agents contractuels et temporaires - Fin du contrat - Refus de renouvellement.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Patricia ROUAULT-CHALIER
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : SELARL FAURIE MONPLAISIR et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-04-28;14bx03361 ?
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