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05/11/2013 | FRANCE | N°12-26598

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 05 novembre 2013, 12-26598


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 3 juillet 2004, M. X... (la caution) s'est rendu caution solidaire envers la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Provence Côte-d'Azur (la caisse) du remboursement d'un prêt consenti à Mme X..., destiné à financer l'acquisition d'un fonds de commerce ; que cette dernière ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires, la caisse a assigné en paiement la caution, qui lui a reproché d'avoir manqué à son devoir de mise en garde ; que Mme X... est

intervenue volontairement en appel ;
Sur le premier moyen :
Attend...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 3 juillet 2004, M. X... (la caution) s'est rendu caution solidaire envers la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Provence Côte-d'Azur (la caisse) du remboursement d'un prêt consenti à Mme X..., destiné à financer l'acquisition d'un fonds de commerce ; que cette dernière ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires, la caisse a assigné en paiement la caution, qui lui a reproché d'avoir manqué à son devoir de mise en garde ; que Mme X... est intervenue volontairement en appel ;
Sur le premier moyen :
Attendu que ce moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le second moyen, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 16 du code de procédure civile ;
Attendu que pour limiter à la somme de 10 000 euros, les dommages-intérêts alloués à la caution, l'arrêt, après avoir relevé que la caisse, tenue à une obligation de mise en garde envers une caution non avertie, n'avait pas satisfait à cette obligation, retient que le préjudice qui en est résulté ne consiste que dans la perte d'une chance de ne pas s' engager et qu'en considération des circonstances de l'espèce, notamment de l'intérêt que M. X... avait à garantir le projet de son épouse, ce dont il résulte une forte probabilité que même s'il avait été mis en garde il n'aurait pas renoncé à s'engager ;
Attendu qu'en statuant ainsi, sans inviter au préalable les parties à s'expliquer sur un moyen qu'aucune d'elles n'avait invoqué, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'infirmant le jugement entrepris, et statuant à nouveau, il a condamné la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Provence Côte-d'Azur à payer à M. X... la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts et, après compensation l'a condamné à payer à cette dernière la somme de 122 450,12 euros, avec intérêts au taux de 6,50 % à compter du 13 janvier 2009, se capitalisant dans les conditions de l'article 1154 du code civil, l'arrêt rendu le 13 septembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Provence Côte-d'Azur aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme globale de 3 000 euros à M. et Mme X..., et rejette sa demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq novembre deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté M. X... de sa demande tendant à voir dire que le Crédit agricole ne pouvait se prévaloir de son engagement de caution ;
ALORS QUE les jugements doivent être motivés ; qu'en cause d'appel, M. X... invoquait le caractère totalement disproportionné de l'engagement que lui avait fait souscrire le Crédit agricole au regard de ses biens et revenus ; qu'il demandait en conséquence la déchéance du créancier de ses droits à caution ; que dès lors, en le déboutant de cette demande sans énoncer aucun motif, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
, subsidiaire
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR limité à la somme de 10.000 ¿ la somme qu'elle condamnait le Crédit agricole à payer à M. X... à titre de dommages-intérêts ;
AUX MOTIFS QUE « sur le grief de manquement à l'obligation de mise en garde, la banque, qui ne soutient pas que M. X... avait la qualité de caution avertie, se borne à opposer à ce grief la circonstance que M. X... « disposait de revenus annuels au moment de la signature de l'engagement d'un montant de 164.645 ¿ » ; mais qu'on ne peut inférer du revenu de l'année 2003, dont la pérennité était incertaine puisqu'il excédait notablement la moyenne de la profession d'infirmier libéral et qu'il n'avait été que de l'ordre de 96.000 ¿ l'année précédente, ce dont la banque était informée pour en avoir fait état page 5 du dossier de financement, qu'il n'existait pour M. X... aucun risque d'endettement lié à la souscription du cautionnement d'un prêt de 185.000 ¿, d'autant que si les époux étaient propriétaires d'un bien immobilier estimé à 350.000 ¿, ce dernier était grevé d'un prêt de 289.000 ¿ souscrit en 2003 ; que la banque, qui était tenue à une obligation de mise en garde envers une caution non avertie, n'a pas satisfait à cette obligation ; que le préjudice qui en est résulté ne consiste que dans la perte d'une chance de ne pas s'être engagé ; que ce préjudice est à la mesure de la chance perdue, sans qu'il puisse être équivalent à l'avantage qui aurait été tiré d'un défaut de souscription du cautionnement ; qu'en considération des circonstances de l'espèce, notamment de l'intérêt que M. X... avait à garantir le projet de son épouse, ce dont il résulte une forte probabilité que même s'il avait été mis en garde il n'aurait pas renoncé à s'engager, le préjudice doit être fixé à la somme de 10.000 ¿ ; que le jugement attaqué est infirmé » ;
ALORS, DE PREMIERE PART, QU'en cause d'appel, M. X... faisait valoir que le préjudice que lui avait causé l'absence de mise en garde par la banque, devait être évalué à la totalité de la somme qu'elle lui réclamait au titre du cautionnement ; que le Crédit agricole se bornait à dénier sa responsabilité, sans faire valoir, même à titre subsidiaire, que le préjudice de la caution n'aurait constitué qu'une perte de chance ; que dès lors, en décidant que le préjudice subi par M. X... consistait en une perte de chance, la Cour d'appel a modifié l'objet du litige et a violé les articles 4 et 5 du Code de procédure civile ;
ALORS, DE DEUXIEME PART, QUE les parties au litige n'avaient pas analysé le préjudice subi par M. X... comme une perte de chance de ne pas s'être engagé ; que dès lors, en décidant que le préjudice de M. X... consistait en une telle perte de chance, sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations sur ce moyen relevé d'office, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;
ALORS, en tout état de cause, QU'en cause d'appel, ni le Crédit agricole ni les époux X... n'avaient soutenu que M. X... aurait eu "intérêt à garantir le projet de son épouse" ; que dès lors, en retenant l'existence d'un tel « intérêt » pour M. X..., la Cour d'appel a modifié les données du litige et a violé les articles 4 et 5 du Code de procédure civile ;
ALORS, DE QUATRIEME PART, QU'en décidant que M. X... avait intérêt à garantir le projet de son épouse, d'où il résultait que même mis en garde, il existait une forte probabilité qu'il n'aurait pas renoncé à s'engager, sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations sur ce moyen qu'elle relevait d'office, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;
ALORS, ENFIN, QU'en affirmant péremptoirement que M. X... avait intérêt à garantir le projet de son épouse, d'où il résultait que même mis en garde, il était fortement probable qu'il n'aurait pas renoncé à s'engager, sans indiquer de quels éléments ni de quelles pièces elle déduisait l'existence d'un tel « intérêt », et sans analyser, même sommairement, les éléments de preuve sur lesquels elle se serait fondée, la Cour d'appel a privé sa décision de motifs et a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 12-26598
Date de la décision : 05/11/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 13 septembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 05 nov. 2013, pourvoi n°12-26598


Composition du Tribunal
Président : M. Espel (président)
Avocat(s) : SCP Fabiani et Luc-Thaler, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.26598
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